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Frontières et souveraineté : quelles déclinaisons américaines ?

La délimitation maritime en mer de Beaufort, entre immobilisme et indifférence ?

Maritime delimitation in the Beaufort Sea, between immobility and indifference?
Marine Boulanger et Frédéric Lasserre

Résumés

Plusieurs revendications sur des espaces maritimes en Arctique se traduisent par des litiges entre États riverains, même si nombre de disputes ont été résolues à travers des négociations. Parmi ces litiges, on retrouve le différend entre États-Unis et Canada portant sur les limites de leur Zone Économique Exclusive en mer de Beaufort. Il s’agit d’un litige relativement ancien (1977) et qui, malgré les relations cordiales entre Ottawa et Washington, ne semble pas connaitre de solution. Cet article se propose d’analyser la situation en mer de Beaufort, afin d’évoquer des clefs de réflexion sur le pourquoi de la pérennisation de ce différend. Il s’agit de proposer une lecture synthétique d’éléments juridiques et de documents gouvernementaux permettant de rendre compte du faible empressement des gouvernements à résoudre ce litige de basse intensité.

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Texte intégral

1Si les médias dépeignent fréquemment l’Arctique, sur un ton alarmiste, comme une région soumise à de vives tensions, la réalité est bien différente, puisque cette région n’est pas bouleversée par des ambitions étatiques belliqueuses. Il perdure en effet quelques différends maritimes, un litige territorial mineur sur l’ile de Hans entre Danemark et Canada, et le processus de définition des plateaux continentaux étendus pourrait accroitre le nombre de différends, mais aucun d’entre eux ne semble susceptible de conduire à une nouvelle guerre froide (Castonguay, 2010 ; Lasserre, 2019 ; Pic et Lasserre, 2019).

  • 1 Agreement between the Government of the Kingdom of Denmark and the Government of Canada relating to (...)

2En ce qui concerne le Canada, le désaccord avec le Danemark en mer de Lincoln ne concerne par exemple que la délimitation d’une parcelle maritime de 222,3 km², et un différend territorial à propos de l’île de Hans de 1,3 km² (Lasserre, 2011 ; Byers, 2014 ; Breum, 2018). Du fait de la petitesse des zones concernées, les enjeux de ces deux différends sont faibles, d’autant que la frontière maritime autour de l’île de Hans a déjà été négociée et convenue en 19731. Le 28 novembre 2012, les deux États sont d’ailleurs parvenus à conclure un accord de principe sur le tracé de la frontière maritime en mer de Lincoln (Gouvernement du Canada, 2012). Cet accord était présenté comme offrant les bases pour mettre fin à un différend vieux de 40 ans ; mais, huit ans plus tard, force est de constater que le litige demeure. De même, des pistes de solution pour le litige de l’île de Hans avaient été annoncées par les médias (Humphreys, 2012), mais en 2020 rien ne semble avoir progressé, sans que cet immobilisme ne semble inquiéter ni le Canada, ni le Danemark.

  • 2 La zone maritime ainsi définie chevauche celle créée en 1976 tout d’abord comme zone de pêche, tran (...)

3Le désaccord en mer de Beaufort concerne quant à lui un espace maritime de 21 390 km², et perdure depuis 1977, date de la promulgation de la législation canadienne sur sa zone de pêche, qui chevauche celle proclamée en 1976 par les États-Unis2. Ce litige sur la définition des Zones Économiques Exclusives (ZEE) des deux États fait partie des différends portant sur des espaces maritimes dans l’Arctique, mais ceux-ci portent le plus souvent sur les limites des plateaux continentaux étendus, alors que la plupart des litiges concernant des ZEE ont été réglés ces dernières années, à commencer par la dispute entre Norvège et Russie (Lasserre, 2019). Il s’agit d’une dispute nettement moins médiatisée que celle portant sur le statut du passage du Nord-ouest par exemple (McDorman, 2009), et pour lequel il semble que les positions des deux protagonistes n’aient guère évolué, traduisant un certain immobilisme de leur part. Ce différend a suscité une littérature essentiellement canadienne, puisque peu d’auteurs américains s’intéressent à la question (par exemple Lawson 1981 ; Sands, 2010 ; Sas 2016) et très peu d’auteurs tiers (Bunik, 2018 ; van de Poll et Bekker, 2018). La plupart des auteurs reviennent sur l’origine du différend, avec une analyse juridique des traités, mais peu examinent l’évolution des positions des États, le contexte changeant avec l’enjeu des plateaux continentaux étendus, et le poids de la question pétrolière et gazière.

4Comment expliquer la pérennité de ce litige depuis 1977 ? Peu de propositions ont été rendues publiques depuis l’émergence du différend. Cet immobilisme parait paradoxal, car il s’inscrit dans une dynamique régionale de définition des limites maritimes en Arctique et d’intérêt soutenu pour les ressources arctiques (Lasserre, 2020). Il s’agit dans cet article d’analyser la situation en mer de Beaufort, afin d’évoquer des clefs de réflexion sur le pourquoi de la pérennisation de ce différend. A partir de documents juridiques et gouvernementaux, il s’agit essentiellement ici de proposer une lecture synthétique, selon une approche à différentes échelles, des éléments permettant de rendre compte du faible empressement des gouvernements à résoudre ce litige de basse intensité.

À l’origine de la dispute en mer de Beaufort

  • 3 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, 10 décembre 1982, 1834 RTNU, p. 176 (Entrée en (...)

5Il existe plusieurs zones maritimes définies par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 19823 (ci-après CNUDM). Tous les espaces maritimes sont mesurés à partir de la ligne de base qui correspond à la ligne des eaux de la plus grande marée basse. Les eaux intérieures sont les eaux situées en deçà de cette ligne (baies, havres, ports, etc.), et la mer territoriale désigne la partie de mer qui s’étend au large jusqu’à 12 milles marins. L’État côtier est souverain dans ses eaux intérieures et sa mer territoriale, puisqu’elles sont en quelque sorte assimilées au territoire terrestre. Les eaux, le fond marin ainsi que le sous-sol sont en effet sous sa compétence pleine et entière, grevée du droit de passage inoffensif dans la mer territoriale.

6On relève aussi la zone économique exclusive (ci-après ZEE) de 200 milles marins, et le plateau continental qui s’étend jusqu’au rebord externe de la marge continentale, ou jusqu’à la limite de 200 milles marins quand ce rebord se trouve à une distance inférieure. Dans sa ZEE, l’État côtier n’est pas souverain mais possède des droits souverains sur les ressources naturelles, biologiques ou non-biologiques présentes à la surface de l’eau, dans la colonne d’eau, sur les fonds marins et dans les sous-sols en vue de leur exploration ou de leur exploitation. Ce sont des droits portant non pas sur la zone en tant qu’espace mais sur les ressources qu’elle contient. Concernant le régime juridique du plateau continental, celui-ci est très semblable au régime de la ZEE, et concerne l’exploration et l’exploitation des ressources naturelles des fonds marins. Si le plateau continental physique s’étend au-delà de la limite de la ZEE, on parle alors de plateau continental étendu, et dans cet espace maritime, l’État côtier dispose de droits souverains sur les ressources des fonds matins et du sous-sol. La définition de l’extension de la ZEE est purement géométrique : 200 milles marins à partir de la ligne de base ; celle du plateau continental étendu est géomorphologique, il s’agit de la ligne marquant la base du talus continental, soit la ligne entre le plateau continental physique et la plaine abyssale (Bartenstein, 2010). Il incombe aux États côtiers de documenter l’emplacement de cette limite et d’en fournir les preuves auprès de la Commission pour les limites du plateau continental (CLPC), une agence des Nations Unies qui examine les revendications sur la seule base de critères géologiques et géomorphologiques (Bartenstein, 2010 ; Lasserre, 2019).

7En mer de Beaufort, le désaccord porte sur la délimitation latérale entre la ZEE et le plateau continental des États-Unis (la limite à l’est de cet espace maritime) et ceux du Canada (la limite ouest de son plateau).

Fig. 1. Le désaccord en mer de Beaufort

Fig. 1. Le désaccord en mer de Beaufort

Sources : Byers (2013) ; Boulanger (2016) ; National Research Council (2014). Responding to Oil Spills in the U.S. Arctic Marine Environment. Washington, DC : The National Academies Press. https://doi.org/​10.17226/​18625, p. 17 ; CBC News (2016), www.cbc.ca/news/canada/north/us-govt-proposes-arctic-drilling-leases-1.3492963 ; Alaska Dispatch News (2017), https://www.adn.com/​politics/​2016/​12/​20/​obama-prohibits-offshore-drilling-in-most-of-us-arctic-waters/​#_ ; Ministère des Affaires indiennes et du Nord (2016), https://www.rcaanc-cirnac.gc.ca/​fra/​1490033456946/​1583417196574#chp3-1 ; Bureau of Ocean Energy Management (BOEM) (2020), Alaska OCS Region, https://www.boem.gov/​alaska-ocs-region ; BOEM (2020), Beaufort Sea Outer Continental Shelf, https://www.boem.gov/​sites/​default/​files/​documents/​environment/​Beaufort%20Sea%20Active%20Leases%20ADMIN%20Boundaries.pdf ; BOEM (2017), Beaufort Sea, Outer Continental Shelf 2017, https://www.mmc.gov/​priority-topics/​arctic/​arctic-oil-and-gas-development-and-marine-mammals/​

  • 4 Convention, entre la Grande-Bretagne et la Russie, concernant les limites de leurs possessions resp (...)
  • 5 Convention between the United States of America and His Majesty the Emperor of Russia, for the Cess (...)

8Depuis 1977, constatant le chevauchement de leurs revendications, ces deux États sont en désaccord sur la délimitation de leurs espaces maritimes. Le litige repose sur une interprétation divergente des dispositions du traité de 1825 précisant la frontière terrestre entre la Russie et la Grande Bretagne4, et du traité de 1867 entre la Russie et les États-Unis5 portant sur l’achat par ces derniers de l’Alaska. Le premier traité établit la frontière terrestre entre l’Alaska, appartenant alors à la Russie, et le Yukon, en suivant le 141ème méridien ouest. Le second traité décrit la frontière orientale de l’Alaska en suivant le même tracé que celui voulu par le traité de 1825. C’est à la lumière de ces deux traités que le Canada revendique que la frontière maritime entre son plateau continental et celui des États-Unis suive le 141ème méridien ouest :

9Le Traité de 1825 précise notamment dans son article III que cette frontière se définit comme suit :

  • 6 Traité entre la Grande-Bretagne et la Russie de 1825, op. cit., Art. 3.

La ligne de démarcation suivra la crête des montagnes situées parallèlement à la Côte, jusqu’au point d’intersection du 141e degré de longitude Ouest (même Méridien) ; et, finalement, du dit point d’intersection, la même ligne méridienne du 141e degré formera, dans son prolongement jusqu’à, la mer Glaciale, la limite entre les Possessions Russes et Britanniques sur le Continent de l’Amérique du Nord-Ouest.6

10Le traité de 1867 précise la délimitation entre la Russie et les États-Unis dans les mers de Béring et des Tchouktches en utilisant des termes similaires à ceux présents dans le traité de 1825 :

  • 7 Traité russo-américain de 1867, op. cit., Art. 1.

The western limit within which the territories and dominion conveyed, are contained, passes through a point in Behring’s Straits on the parallel of sixty-five degrees thirty minutes north latitude, at its intersection by the meridian which passes midway between the islands of Krusenstern of Ignalook, and the island of Ratmanoff, or Noonarbook, and proceeds due north without limitation, into the same Frozen Ocean.7

  • 8 Ibid.

Il précise aussi la limite orientale de l’Alaska en suivant le même tracé que celui voulu par le Traité de 1825 : « [T]he said meridian line of the 141st degree, in its prolongation as far as the Frozen Ocean »8.

11Pour le Canada, les traités invoquant le prolongement de la frontière terrestre en mer, « jusqu’à la mer Glaciale » ou « as far as the Frozen Ocean », impliquent que cette frontière ne s’arrête pas à la laisse de basse mer mais se prolongent en mer, jusqu’à la zone englacée. Les États-Unis, quant à eux, estiment que les traités ne portent que sur des segments terrestres de territoires, et qu’en mer, la délimitation appropriée doit être une ligne d’équidistance, c’est-à-dire une ligne dont les points de coordonnées sont situés à égale distance de la côte des deux États (Pharand, 1988 ; Kirkey, 1995 ; Baker et Byers, 2012 ; Byers, 2013 ; Huebert, 2018).

12L’arbitrage de 1903 définissant la frontière entre le sud de l’Alaska et la Colombie-Britannique, sur le versant Pacifique des Rocheuses, n’a pas davantage abordé le domaine maritime. La doctrine juridique ne prévoyait pas à cette époque de domaine maritime autre que le droit coutumier de la mer territoriale de 3 miles marins (Quéneudec, 1977 ; Rigaldies, 1995).

  • 9 Convention sur le Plateau Continental, 29 avril 1958, Nations Unies, Recueil des Traités, vol. 499, (...)
  • 10 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, op. cit., Art. 287.

13Que prévoit le droit international de la mer dans cette situation ? Lorsqu’il existe un différend maritime entre deux États, la procédure obligatoire à suivre est la négociation. Ce mode de règlement non-juridictionnel est prévu à l’article 6 al. 1 de la Convention sur le plateau continental de 19589 et aux articles 74 s’agissant de la délimitation de la zone économique exclusive et 83 concernant les plateaux continentaux de la CNUDM. Elle est un préalable à l’accès aux autres méthodes de règlement des différends. À défaut d’accord dans un délai raisonnable, les États peuvent recourir à la médiation, à la conciliation ou encore à l’arbitrage, voire à la Cour internationale de justice ou au Tribunal international du droit de la mer10.

Pour l’instant, toutes les tentatives de négociations des deux États sont restées vaines. L’arbitrage ne semble pas envisagé par les parties (Byers, 2013).

Un dilemme pour les deux parties

14Pourquoi la situation demeure-t-elle dans l’impasse depuis 1977 ? Un premier élément de réponse réside dans la configuration géographique de la mer de Beaufort. En changeant d’échelle, on s’aperçoit que le principe auquel s’accrochent les deux États leur procure des avantages, mais aussi des inconvénients.

15L’origine du litige portait sur la limite entre les ZEE des deux protagonistes. Lorsque s’est précisée la perspective de la définition de plateaux continentaux étendus, au-delà de la limite des 200 milles marins, il est apparu que le maintien du raisonnement canadien risquait de le priver d’espaces maritimes conséquents ; alors que l’option américaine pourrait lui permettre de revendiquer des espaces maritimes plus importants – si la CLPC venait confirmer la présence d’un plateau continental étendu, bien entendu. L’application du principe d’équidistance diminue en effet l’étendue de la ZEE canadienne, mais ouvre à un plus grand espace maritime, au-delà, au titre du plateau continental étendu, une perspective que la revendication de 2019 à l’ouest de l’archipel arctique vient confirmer (Fig. 2). Ainsi, maintenir l’argument du 141e méridien accroit certes la surface de la ZEE que la Canada revendique, mais impose de composer avec un plateau continental étendu réduit. Pour les États-Unis, l’argument de la ligne d’équidistance permet de revendiquer une la ZEE plus étendue, mais le prolongement de cette ligne d’équidistance vient réduire la surface d’un futur plateau continental étendu.

Fig. 2. L’articulation des limites proposées par le Canada et les États-Unis, avec leurs revendications sur les plateaux continentaux étendus

Fig. 2. L’articulation des limites proposées par le Canada et les États-Unis, avec leurs revendications sur les plateaux continentaux étendus

Source : d’après Lasserre 2019

16Cette analyse repose sur l’hypothèse que les deux États ne développent pas d’argumentaires d’ordre différents pour résoudre le litige portant sur la ZEE et le plateau continental étendu. On voit mal Ottawa, en effet, plaider pour l’application de la ligne du 141e méridien dans la ZEE ; mais pour l’application du principe d’équidistance au-delà des 200 miles marins. Inversement, il serait difficile pour Washington de plaider en faveur du principe d’équidistance pour régler le litige portant sur la ZEE, mais pas pour le plateau continental étendu.

17Dès lors, pour Washington comme pour Ottawa, se pose la question de l’option à retenir. Pour Washington, l’argument de l’équidistance est aisé à défendre puisque ce principe figure dans la CNUDM, que les États-Unis considèrent comme relevant de la coutume juridique internationale même s’ils ne l’ont jamais ratifiée (Roach, 2014 ; Lasserre, 2018). Pour Ottawa, plaider en faveur du 141e méridien permet d’offrir une ZEE un peu plus étendue, mais limite l’extension possible du plateau continental étendu tout en requérant un argumentaire historique et interprétatif des traités de 1825 et de 1867.

Un enjeu considéré comme non stratégique… et politiquement trop délicat ?

18Des négociations ont eu lieu dans le passé, à plusieurs reprises (Boulanger, 2016) notamment en 1977 (Lackenbauer, 2020), puis en 2010 (Boswell, 2010a ; Sharp, 2016 ; Lackenbauer, 2020). Aucune autre information n’a filtré depuis au sujet de discussions de haut niveau sur le litige, alors que le Canada notamment a entrepris des discussions avec les gouvernements des provinces et des territoires pour le partage d’éventuels revenus de l’exploration pétrolière dans la région (Williams, 2018).

19Une des raisons à l’origine de l’absence de limite maritime en mer de Beaufort pourrait être que cette situation n’est pas considérée comme problématique et donc urgente par les deux gouvernements. En effet, de nombreux témoignages attestent que ce différend ne parait pas constituer un enjeu de souveraineté majeur pour le Canada ni pour les États-Unis (Baker, 2009 ; Comité permanent à la défense nationale du Canada, 2010 ; Boswell, 2010a, 2010 b ; Byers, 2013 ; Gouvernement du Canada, 2017) : « Tous ces désaccords sont bien gérés et ne posent aucun problème pour le Canada sur le plan de la défense » (Ministère des Affaires étrangères, 2010, p. 8).

20L’Arctique ne constituait guère un enjeu géopolitique majeur pour les États-Unis après la fin de la guerre froide. En effet, alors que le Canada a toujours eu tendance à réagir avec ferveur lorsqu’il s’agit de montrer qu’il est prêt à préserver ses intérêts nationaux face à Washington, les États-Unis se montrent relativement indifférents vis-à-vis des questions arctiques. Ils ont une perception globale et stratégique de la région arctique, où l’Alaska n’est qu’un élément, important certes du fait des enjeux pétroliers, mais pas critique (Frédérick, 1988 ; Huebert, 2009 ; Lackenbauer et Huebert, 2014 ; Plouffe, 2020). La dispute en mer de Beaufort ne semble être qu’un irritant mineur aux yeux des États-Unis, sans enjeu pressant. Un sondage publié en 2011 au sujet des négociations entre États-Unis et Canada reflétait une attitude davantage axée sur l’affirmation des droits du Canada que sur la recherche d’un compromis : 49 % des répondants du sud du Canada et 50 % des répondants du nord du pays estimaient qu’Ottawa devait surtout affirmer ses droits, contre 10 % aux États-Unis. Trouver un accord était la priorité pour 62 % des répondants aux États-Unis contre 43 % au Canada ; tandis que le sujet ne suscitait aucune réponse pour 28 % des répondants aux États-Unis contre 6 à 8 % au Canada (RigZone, 2011). Relevant par ailleurs que les médias canadiens abordent bien davantage cette dispute que leurs homologues étatsuniens, Lackenbauer et Huebert parlent à ce propos d’un « hyper-nationalisme canadien » en contraste avec la perception d’intérêts géopolitiques globaux pour les Américains (Lackenbauer et Huebert, 2014).

21En effet, si le gouvernement canadien semble estimer que le litige en mer de Beaufort ne constitue pas un enjeu majeur, il n’en demeure pas moins que la question demeure sensible dans l’opinion publique canadienne, au même titre que la question de la souveraineté sur le passage du Nord-ouest (Lasserre, 2013) ou l’île de Hans, petit ilot disputé entre Danemark et Canada dans le détroit de Nares, entre le Groenland et l’île d’Ellesmere (Huebert, 2005). La politique arctique canadienne a mis en exergue, à l’époque du gouvernement conservateur de Stephen Harper, l’idée de la défense de la souveraineté canadienne en Arctique, menacée sous plusieurs angles (Genest et Lasserre, 2015). Il a donc été élu par la population canadienne avec l’idée, entre autres, qu’il veillerait à préserver l’intégrité du territoire du pays. Cet accent sur les enjeux d’une souveraineté prétendument menacée a contribué au regain d’intérêt de l’opinion canadienne, tout en instrumentalisant cette stratégie à des fins partisanes. Porté au pouvoir en 2015, le parti libéral de Justin Trudeau a adopté un discours nettement moins alarmiste quant à la souveraineté canadienne en Arctique, se positionnant davantage sur les thèmes de la protection environnementale et des discussions avec les communautés inuites (Lackenbauer, 2017 ; Chater, 2019). Cependant, le fait est que nombreux sont les Canadiens qui considèrent aujourd’hui que l’Arctique appartient à l’identité nationale (Landriault, 2016, 2019). Toute perception, de la part de l’opinion publique canadienne, de concession de la part du gouvernement canadien devrait sans doute être compensée par un solide argumentaire en faveur de la pertinence d’un accord – une gageure politique ?

La question du statut de la zone maritime des Inuvialuits

  • 11 Nous écrivons Inuvialuits avec un pluriel français, bien que ce terme soit déjà un pluriel en inuvi (...)

22La question de la résolution du différend en mer de Beaufort se double d’une possible complication du fait des accords négociés par le Canada avec les autochtones, notamment avec les Inuvialuit. La Convention définitive des Inuvialuits11, signée en 1984, confère aux autochtones des droits aux ressources, dans les espaces terrestre et océanique de la région désignée des Inuvialuits (Fig. 3). En vertu de cette Convention, le Canada a l’obligation de respecter les droits qui y sont transférés et de protéger ladite région en veillant à procéder à des consultations des Inuvialuits avant la prise de décisions pouvant les affecter. L’espace d’application de cet accord est souvent présenté comme un quadrilatère grossier englobant des espaces terrestres et maritimes, sans qu’il soit défini clairement de quels droits les Inuvialuits disposent en mer, ni à quel titre, puisque la limite de la Convention, adossée au 141e méridien, s’éloigne parfois de plus de 400 km du territoire canadien, donc hors de toute ZEE : comment le gouvernement fédéral aurait-il pu accorder aux Inuvialuits des droits dont lui-même ne disposait pas ?

Fig. 3. La zone concernée par la Convention définitive des Inuvialuits, 1984

Fig. 3. La zone concernée par la Convention définitive des Inuvialuits, 1984

Source : d’après Boulanger (2016)

23Dans l’incertitude, étant donné que les droits autochtones sont protégés par la Loi constitutionnelle canadienne de 1982, le gouvernement a le devoir de limiter toute violation de ceux-ci, de consulter les peuples autochtones et de prévoir des compensations. Si dans un éventuel accord apurant le litige en mer de Beaufort, le Canada et les États-Unis décidaient que le tracé de la délimitation passait dans la région désignée des Inuvialuits à l’est du 141e méridien, alors il est possible que l’exécutif inuvialuk conteste l’accord au motif qu’il lèse les droits reconnus aux Inuivialuits en vertu de la Convention de 1984 (Boulanger, 2016 ; Huebert, 2018). Dans un contexte de relations parfois difficiles avec les autochtones (Lasserre et al, 2020), il est probable que cet élément de la négociation soit dissuasif pour le gouvernement canadien, sauf à obtenir une concession spécifique des États-Unis sur ce point.

L’enjeu des hydrocarbures, un aiguillon émoussé

  • 12 Eurasia Group (nd, sans doute 2014). Opportunities and Challenges for Arctic Oil and Gas Developmen (...)

24Depuis le tournant du siècle et la fonte accélérée de la banquise en Arctique, nombre d’observateurs ont souligné l’ampleur des ressources extractives en Arctique et l’attrait qu’elles pourraient susciter pour les États de la région, ainsi que pour des tiers comme la Chine et l’Inde (Lasserre et Pic, 2021). L’Arctique canadien et l’Arctique américain à eux seuls contiendraient 45 % de toutes les réserves en hydrocarbures non-découvertes de l’Arctique12. Depuis la découverte en 1968 d’importants gisements de pétrole sur la côte nord de l’Alaska, et de quelques gisements dans les îles Sverdrup dans l’ouest de l’archipel arctique canadien, les géologues estiment que des réserves appréciables doivent se trouver en milieu offshore, en des quantités et des conditions d’exploitabilité qui restent à déterminer. D’importants projets d’exploration ont été lancés de la fin des années 1990 à la crise financière de 2009 (Lasserre, 2010). L’intérêt des compagnies pétrolières et la perspective de découvertes avantageuses ont, semble-t-il, contribué à l’enlisement des discussions, le triangle disputé, à faible profondeur, recelant possiblement des gisements que les deux gouvernements souhaiteraient exploiter (Dosman et Abele, 1981 ; Keil, 2014 ; Boulanger, 2016).

25Pourtant, plusieurs éléments laissent à penser que le pétrole, contrairement à une idée reçue, n’est qu’un élément parmi d’autres dans l’équation politique en mer de Beaufort. C’est par ailleurs davantage le style de gouvernement qui a pu transformer le pétrole en élément de tension, que la ressource en elle-même.

26Ainsi, même à l’époque de la multiplication des projets pétroliers en mer de Beaufort, il semble que les compagnies pétrolières n’aient pas exercé de pression particulière sur les gouvernements canadien et américain pour qu’ils règlent leur litige, alors même que cela aurait pu ouvrir la zone concernée à l’exploitation (Boulanger, 2016). Tacitement, les deux gouvernements n’ont pas ouvert la zone litigieuse à des concessions pétrolières, maintenant le triangle disputé en « zone interdite » (Ministère des Affaires indiennes et du Nord, 2016). Au contraire, c’est alors que l’intérêt des compagnies pétrolières pour la zone accuse un fléchissement prononcé que la dispute a été quelque peu ravivée. En effet, en mer de Beaufort et en mer des Tchouktches, dans un contexte de déclin de la production pétrolière en Alaska, passée de 2 millions de barils par jour (b/j) à 480 000 en 2019 (EIA, 2020), la plupart des compagnies comme Chevron, Conoco et Shell sont parties, cette dernière avec pertes et fracas (Macalister, 2015), au point que seules ENI et Hilcorp détenaient encore des baux de prospection en 2020 (BOEM, 2020), faisant passer le nombre de baux actifs de 694 en 2008 à 11 en 2020 (Stein, 2020). Le déclin de l’attrait pour l’exploration pétrolière en mer de Beaufort s’inscrit dans un contexte général de désenchantement pour les ressources arctiques, chères, encore assez difficiles à exploiter alors que d’autres gisements abondent à travers le monde, et dont précisément les cours mondiaux demeurent déprimés (Lasserre et Pic, 2021 ; Lasserre, 2021). De plus, par décret, le président Obama a fermé la porte à tout nouveau bail d’exploration dans les eaux arctiques américaines en décembre 2016 (Fears et Eilperin, 2016), moratoire que le président Trump n’a pas réussi à lever (Davenport, 2019 ; Reuters, 2020).

27De fait, l’administration Trump s’est efforcée, non seulement de lever le moratoire sur la prospection en mer, mais également de promouvoir la prospection terrestre, notamment dans la réserve naturelle de l’Arctic National Wildlife Refuge (ANWR) (Rosen, 2020a), sans grand succès alors que la transition vers l’administration Biden est entamée (Reuters, 2020 ; Rosen, 2020b). Du côté canadien, un moratoire de cinq ans a été mis en place par le gouvernement fédéral en décembre 2016 pour l’exploration dans les eaux arctiques, en même temps que le moratoire étatsunien (Anselmi, 2019), tandis que le gouvernement du Yukon fermait la porte à toute nouvelle concession d’exploration en 2017 (CBC, 2017). La chute des cours mondiaux, des conditions d’exploitation qui demeurent difficiles en Arctique, le moratoire des deux gouvernements, le nombre croissant de banques qui refusent de financer des projets pétroliers en Arctique font que l’attrait pour l’exploration pétrolière en mer de Beaufort s’est évanoui (Kyle, 2019 ; Rosen, 2020c ; Lasserre et Pic, 2021).

28C’est à la faveur de la volonté affirmée de l’administration Trump de relancer l’exploration pétrolière en mer de Beaufort, y compris potentiellement dans la zone en litige, que la dispute s’est quelque peu rappelée à l’opinion publique (BOEM, 2017 ; Higginbotham et Spence, 2019), alors que l’administration Obama avait rapidement rejeté l’idée, proposée par le Bureau of Ocean Energy Management en mars 2016, d’ouvrir de nouvelles concessions pétrolières en mer de Beaufort, possiblement dans la zone disputée (Windeyer, 2016 ; Sharp 2016). Le président Obama a finalement opté pour un moratoire permanent en décembre 2016. La faible couverture médiatique de la relance possible de la dispute du fait de la réactivation de l’exploration pétrolière tient, sans nul doute, à la déconfiture des projets : le désintérêt des compagnies pétrolière n’offre aucun incitatif aux deux gouvernements, ni sur le plan politique – pourquoi risquer un scandale politique en revenant sur des mesures environnementales ? – ni sur le plan économique – aucun eldorado d’hydrocarbures ne semble en vue.

Conclusion

29Malgré leurs tentatives pour trouver un terrain d’entente, le Canada et les États-Unis ne sont toujours pas parvenus à un accord. Cela peut sembler paradoxal dans un double contexte régional de négociations soutenues pour tenter de définir les limites des domaines maritimes des États riverains, et d’efforts de valorisation des ressources extractives potentielles. Émergeant en 1977, le différend ne semble pas avoir évolué depuis cette date. Cet immobilisme apparent semble traduire une certaine indifférence des deux protagonistes, un faible intérêt pour un règlement du litige. L’absence de délimitation dans cette mer arctique ne semble être véritablement problématique ni pour les deux gouvernements, ni pour les compagnies pétrolières qui ont d’autres occasions ailleurs dans le monde et dont l’intérêt pour l’exploration dans cette région de l’Arctique semble déclinant. De plus, les deux gouvernements font face à un dilemme, car la position de chaque État comporte des avantages et des inconvénients en terme d’espaces maritimes possiblement revendiqués. Par ailleurs, l’aiguillon de l’exploration pétrolière semble s’amenuiser. A l’image du désaccord canado-américain sur le statut du passage du Nord-ouest, officialisé dans le traité sur la coopération dans l’Arctique de 1988 (Gouvernement du Canada, 1988), ou du statu quo dans le litige entre Danemark et Canada au sujet de l’île de Hans, il semble que le statu quo de la divergence d’interprétation, paraisse une option viable à court et moyen terme pour les deux gouvernements, qui ne paraissent aujourd’hui déployer aucun effort particulier pour tenter de résoudre le litige.

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Notes

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2 La zone maritime ainsi définie chevauche celle créée en 1976 tout d’abord comme zone de pêche, transformée formellement en ZEE en 1983.

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3 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, 10 décembre 1982, 1834 RTNU, p. 176 (Entrée en vigueur le 16 novembre 1994).

4 Convention, entre la Grande-Bretagne et la Russie, concernant les limites de leurs possessions respectives sur la côte du nord-ouest de l’Amérique et la navigation de l’Océan Pacifique, 16 février 1825. [Traité russo-anglais de 1825]

5 Convention between the United States of America and His Majesty the Emperor of Russia, for the Cession of the Russian Possessions in North America to the United States, 30 mars 1867, Treaties and Conventions, Rev. Ed. 1873, p. 741. [Traité russo-américain de 1867].

6 Traité entre la Grande-Bretagne et la Russie de 1825, op. cit., Art. 3.

7 Traité russo-américain de 1867, op. cit., Art. 1.

8 Ibid.

9 Convention sur le Plateau Continental, 29 avril 1958, Nations Unies, Recueil des Traités, vol. 499, p. 311. (Entrée en vigueur le 10 juin 1964).

10 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, op. cit., Art. 287.

11 Nous écrivons Inuvialuits avec un pluriel français, bien que ce terme soit déjà un pluriel en inuvialuktun. Nous nous basons pour cela sur les recommandations du Bureau fédéral de traduction concernant le nom commun inuit, https://www.btb.termiumplus.gc.ca/tpv2guides/guides/chroniq/index-fra.html?lang=fra&lettr=indx_autr8CcgK5l0zhmI&page=908h3POeARMA.html, et de l’Office québécois de la langue française, http://gdt.oqlf.gouv.qc.ca/ficheOqlf.aspx?Id_Fiche=1299275. Au reste, les publications officielles de la Société Makivik reprennent cette orthographe d’Inuits.

12 Eurasia Group (nd, sans doute 2014). Opportunities and Challenges for Arctic Oil and Gas Development. Report for Wilson Center, Washington, D.C. : p. 6, https://www.wilsoncenter.org/sites/default/files/media/documents/event/Artic%20Report_F2.pdf.

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Table des illustrations

Titre Fig. 1. Le désaccord en mer de Beaufort
Crédits Sources : Byers (2013) ; Boulanger (2016) ; National Research Council (2014). Responding to Oil Spills in the U.S. Arctic Marine Environment. Washington, DC : The National Academies Press. https://doi.org/​10.17226/​18625, p. 17 ; CBC News (2016), www.cbc.ca/news/canada/north/us-govt-proposes-arctic-drilling-leases-1.3492963 ; Alaska Dispatch News (2017), https://www.adn.com/​politics/​2016/​12/​20/​obama-prohibits-offshore-drilling-in-most-of-us-arctic-waters/​#_ ; Ministère des Affaires indiennes et du Nord (2016), https://www.rcaanc-cirnac.gc.ca/​fra/​1490033456946/​1583417196574#chp3-1 ; Bureau of Ocean Energy Management (BOEM) (2020), Alaska OCS Region, https://www.boem.gov/​alaska-ocs-region ; BOEM (2020), Beaufort Sea Outer Continental Shelf, https://www.boem.gov/​sites/​default/​files/​documents/​environment/​Beaufort%20Sea%20Active%20Leases%20ADMIN%20Boundaries.pdf ; BOEM (2017), Beaufort Sea, Outer Continental Shelf 2017, https://www.mmc.gov/​priority-topics/​arctic/​arctic-oil-and-gas-development-and-marine-mammals/​
URL http://journals.openedition.org/espacepolitique/docannexe/image/9388/img-1.png
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Titre Fig. 2. L’articulation des limites proposées par le Canada et les États-Unis, avec leurs revendications sur les plateaux continentaux étendus
Crédits Source : d’après Lasserre 2019
URL http://journals.openedition.org/espacepolitique/docannexe/image/9388/img-2.png
Fichier image/png, 3,0M
Titre Fig. 3. La zone concernée par la Convention définitive des Inuvialuits, 1984
Crédits Source : d’après Boulanger (2016)
URL http://journals.openedition.org/espacepolitique/docannexe/image/9388/img-3.png
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Pour citer cet article

Référence électronique

Marine Boulanger et Frédéric Lasserre, « La délimitation maritime en mer de Beaufort, entre immobilisme et indifférence ? »L’Espace Politique [En ligne], 42 | 2020-3, mis en ligne le 14 septembre 2021, consulté le 28 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/espacepolitique/9388 ; DOI : https://doi.org/10.4000/espacepolitique.9388

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Auteurs

Marine Boulanger

Chercheure (M. Sc. Géogr.)
Mar.boulang@gmail.com

Frédéric Lasserre

Professeur
Département de géographie, Université Laval (Québec)
Directeur du Conseil québécois d’Études géopolitiques
Frederic.Lasserre@ggr.ulaval.ca

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