Ce que nous avons entendu : peuples autochtones & COVID-19 : rapport complémentaire de l'Agence de la santé publique du Canada

Février 2020

Ce rapport a été dirigé par le Waakebiness-Bryce Institute for Indigenous Health (WBIIH) de la Dalla Lana School of Public Health, Université de Toronto, et soumis à l'Agence de la santé publique du Canada.

Table des matières

Remerciements

Nous tenons à remercier les Aînées Claudette Commanda et Julie Ivalu et le gardien du savoir Clayton Shirt d’avoir offert des introductions, des conclusions et des réflexions traditionnelles pendant les séances de mobilisation collective du 10 août et du 2 septembre 2020. Leurs implications ont permis d’avoir des pour conversations et un travail bien fondés et bien menés. Les aînées Claudette et Julie et le gardien du savoir Clayton ont apporté connaissances et esprit à cet important travail.

Nous tenons également à remercier les personnes qui nous ont aidées : Adriana Gonzalez, Devon Bowyer, Lauren Yates et Lisa Howard du programme de maîtrise en santé publique – santé autochtone 2019-2021 à la Dalla Lana School of Public Health de même qu’Andrea Bowra, Denise Webb, Claire Hiscock, Harrison Mair, Sharon Tan et Victoria Pringle du Waakebiness-Bryce Institute for Indigenous Health pour la prise de notes et l’animation des séances de mobilisation collective du 2 septembre 2020. Nous tenons également à remercier Andrea Bowra et Sharon Tan pour leur aide à la révision du présent rapport.

Nous remercions le Bureau de l’administrateur en chef de la santé publique du Canada (ACSP) de nous avoir invités à participer à cet important projet.

Enfin, nous tenons à exprimer notre gratitude aux membres des communautés des Premières Nations, des Inuits et des Métis qui nous ont fait part de leurs connaissances et de leurs expériences, ainsi qu’à ceux qui ont pris le temps de correspondre et de soumettre des documents, lors des consultations en août et en septembre, et tout au long de l'automne et de l'hiver 2020/2021, alors que le rapport était en cours de finalisation.

Nous espérons que ce rapport reflète fidèlement ce que les membres des communautés autochtones ont fourni. Par respect pour la vie privée, ce rapport n’identifie pas les orateurs individuels. Nous espérons que les voix et les expériences de tous les membres des communautés des Premières Nations, des Inuits et des Métis qui ont participé au processus de mobilisation communautaire seront entendues et reflétées dans ce rapport. Nous espérons également qu’il pourra soutenir le travail à venir de la Dre Teresa Tam, administratrice en chef de la santé publique du Canada (ACSP), de son équipe à l’Agence de la santé publique du Canada et des membres des communautés autochtones.

Introduction/préface

Ce rapport est un complément du rapport annuel de l’ACSP sur l’état de la santé publique au Canada en 2020, « Du risque à la résilience : Une approche axée sur l’équité concernant la COVID-19 ». À la fin de février 2020, la COVID-19 est devenue une préoccupation croissante au Canada, avec des cas signalés dans plusieurs régions. La COVID-19 a changé notre façon de vivre, de travailler et de socialiser. On a demandé à la Dre Mashford-Pringle et à l’équipe de recherche de rédiger un rapport complémentaire reflétant ce qui a été entendu au cours des séances de mobilisation d’août et de septembre 2020.

Se situer

Ce rapport est un résumé de ce que nous avons entendu de la part des membres des communautés autochtones. Les auteurs du rapport ont travaillé à résumer et à contextualiser l’information qui nous a été fournie. Les auteurs sont :

  • Angela Mashford-Pringle : je suis de la Première Nation de Timiskaming (clan de l’ours), mais je suis née et j’ai grandi à Toronto. Je participe à ce travail en tant qu’universitaire anishinaabe.
  • Christine Skura : je suis Métis. Je suis née et j’ai grandi dans la région du Grand Toronto. Je suis infirmière autorisée et je fais actuellement une maîtrise en santé publique autochtone à l’Université de Toronto. 
  • Sterling Stutz : je suis un pionnier d’origine juive ashkénaze et irlandaise/anglaise vivant à Toronto et je termine ma maîtrise en santé publique autochtone à la Dalla Lana School of Public Health de l’Université de Toronto.
  • Thilaxcy Yohathasan : je suis un colon tamoul, mais je suis née et j’ai grandi dans la région du Grand Toronto. Je prépare actuellement ma maîtrise en santé publique sur la santé autochtone à la Dalla Lana School of Public Health de l'Université de Toronto

Contexte

La propagation rapide du SARS-CoV-2 à l’échelle mondiale et au Canada a donné un aperçu de son potentiel de causer un choc extraordinaire à nos systèmes et aux personnes les plus vulnérables. Sans la priorisation d’un accès équitable aux articles essentiels et aux ressources des collectivités à risque, la propagation rapide du virus fera en sorte qu’il sera difficile pour de nombreuses personnes de répondre rapidement et adéquatement à leurs besoins. Depuis de nombreuses années, les communautés autochtones connaissent des inégalités sociales et économiques en raison du colonialisme et sont confrontées à des inégalités en matière de santé, comme un lourd fardeau de maladies cardiovasculaires, l’insécurité alimentaire, le manque d’eau potable, etc. Ces circonstances font que de nombreuses collectivités sont particulièrement peu préparées à la pandémie de COVID-19.

Maunula (2013) a fait valoir que les collectivités des Premières Nations ne peuvent pas adopter pleinement des pratiques de santé publique comme le lavage fréquent des mains en raison de préoccupations concernant la disponibilité de l'eau propre. Aussi, elles ne peuvent pas pratiquer l’éloignement physique ou s’auto-isoler, car les maisons sont surpeuplées et qu’il n’y a pas suffisamment de bâtiments communautaires pour héberger les personnes infectées (comme un hôpital de fortune). Mme Maunula a fait valoir que les inégalités auxquelles les membres des Premières Nations sont confrontés chaque jour sont amplifiées en situation d’urgence, ce qui pourrait entraîner un risque de nombre de cas et de décès plus élevé attribuables à la pandémie.

Charania (2011) a étudié trois collectivités de la baie James (Fort Albany, Attawapiskat, Kashechewan) pour sa thèse de maîtrise. Il a souligné que lors des entrevues avec les membres de la collectivité et les dirigeants de la bande, ils ont déclaré que des facteurs sociaux comme le surpeuplement, l’incapacité de s’isoler, l’incapacité de suivre les messages de santé publique comme le lavage fréquent des mains étaient extrêmement difficiles à faire, car les ressources n’étaient pas disponibles. Cela est aussi mentionné dans la littérature (Boggild et coll., 2011; Charania et Tsuji, 2011; O'Sullivan et Bourgoin, 2010; White, Murphy et Spence, 2012). L’eau potable et accessible, le logement adéquat sans moisissure et pas surpeuplé, et des ressources humaines en santé suffisantes pour la taille de la collectivité ainsi qu’un accès à des spécialistes et à de l’équipement spécialisé sont nécessaires à la vie quotidienne, mais extrêmement importants en situation de pandémie.

Le besoin d’accroître la préparation dans les collectivités autochtones a été reconnu par les recommandations formulées dans le Plan canadien de lutte contre la pandémie d’influenza pour le secteur de la santé (PCLPISS) et le Plan de lutte contre la pandémie d’influenza de la région de l’Ontario de la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits (PLPIRO-DGSPNI). Les recommandations comprenaient des fournitures et des services supplémentaires en cas d’absence de crise ou d’éclosion de maladies infectieuses, afin d’être prêt en cas d’urgence. Un fonds d’urgence devrait être établi au niveau fédéral, et peut-être par les autorités sanitaires régionales, provinciales et territoriales ou au niveau local des Premières Nations. Les communautés autochtones ont besoin d’un effectif de personnels de santé supplémentaire, avec les moyens d’embaucher et de former des prestataires de soins de santé autochtones qui sont incités à rester dans leur communauté et sont reconnus pour leur expertise et leurs compétences professionnelles. En outre, une équipe interdisciplinaire de professionnels de la santé (médecins spécialisés, infirmières supplémentaires, santé préventive, santé publique et autres) devrait être déployée dans les collectivités qui demandent ces services en cas d’urgence afin d’obtenir du soutien par la prestation immédiate de soins de santé physique ainsi que par la prévention et le bien-être mental et émotionnel. Il devrait y avoir d’autres centres de soins établis ou facilement érigés ou réquisitionnés avec des fonds fédéraux pour soutenir la conversion ou les mises à niveau nécessaires pour les soins et le traitement des peuples autochtones. Afin de dissiper des préoccupations de longue date concernant l’insécurité alimentaire, un plan d’approvisionnement alimentaire devrait être élaboré et mis à jour fréquemment. En collaboration avec les bureaucrates du gouvernement, des améliorations et des agrandissements de logement devraient être apportés au besoin dans chaque Première Nation de façon prioritaire afin de réduire l’itinérance et le surpeuplement en vue de réduire la transmission des maladies.

Certains des principaux obstacles ou défis qui ont été abordés de façon constante dans la littérature étaient des communications ciblées et claires pour veiller à ce que les messages ne contredisent pas les lignes directrices gouvernementales ou ne soient pas fournis par de nombreuses sources en plus d’avoir une équipe interdisciplinaire de répondants de première ligne (médecins, infirmières, agents de police, dirigeants, etc.) qui travaillent ensemble pour limiter la propagation communautaire de la peur, des rumeurs et de la mésinformation (Charania, 2011; Maunula, 2013; Agence de la santé publique du Canada, 2006a, 2006b; Sistovaris et coll., 2020). Cela fait partie des communications, mais l’importance de savoir qui, comment et où les messages sont transmis aide à réduire rapidement la diffusion des renseignements trompeurs ou incorrects.

En raison de l’inaction historique et continue des représentants du gouvernement et des impacts continus de la colonisation, certaines collectivités autochtones (Premières Nations, Inuits ou Métis) craignent que le gouvernement n’entende ou n’aborde pas les points forts et les défis auxquels elles font face au cours de cette pandémie en constante évolution (Malloy, 2001; Royal Commission on Aboriginal Peoples, 1996; Truth and Reconciliation Commission of Canada, 2015a). Il faut établir de véritables relations avec les Autochtones. Une relation doit être réciproque et doit exister au-delà « d’une autre consultation ou d’un autre engagement » qui est limité par le temps et les priorités du gouvernement.

Terminologie

La terminologie associée aux peuples autochtones a changé plusieurs fois au cours des 150 dernières années. Le tableau 1 résume la terminologie utilisée dans ce rapport.

Tableau 1: Terminologies utilisée dans ce rapport

Autochtones
Le terme « peuples autochtones » fait référence aux premiers habitants de toutes les terres du monde. Dans le cadre de ce rapport, le terme « peuples autochtones » désigne les membres des Premières Nations, les Inuits et les Métis.
Première Nation (s)
Défini légalement en vertu de la Loi sur les Indiens (1876) pour décrire les premiers peuples d’Amérique du Nord qui vivent dans ce qu’on appelle maintenant le Canada.
Inuits
Les peuples autochtones circumpolaires qui ont une langue, une culture et des traditions distinctes. Les Inuits du Canada vivent principalement dans l’Inuit Nunangat, qui est composé de quatre régions : Inuvialuit dans les Territoires du Nord-Ouest, au Nunavut, au Nunavik dans le nord du Québec et au Nunatsiavut dans le nord du Labrador.
Métis
« Le terme Métis désigne une personne qui s’identifie comme Métis, qui est distincte des autres peuples autochtones, qui est d’ascendance métisse historique et qui est acceptée par la Nation métisse » (Metis Nation of Canada, 2017).
Collectivités
Terres détenues pour que les Premières Nations et les Inuits puissent les utiliser et en profiter conformément à la Loi sur les Indiens (2019).
Collectivité rurale
Collectivités dont la population est inférieure à 30 000 habitants et qui se trouvent à plus de 30 minutes d’une collectivité de plus de 30 000 habitants (Ministère ontarien de la Santé et des Soins de Longue durée,2011).
Région isolée
Zone géographique avec des vols réguliers et des services téléphoniques, mais sans accès routier à longueur d’année (Agence de la santé publique du Canada, 2009).
Collectivité éloignée
Les collectivités situées à plus de trois cent cinquante kilomètres du centre de services le plus proche et qui peuvent avoir ou non un accès routier à longueur d’année ou qui dépendent de tierces parties pour le transport vers les grands centres (Agence de la santé publique du Canada, 2009).
Peuples autochtones urbains
Désigne les Premières Nations, les Inuits et les Métis qui résident dans les villes et les régions rurales et qui reconnaissent la diversité entre les collectivités autochtones et au sein de celles-ci (Ministère ontarien des Affaires autochtones,2019).

En tant qu’auteurs de ce rapport, nous reconnaissons que le langage est fluide et il peut changer avec le temps. Nous reconnaissons également que de nombreux peuples autochtones s’auto-identifient et peuvent ne pas utiliser le langage ou les définitions ci-dessus.

Méthodologie

En raison de la pandémie de COVID-19, la méthode utilisée pour produire le présent rapport et tenir des engagements communautaires a été adaptée à une communication entièrement à distance ou virtuelle. Cette manière de faire a donné lieu à un recrutement virtuel de membres des collectivités autochtones et à des cercles de discussion virtuels qui ont été utilisés spécifiquement pour la deuxième discussion. Les voix de la communauté représentées sont celles qui ont répondu volontairement à la demande de participants et qui ont contribué à l’une des discussions en ligne ou à l’information soumise par voie électronique. On a demandé aux participants des organisations et des collectivités autochtones de soumettre toute information (p. ex., dépliants, médias sociaux, documents, etc.) par courriel au Bureau de l’ACSP ou à la Dre Mashford-Pringle.

La discussion virtuelle du 10 août, 2020 a été ouverte par Claudette Commanda, aînée des Premières Nations, et comprenait deux présentations (voir l’annexe C) :

  • Dre Theresa Tam présente l’état actuel de la COVID-19 au Canada
  • Dre Margo Greenwood fait une présentation sur le renforcement des inégalités structurelles après la COVID-19

Le reste du temps (environ une heure) a été alloué aux participants pour parler des réponses de leur collectivit é ou de leur organisme à la COVID-19. Des participants des communautés des Premières Nations, des Inuits et des Métis étaient présents pour ces discussions.

La discussion virtuelle du 2 septembre,2020 a fait appel à un cercle de discussion virtuel modifié pour recueillir des données et répondre à trois questions pertinentes après les introductions traditionnelles de l’aînée inuite Julie Ivalu et du gardien du savoir des Premières Nations Clayton Shirt :

  1. Qu’est-ce qui vous rend fier de la réponse de votre collectivité à la pandémie de COVID-19?
  2. Qu’est-ce qui a aidé votre collectivité à demeurer forte dans sa réponse à la COVID-19?
  3. Quels changements avez-vous apportés qui pourraient être adoptés par d’autres communautés autochtones?

Au cours de l’appel Zoom (logiciel de visioconférence) de trois heures, les participants sont passés à six cercles de discussion virtuels regroupant de quatre à huit participants chacun. L’animateur de l’équipe de recherche a posé chaque question et a permis à tous les participants de parler et de fournir au moins deux séries de réponses avant de passer à la question suivante. Le cercle de discussion virtuel s’est terminé par une clôture traditionnelle. On rappelle aux participants d’envoyer par courriel à l’équipe de recherche tout document supplémentaire qu’ils souhaitent inclure dans le rapport. L’équipe de recherche a pris des notes détaillées pendant les cercles de discussion virtuels. Pour honorer les épistémologies et les méthodologies autochtones, nous avons offert du tabac et invité deux aînés et un gardien du savoir à offrir des prières d’ouverture et de clôture des discussions pour nous assurer que nous avons commencé et terminé de la bonne façon.

Après les discussions et les présentations, l’équipe de recherche a codé les notes et analysé les thèmes qui se sont dégagés. L’analyse thématique a été envoyée à tous les participants pour obtenir leurs commentaires sur les thèmes. Après avoir reçu les commentaires des participants sur l’analyse thématique, l’équipe de recherche a rédigé le rapport complémentaire pour réfléchir aux récits et aux thèmes. Les participants ont reçu le rapport complémentaire complet pour obtenir d’autres commentaires avant que le rapport ne soit présenté à l’Agence de la santé publique du Canada.

Thèmes clés

Les sections suivantes présentent les principaux thèmes et commentaires fournis par les participants aux discussions en ligne ainsi que dans les soumissions envoyées à l’équipe de recherche.

Souveraineté

La souveraineté se compose des droits et libertés inhérents attribués aux peuples autochtones qui comprend l’autodétermination (le droit, le pouvoir et l’autorité) de continuer à vivre selon les modes de vie et le savoir autochtones.

Fermetures dirigées par la collectivité

Certaines collectivités étaient préoccupées par les décisions prises par des gouvernements externes (p. ex., fédéral, provinciaux/territoriaux ou municipaux) qui ont une incidence sur la santé et le bien-être des Autochtones. Cependant, des règlements administratifs ou d’autres documents de politique étaient déjà en place ou révisés au niveau des Premières Nations pour faciliter la préparation aux situations d’urgence. Ainsi, de nombreuses collectivités autochtones avaient fermé leurs frontières en tant qu’autorités souveraines, parfois avant les ordres régionaux ou provinciaux. Certaines collectivités estimaient qu’elles pouvaient prendre le contrôle et empêcher les gens de l’extérieur d’entrer dans leur collectivité pour protéger leurs résidents contre la COVID-19. Une participante inuite a mentionné la réaction rapide de la collectivité à la fermeture, ce dont cette participante était fière. Par conséquent, certains participants ont fait remarquer que cette autonomie et cette souveraineté doivent se poursuivre de façon plus substantielle après la pandémie.

Certaines collectivités rurales des Premières nations, agissant comme des autorités souveraines, avaient leurs propres services de police locaux pour empêcher les gens d’entrer dans la collectivité s’ils n’en étaient pas membres. D’autres collectivités se sont associées à leurs hôpitaux locaux, à leurs postes de police et à des organismes communautaires pour fermer la collectivité. Certaines collectivités ont également été en mesure d’embaucher un responsable de la recherche des contacts en santé publique pour surveiller les personnes qui se sont rendues dans la collectivité, ainsi que pour mettre en œuvre une politique de quarantaine obligatoire de 14 jours pour les visiteurs.

Dans certaines régions du Canada, les collectivités autochtones ont refusé l’entrée de non-résidents dans leurs collectivités en utilisant des barricades physiques pour contrôler l’accès routier. Certains participants des Premières Nations ont indiqué que les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux n’appuyaient pas ou ne respectaient pas adéquatement les obstacles propres à leur collectivité. À l’inverse, certains gouvernements provinciaux ont déclaré que les collectivités des Premières Nations pourraient encore être en confinement et que les non-résidents se verraient refuser l’entrée. Cependant, dans ces situations, les gouvernements provinciaux n’ont pas aidé à faire respecter les barricades ou les ordonnances de non-application. Cela a entraîné des cas où des personnes non autochtones ont tenté d’entrer de force dans les collectivités des Premières Nations, comme dans le cas de la (Première Nation de Beausoliel). Un participant a dit : « Je suis fier de dire que nous avons gardé les gens de l’extérieur de la communauté à l’extérieur de la PN. Cela a compris un point de contrôle pour gérer les personnes qui entrent dans la collectivité. Je suis heureux de le faire pour aider la communauté. Il était très important de dire non aux gens de Toronto qui profitent du littoral. »

Certaines collectivités des Premières nations sont situées près de la frontière avec les États-Unis. Ce point a été soulevé par des participants de la Colombie-Britannique et de l’Ontario. D’autres peuples autochtones vivent dans des villes près des postes frontaliers où des camions et des voyageurs essentiels provenant de régions ayant des taux élevés de COVID-19 sont autorisés à entrer au Canada. Certaines collectivités autochtones sont exposées à des entrées multiples de personnes qui ne sont pas des membres de la collectivité, ce qui augmente le risque de transmission de la COVID-19 et d’éclosions. Un leadership communautaire fort au sujet des droits inhérents des collectivités autochtones à protéger leurs terres a été essentiel pour réduire ou éliminer les personnes qui ne sont pas des membres de la collectivité et empêcher la transmission de la COVID-19. Cependant, certains participants ont déclaré que le gouvernement fédéral devrait discuter de l’ouverture de la frontière avec toutes les collectivités situées près de ces postes frontaliers avant de rouvrir, car cela pourrait mettre des vies en danger en raison des entrées ou des intrusions.

Nécessité de l'engagement des Autochtones dans le processus décisionnel

Certaines collectivités des Premières Nations étaient préoccupées par le manque de consultation au sujet de la réouverture possible des frontières internationales (p. ex., États-Unis/Canada ou aéroports), car il s’agit d’une question qui ne relève pas de leur compétence. Pourtant, les peuples et les collectivités autochtones seront touchés par la politique canadienne concernant la réouverture de la frontière.

Les membres de la collectivité ont dit que la souveraineté est appliquée lorsqu’ils ont la capacité de régir la santé publique des membres de leur collectivité et qu’ils ont la capacité de prendre des décisions pour élaborer leurs propres plans et protocoles. Le soutien peut venir des gouvernements provinciaux et territoriaux si la collectivité le demande. Dans le contexte actuel de la COVID-19, les gouvernements provinciaux et territoriaux devraient collaborer avec les collectivités pour établir des partenariats en vue de la réouverture des frontières, des écoles et des entreprises.

Cependant, certains participants étaient d’avis qu’on ne devrait pas s’attendre à ce qu’ils suivent les lignes directrices provinciales (p. ex., les calendriers provinciaux pour la réouverture progressive). Les collectivités devraient plutôt avoir le pouvoir de décider quand et comment leurs écoles rouvriront et comment organiser des visites et des cérémonies sociales ou en pratiquant l’éloignement physique. Comme il a été mentionné dans les discussions et les présentations, les collectivités autochtones ont développé et révisé, mis en œuvre et appliqué des plans de lutte contre la pandémie qui intégraient les messages actuels de l’Agence de la santé publique du Canada à l’échelon fédéral, ainsi que les messages provinciaux et territoriaux.

Lien de parenté

Les ancêtres autochtones « voyaient un lien de parenté entre les plantes, les insectes, les oiseaux, les animaux, les poissons et les êtres humains » ou tout ce qui faisait partie de l’univers comme « Toutes mes relations » ou « Toute la création ». « C’était un modèle relationnel, un modèle axé sur les liens de parenté, dans lequel nous sommes tous égaux, mais nous avons des tâches différentes à accomplir sur terre » (Martinez, Salmón, & Nelson, 2008, p. 90).

À partir d’une approche fondée sur les forces, les membres et les organismes des collectivités autochtones ont expliqué comment ils fournissaient des aliments, des médicaments et des fournitures aux aînés et aux membres des collectivités (rurales, éloignées et urbaines). Il y a eu une discussion sur la résilience des jeunes et la façon dont ils ont participé aux activités pendant la première vague (de février 2020 à septembre 2020) de la pandémie de COVID-19.

Soutenir les personnes âgées et les Aînés

Les Aînés sont des leaders respectés dans la collectivité et ils favorisent la transmission des traditions, de la culture, de la langue et du savoir. Les personnes âgées autochtones ne sont pas toutes des Aînés. Les Aînés partagent des connaissances ancestrales et fournissent des conseils sur des questions personnelles et communautaires. Dans bien des cas, les Aînés sont les détenteurs du savoir qui doit être transmis aux générations futures. Les gardiens du savoir traditionnel sont des leaders qui possèdent des talents ou des connaissances qu’ils transmettent aux générations futures. Les enfants et les jeunes désignent les Aînés et les gardiens du savoir comme des personnages importants qui les aident à comprendre leur culture, et la perte d’un aîné ou d’un gardien du savoir symbolise une perte de langue, de sagesse et de connaissances.

Dans les régions urbaines, rurales et éloignées, la plupart des collectivités ont travaillé en collaboration pour veiller à ce que les Aînés reçoivent des repas et soient protégés ou isolés des personnes qui peuvent avoir été en contact étroit avec une personne qui a la COVID-19. Les Aînés représentent une faible proportion des populations autochtones ,ils ont été fortement protégés pendant les étapes d’isolement de la COVID-19. Dans de nombreuses collectivités des Premières Nations, les Aînés vivant en groupe n’ont pas été autorisés à recevoir des visites en raison du risque accru de complications graves découlant de la COVID-19. Dans bien des cas, les visites virtuelles et à distance ont été utilisées pour compenser cela. L’épicerie et les repas étaient également livrés tous les jours.

Tout comme la protection des Aînés, les gardiens du savoir ont également été protégés pour assurer la continuité et la protection de la culture. Certains participants des Premières Nations ont également indiqué que les mères ou grands-mères de clan avaient la capacité d’aider les collectivités à rester concentrées. Elles sont également importantes, car elles sont les gardiennes de la culture des aliments, des médicaments et des façons d’être traditionnels. Par conséquent, certains participants ont déclaré que certaines collectivités autochtones ont travaillé avec des Aînés, des gardiens du savoir et d’autres praticiens de la culture pour planter et récolter des médicaments et des aliments pour la guérison et les médicaments traditionnels.

Dans certains cas, des membres de la collectivité ont dit que les Aînés craignaient d’être retirés de la collectivité pour être hospitalisés ou de ne jamais pouvoir revenir à la maison. Pour cette raison, certains Aînés craignaient de parler de leur santé parce qu’ils ne voulaient pas être déplacés. De plus, les membres de la collectivité ont relevé une tension entre le besoin de protéger les Aînés contre le risque de transmission de la COVID-19 et le besoin de continuer à visiter et à protéger la santé mentale, émotionnelle et spirituelle et le bien-être des Aînés. Un participant a souligné « Les Aînés ont été séquestrés, ce qui a affaibli leur esprit [...] les gens disaient que ce n’était pas notre façon de faire, que nous ne faisions pas cela à nos Aînés. » Cela met en évidence la tension importante qui existe entre la façon de respecter la libre volonté des Aînés, tout en travaillant avec eux et leurs soignants pour assurer un environnement sécuritaire pendant la pandémie. Pourtant, de nombreux Aînés ont connu un isolement social accru pendant que les collectivités s’efforçaient de les protéger contre la transmission du virus, mais les répercussions de l’isolement social des Aînés ne sont pas encore claires, même si de nombreux participants ont exprimé des préoccupations. Malgré les défis, les membres de la collectivité ont exprimé leur fierté à l’égard de leurs solutions novatrices pour maintenir des liens sociaux avec les Aînés en utilisant la technologie, comme les tablettes électroniques et les appels Zoom.

Jeunes

Les jeunes sont un élément important des collectivités autochtones et ils représentent l'avenir. Les jeunes autochtones ont fait preuve et continuent de faire preuve d’un fort sentiment de leadership, de créativité et de résilience en réponse à la pandémie de COVID-19. Dans certaines collectivités, les jeunes ont mené des activités de mobilisation pour soutenir d’autres enfants et jeunes, tout en maintenant des protocoles d’éloignement physique. Certains participants ont expliqué que les jeunes utilisaient des plateformes de médias sociaux comme Facebook pour s’occuper de la santé sociale des membres de leur famille et de la collectivité. Dans certains cas, les jeunes ont facilité l’éducation et la discussion avec des publications dans les médias sociaux. Selon quelques participants, ces initiatives étaient liées aux modes de savoir des Autochtones, notamment par les personnages et les illustrations représentant des êtres humains, des animaux et des caractéristiques de la terre. Selon quelques participants, la COVID-19 a également entraîné un manque de possibilités d’emploi pour les étudiants du secondaire et de l’université. Par exemple, pour les possibilités d’emploi, les programmes scolaires et les enseignements, on s’attend à ce que les étudiants travaillent de la maison. Cependant, il y a des obstacles associés à l’accès à ces possibilités, comme l’impossibilité pour certaines personnes d’accéder à des appareils, aux médias sociaux ou à Internet.

Sécurité alimentaire

Les discussions et les présentations ont montré comment les peuples autochtones se sont unis et ont trouvé des moyens de se soutenir les uns les autres pendant les difficultés de la première vague de la pandémie de COVID-19. Par exemple, partager des fournitures ou des aliments (traditionnels et axés sur le marché). Les participants inuits ont indiqué que les collectivités ont travaillé ensemble pour veiller à ce que personne ne souffre de la faim et à ce que les aînés, les familles et les parents seuls reçoivent suffisamment de nourriture et de fournitures. Certaines collectivités inuites et des Premières Nations ont aidé les membres de la collectivité à retourner dans leur communauté pour éviter d’être dans des espaces rapprochés les uns des autres. Dans les Territoires du Nord-Ouest, on a aidé les peuples autochtones à se rendre sur leurs terres pendant la première vague. Certains participants ont déclaré que le fait d’être sur les terres ancestrales les aidait à pratiquer l’éloignement physique et à pouvoir récolter des aliments traditionnels. Des collectivités éloignées des Premières Nations ont créé des services de livraison d’aliments pour atténuer les réalités de l’insécurité alimentaire pendant la COVID-19, certaines collectivités livrant des fournitures de santé comme des masques et du désinfectant pour les mains. Les repas contenaient des fruits et des légumes qui étaient livrés en grande quantité aux familles. Dans certains cas, les collectivités cultivaient leurs propres fruits et légumes et veillaient à ce qu’il y ait un approvisionnement de riz sauvage et de viande et d’aliments traditionnels, car les gens dépendaient moins des approvisionnements extérieures.

Les membres de la collectivité ont souligné l’importance de l’accès local à des aliments nutritifs et ils ont soulevé des préoccupations au sujet de l’augmentation des coûts d’accès aux aliments. Cette hausse des prix est attribuable aux répercussions économiques de la pandémie, comme l’augmentation des limites de transport en raison des confinements. Un participant a fait remarquer « sur le plan administratif, nous avons dû restructurer complètement notre façon de faire les choses. Nous devons être moins dépendants des ressources externes. Nous devons nous assurer d’avoir un approvisionnement en riz sauvage et en viande. Nous devons cultiver nos propres fruits et légumes et avoir nos propres marchés alimentaires. Cependant, il est difficile de partager des aliments traditionnels tout en agissant conformément aux mesures d’éloignement physique. Nous examinons également la façon dont nous gérons notre capital humain – nous nous attendons à ce que les gens viennent travailler s’ils ne se sentent pas bien et nous devons examiner différentes façons de travailler. »

Tradition

Certains participants des Premières Nations ont déclaré utiliser des approches fondées sur les forces pour lutter contre la pandémie, comme l’humour, le plaisir et les jeux. Par exemple, une collectivité a ouvert sa cour d’école et a isolé des zones afin que les gens puissent utiliser la propriété à tour de rôle pour se réunir en petits groupes afin de se détendre. Il est important de souligner que les collectivités ont organisé et mis en œuvre ces occasions d’avoir du plaisir et d’être créatives pour les peuples autochtones par les peuples autochtones. Certaines collectivités des Premières Nations ont mis en œuvre des activités permettant un éloignement physique, comme le bingo et des défis de danse. Dans certaines collectivités, ils ont créé des projets de médias sociaux collaboratifs comme le défi « Pass the brush » mettant en vedette des membres de la collectivité en tenue de cérémonie. Le pow-wow virtuel a été tenu en ligne, ce qui a permis aux participants de se connecter virtuellement malgré les exigences relatives à l’éloignement physique.

Les participants autochtones ont parlé du privilège de pouvoir passer du temps avec leur famille. Avant la COVID-19, « les familles passaient aussi peu que trois à quatre heures par jour ensemble avec de nombreuses priorités concurrentes », selon un participant. Avec le confinement et les changements subséquents dans la société, les familles ont pu passer beaucoup plus de temps ensemble. Certaines collectivités autochtones ont aidé les gens à renouer avec leur terre de façons anciennes et nouvelles, comme les jardins, les cérémonies et les enseignements traditionnels. Un participant a dit : « Nous sommes retournés à la langue, nous avons commencé à communiquer avec la communauté et nous avons tenu une cérémonie. Nous sommes retournés à nos enseignements traditionnels, malgré les difficultés et les dépendances. »

Éloignement physique

Les collectivités et les nations autochtones sont axées sur les liens de parenté, ce qui présente des difficultés pour suivre les lignes directrices en matière de santé publique sur la distance physique et limiter les contacts étroits avec le ménage ou la famille immédiate. De nombreux participants ont dit que l’éloignement physique au sein des ménages « serait extrêmement difficile ou impossible ». Pour certains Autochtones, il leur manquait l’espace nécessaire pour pratiquer l’éloignement physique ou s’isoler à l’intérieur de leur maison ou dans leur collectivité (p. ex., zones urbaines, logements surpeuplés dans les réserves). L’éloignement physique a eu une incidence sur les Premières Nations, les Inuits et les Métis, car ils ne pouvaient pas se réunir ni tenir de cérémonies comme ils le faisaient avant la pandémie. Cela signifiait qu’ils ne pouvaient pas participer à des activités avec un éloignement physique et qu’ils auraient peut-être dû choisir entre respecter les lignes directrices en matière de santé publique et passer du temps avec leur famille élargie et leurs pratiques culturelles. Ces conditions sont également néfastes pour les Autochtones en milieu urbain qui connaissent des taux élevés d’itinérance. Dans certains foyers des Premières nations et des Inuits, le surpeuplement fait en sorte que les gens dorment à tour de rôle ou n’ont pas accès à une salle de bain, ce qui augmente le risque de la COVID-19. Les participants se sont dits préoccupés par le fait que si un membre du ménage avait contracté la COVID-19, il n’y aurait pas assez d’espace ou de ressources pour l’isoler du reste du ménage.

Santé mentale

Établir des liens avec la collectivité

Certains participants ont dit que le fait d’établir des liens avec d’autres a aidé le personnel, les adultes, les jeunes et les enfants à établir des liens physiques, culturels ou spirituels. En trouvant ce terrain d’entente, les collectivités, qu’elles soient virtuelles ou de proximité, ont été en mesure de se soutenir les unes les autres de bien des façons différentes, notamment en partageant de la nourriture et des histoires et en organisant des activités en ligne ou à distance. De plus, lorsque les jeunes des Premières Nations, des Inuits et des Métis peuvent établir des liens avec leur terre, la langue, la famille et la culture, cela a des répercussions positives sur les jeunes Autochtones d’aujourd’hui et probablement de demain. Un participant à la conférence téléphonique du 2 septembre a affirmé ceci : « Lorsque vous aimez et prenez soin les uns des autres, de grandes choses peuvent se produire. Les gens devraient investir dans la nourriture et les services de santé mentale. J’espère que le gouvernement continuera d’investir dans ces services même après la COVID. »

Répercussions

Les participants se sont dits préoccupés par le bien-être mental et émotionnel des membres de la collectivité. De nombreux participants ont déclaré que les peuples autochtones pourraient faire face à des difficultés accrues pour avoir accès aux pratiques culturelles en raison des protocoles de santé publique, le manque de capacité de se rendre dans des collectivités en raison des mesures de confinement, une crainte ou une préoccupation grandissante de contracter le virus et la fermeture des activités récréatives comme les sports, les divertissements, les rassemblements culturels et les vacances en famille. Le fait de vivre dans la promiscuité a également eu une incidence sur la santé mentale, en particulier dans les cas de situations physiques et émotionnelles malsaines pour les femmes, les enfants et les personnes LGBTQ2S+, entre autres. Les Autochtones qui ont des problèmes de santé mentale sont plus à risque d’être incarcérés ou de se suicider.

Bien que de nombreuses collectivités et organisations autochtones aient tenté de réduire l’isolement et la solitude que les personnes peuvent ressentir, certaines collectivités autochtones ont connu une nette augmentation des décès et des tentatives de suicides depuis le début de la pandémie de COVID-19. « Les gens sont coupés de leurs pratiques culturelles et, si vous viviez hors réserve au cours des premiers mois, vous ne pouviez pas y retourner, alors il y avait des gens qui flottaient sans leur système de soutien », comme l’a fait remarquer un participant à l’appel du 2 septembre. Certains participants métis et des Premières Nations ont créé de nouveaux réseaux de soutien avec des gens en ligne ou à proximité s’ils étaient en ville. Cela a contribué à améliorer les points de vue des gens sur la COVID-19 et a aidé les personnes en difficulté. Pourtant, les participants se sont dits préoccupés par les conséquences possibles du manque de possibilités d’emploi et de l’isolement accru chez les jeunes, y compris la peur accrue, la dépression et les considérations liées au suicide.

Soutien et financement communautaires

Les participants ont indiqué qu’ils ne voyaient pas de considérations adéquates liées à la santé mentale dans la planification fédérale ou provinciale/territoriale liée à la COVID-19 en plus de la planification antérieure qui existait avant la pandémie. Bien que certains participants aient fait remarquer que l’augmentation de la disponibilité et du financement des services de soutien communautaire est une étape cruciale et qu’elle est extrêmement importante dans le contexte de la COVID-19, où la pandémie met à rude épreuve des ressources et des services existants au-delà des limites raisonnables. Quelques participants ont mentionné que les listes d’attente pour les services font en sorte qu’il est difficile d’avoir accès à du soutien et cette attente peut aussi avoir des répercussions à long terme sur les collectivités rurales, éloignées et isolées.

Traumatismes historiques

Les peuples autochtones ont vécu et continuent de vivre des traumatismes intergénérationnels et intragénérationnels partout au Canada en raison des politiques et des pratiques gouvernementales ancrées dans la colonisation. Par exemple, certains participants des Premières Nations ont indiqué que le confinement était semblable au système de laissez-passer qui était en place pendant des décennies au Canada. Le confinement ne permettait pas aux Autochtones de se déplacer ou de voir leurs proches, ce qui rappelle la façon dont les Premières Nations avaient besoin de la permission de l’agent des Indiens pour quitter la réserve. Certains messages de santé publique exhortaient également les gens à cesser de participer aux cérémonies en raison de l’incertitude quant aux modes de transmission de la COVID-19, ce qui a eu pour conséquence que le gouvernement dicte aux peuples autochtones à quel moment ils peuvent avoir accès à une cérémonie.

Consommation de substances

La Prestation canadienne d’urgence (PCU) distribuée par le gouvernement fédéral vise à aider les personnes à gérer les conséquences financières du confinement. Cela a été extrêmement nécessaire et bénéfique pour de nombreuses personnes. Plusieurs participants ont soulevé des préoccupations au sujet de certaines personnes qui ont utilisé la PCU pour acheter des substances (p. ex., drogues ou alcool). Les participants et l’équipe de recherche sont d’avis que cette question mérite d’être étudiée de manière approfondie, afin d’atténuer la stigmatisation accrue associée à la consommation de substances et les soutiens du revenu. Les participants ont parlé de façon retentissante des avantages positifs de la PCU, qui fournissait le soutien du revenu nécessaire aux familles; de nombreux participants ont déclaré que la PCU leur permettait de se nourrir et de nourrir leur famille. Certains participants ont expliqué que le nombre de surdoses liées aux opioïdes et au fentanyl a doublé dans leur collectivité. Certains participants ont parlé des effets néfastes de la toxicomanie et des problèmes de santé mentale sur les traditions culturelles et la parenté. Un participant a déclaré : « La Colombie-Britannique souffre de la COVID et de la crise des opioïdes, plus de cent soixante-dix décès par mois depuis le début de la crise des opioïdes, c’était une crise avant la COVID. » Un autre participant a dit : «Et oui, nous avons eu nos problèmes, nous avons appris qui vendait des drogues, qui était toxicomane, qui jouait. Nous avons pu prendre du recul pour voir les véritables défis de notre collectivité. Nous devions être une bouée de sauvetage pour ceux qui éprouvaient des difficultés dans la collectivité. Quand vous aimez et prenez soin les uns des autres, de grandes choses peuvent se produire. » 

Certains participants ont mentionné que, à mesure que les collectivités autochtones entraient dans le confinement, certains résidents de leurs collectivités éprouvaient un sevrage d’opioïdes ou d’autres drogues ou alcool à mesure que les déplacements à destination ou en provenance des collectivités éloignées devenaient plus difficiles, ce qui a eu une incidence sur l’approvisionnement en drogues de la collectivité. Certaines collectivités autochtones ont été en mesure d’accroître la disponibilité des programmes et des services de traitement de la toxicomanie et de l’alcoolisme, y compris les trousses de naloxone. Certains participants ont indiqué qu’il est nécessaire d’accroître le financement pour la santé mentale et les dépendances, surtout pendant la COVID-19.

Leadership communautaire et préparation

Résilience

Les communautés autochtones ont rapidement pris les choses en main et elles ont travaillé en collaboration, comme cela se fait habituellement en temps de crise. Les collectivités et les dirigeants communautaires ont fait preuve d’ingéniosité en trouvant des façons novatrices d’utiliser les ressources sur place pour assurer la sécurité, le calme et la protection des membres de la collectivité contre la COVID-19 et ses répercussions subséquentes sur l’insécurité alimentaire, l’isolement et la dépression. Un participant a dit : « La communauté inuite a vraiment essayé de s’assurer que la communauté ne souffrait pas de la faim. La communauté a essayé de s’informer de ce qui se passait au sujet de la pandémie. Je suis très fier de la façon dont la collectivité prend soin des aînés, des familles et des parents seuls. » Un autre participant a expliqué qu'il avait fourni des équipement de protection individuel (EPI) et des paniers de nourriture à la collectivité, donnant accès à plus de nourriture pour que que les membres de la collectivité n'aient pas quitté leur domicile. « Nous avons tenté d’améliorer les programmes afin de garder les familles occupées et en sécurité, et d’offrir des tests de dépistage de la COVID-19 à quiconque vit sur le territoire. La collectivité s’est réunie; les gens font tout ce qu’ils peuvent. » 

L’état de préparation en cas de pandémie variait d’une collectivité à l’autre. De nombreux participants ont indiqué que les expériences de pandémies passées ont été une source de résilience dans leurs collectivités. Les collectivités autochtones ont tiré des leçons des pandémies antérieures (p. ex., H1N1, variole, SRAS-1, grippe espagnole). La résilience des peuples autochtones est une source de fierté et a été honorée par de nombreux participants. Le pouvoir de la résilience a mené à un leadership réussi dans les collectivités et les organisations autochtones. Le leadership a joué un rôle fondamental dans la délégation du financement et des services aux collectivités des Premières Nations, des Inuits et des Métis. Certaines organisations et collectivités ont été en mesure d’adapter des plans d’urgence préexistants afin de répondre à la pandémie de COVID-19.

Les participants ont indiqué que certaines collectivités ont dû se débrouiller sans soutien comme : l'approvisionnement stable en « équipement de protection individuelle » (EPI), la formation en gestion des urgences ou l'élaboration des plans de préparation détaillés pour une pandémie. Malgré le déblocage de fonds pour soutenir les collectivités en réponse à la COVID-19, bon nombre d'entre elles ont dû persévérer avec un soutien limité des gouvernements fédéral, provinciaux, territoriaux ou municipaux.

Il faut investir davantage dans la formation et la planification propres à la collectivité en matière de préparation aux pandémies et aux situations d’urgence et se consacrer davantage à celles-ci, en particulier pour les collectivités autochtones éloignées et rurales. Certains participants ont parlé de la réduction au fil des ans du financement sur lequel les collectivités autochtones comptent pour la planification de la santé publique, malgré la nécessité d’augmenter le financement pour combler cette lacune, ce qui comprendrait la planification en cas de pandémie et la préparation aux situations d’urgence.

Échange de connaissances

Certains participants ont fait remarquer que la COVID-19 a créé de « nouvelles et merveilleuses relations de travail en collaboration » avec différents secteurs qui n’avaient peut-être pas travaillé aussi étroitement auparavant. Cela comprend les collaborations entre des secteurs comme la santé et les services sociaux et le logement. Plusieurs participants ont fait remarquer que les collaborations entre les collectivités ont amélioré les plans d’intervention d’urgence en aidant les collectivités surchargées et sous-équipées. Pour certaines collectivités des Premières Nations, le travail collaboratif et efficace avec d’autres groupes ou organisations autochtones a favorisé des relations à long terme, qui se poursuivront probablement après la COVID-19.

Un participant des Premières Nations a fait remarquer que les chefs héréditaires et les structures de gouvernance traditionnelles sont disponibles pour le soutien et la consultation dans de nombreuses collectivités, mais ne participent pas , de leur point de vue , aux partenariats et les communications avec le gouvernement. La plupart des processus gouvernementaux impliquent une collaboration avec les conseils de bande élus et les organisations nationales. Les participants ont indiqué qu’il est nécessaire de mobiliser tous les membres de la collectivité et tous les ordres de gouvernance pour créer et mettre en œuvre des plans d’intervention d’urgence efficaces.

Les membres d’une collectivité des Premières Nations du Nord ont indiqué que leur collectivité était en mesure de collaborer efficacement avec les organismes gouvernementaux pertinents. Cela comprenait l’élaboration conjointe d’un plan d’action contre la COVID-19 pour gérer les éclosions et trouver les ressources nécessaires pour la collectivité. Une collectivité des Premières Nations a créé un nouveau poste de gestionnaire de projet responsable de la sensibilisation des autres collectivités afin d’avoir une idée des pratiques exemplaires pour l’élaboration de son plan d’intervention d’urgence. Il est important de souligner que ce ne sont pas toutes les collectivités qui ont les ressources et la capacité de soutenir un poste rémunéré comme celui-ci, comme certains participants l’ont souligné. Un participant a déclaré que toute collectivité qui a besoin de ressources pour appuyer des activités semblables devrait recevoir du soutien pour assurer l’élaboration et la mise en œuvre efficaces des plans d’intervention d’urgence.

Communications

De nombreux participants ont exprimé leur fierté à l’égard de la transition rapide de leur collectivité et de leurs dirigeants des plateformes en personne aux plateformes en ligne afin de maintenir des communications uniformes sur la santé. Les membres de la collectivité ont créé des brochures, des dépliants, des vidéos et d’autres contenus pour diffuser les messages de santé publique les plus à jour. Les produits de communication comprennent des livres intitulés « Skoden COVID » et « Surviving and Thriving ». Ces messages ont été traduits dans des langues autochtones, ce qui élimine les obstacles linguistiques et accroît l’accessibilité à l’éducation en santé publique pour les personnes qui ne parlent pas couramment l’anglais. Ces produits de communication adaptés à la culture sont nécessaires pour que tous les membres de la collectivité comprennent bien les messages de santé publique sur la COVID-19, qui pourrait en fin de compte réduire les taux d’infection par la COVID-19 selon certains participants.

Innovation et exécution des programmes

La COVID-19 a démontré la nécessité de remanier les programmes pour en assurer la durabilité pendant les crises, y compris les éclosions soudaines de maladies infectieuses et les changements dans les conditions environnementales. Les collectivités ont constaté que les mesures de confinement entraînaient de nouveaux défis, comme des responsabilités accrues pour fournir des services aux membres de la collectivité ayant des problèmes de santé et des difficultés concernant l’arrivée et la distribution d’EPI, de nourriture et d’autres fournitures. Les participants ont indiqué que bon nombre de leurs collectivités ont travaillé avec diligence pour veiller à ce que les clients subissent peu ou pas d’interruption dans l’accès aux programmes et aux services de santé. Les collectivités ont rapidement mis en œuvre des changements dans les programmes, comme la transition des programmes et des services vers des plateformes en ligne ou téléphoniques. Par exemple, dans le cadre de mesures de confinement, certaines collectivités ont établi un système de signalement que les ménages peuvent utiliser pour indiquer leurs besoins en levant un drapeau à l’extérieur du domicile d’une personne. Dans le cadre du programme, si un ménage arborait un drapeau bleu, il faisait savoir qu’il éprouvait une pénurie d’eau. Certaines collectivités ont mis sur pied des patrouilles locales qui se déplaçaient pour distribuer des biens et des services à ceux qui en avaient besoin. Dans d’autres collectivités, ce programme s’est poursuivi après la levée des mesures de confinement en raison de son succès.

La garde d’enfants, le développement des jeunes enfants et l’éducation sont des domaines que certaines collectivités examinent pour s’assurer que des changements durables sont mis en œuvre. Les participants des Premières Nations et des Métis se sont dits préoccupés par le coût des services de garde et des soins pour les enfants ayant des besoins spécialisés ou individualisés. Les participants ont fait savoir que, dans de nombreux cas, les membres de la collectivité ont utilisé des fonds de leur propre poche pour soutenir financièrement et fournir des services de garde d’enfants et des services pour les enfants ayant des besoins spéciaux pendant la pandémie de COVID-19, car ces services n’étaient pas couverts par le financement gouvernemental lié à la COVID-19. Les coûts supplémentaires que doivent assumer les collectivités pour financer ces services peuvent avoir une incidence sur leur capacité de fournir des services abordables aux membres de la collectivité au fur et à mesure que les collectivités remanient leurs budgets.

Certains participants ont parlé de la nécessité de créer des programmes durables au-delà de la COVID-19, car les membres de la collectivité continueront d’être touchés par les répercussions à long terme sur la santé. En particulier, les programmes et les services devront demeurer adaptés aux circonstances changeantes. Les participants ont déclaré que, même si les collectivités étaient généralement capables de s’adapter aux conséquences immédiates, les stratégies de mise en œuvre à long terme n’ont pas été discutées ou sont à l’étape préliminaire.

Infrastructure de santé publique

Certains participants des Premières Nations ont déclaré que le personnel de santé publique avait été déplacé ou redéployé dans d’autres régions en fonction des instructions reçues des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux. Cela a réduit la capacité des dirigeants communautaires d’élaborer efficacement des plans d’intervention en cas de pandémie au cours de la première vague de la pandémie. Un participant d’une collectivité éloignée des Premières Nations a souligné qu’il n’existe actuellement aucune structure de santé publique pour appuyer une intervention d’urgence en cas de pandémie dans sa collectivité. De nombreux participants de différentes collectivités ont indiqué que le manque chronique d’investissement financier dans les collectivités autochtones a limité la possibilité d’une structure de santé publique efficace dirigée par la collectivité et d’une intervention en cas de pandémie. De nombreuses collectivités et organisations sont « surchargées et manquent de ressources », ce qui a une incidence sur leur capacité de réagir adéquatement aux effets de la COVID-19. Il est essentiel que les organismes gouvernementaux investissent dans la planification en cas de pandémie dans les collectivités autochtones en intégrant une définition culturellement sûre de la santé en mettant l’accent sur les aspects physiques, mentaux, spirituels et émotionnels des membres de la collectivité.

Les autorités de la santé publique ont déterminé que l’équipement de protection individuelle était essentiel pour réduire le risque et la propagation de la COVID-19. Il a été difficile pour certaines collectivités d’obtenir de l’EPI de la part des autorités de la santé publique en raison de la confusion entourant la façon d’utiliser correctement l’EPI, de la localisation du personnel responsable de la distribution de l’EPI et du transfert de responsabilité à certains gouvernements provinciaux. Certains participants ont dit avoir eu de la difficulté à déterminer qui contacter ou où chercher l’EPI pendant la première vague. En milieu urbain, il était difficile pour certaines organisations autochtones d’accéder à l’EPI, car les gouvernements n’accordaient pas la priorité à la distribution à ces organisations et régions. Certaines collectivités des Premières Nations se sont approvisionnées en EPI à partir des États-Unis, et certaines collectivités métisses ont exprimé des difficultés d’accès, ce qui a obligé la collectivité à s’approvisionner en EPI en privé pour assurer l’accès aux membres de leur collectivité. L’accès aux trousses de dépistage de la COVID-19 a également été difficile pour certaines collectivités, bien que plusieurs aient réussi à organiser des tests locaux à domicile une fois les trousses de dépistage reçues.

Méfiance

La plupart des participants ont déclaré qu’aucun des ordres de gouvernement n’a tenu ses promesses et qu’ils ont tous fait fi des droits et libertés des peuples autochtones partout au Canada. Cela a donné lieu à une relation de profonde méfiance ressentie par de nombreux peuples autochtones à l’égard des gouvernements, des dirigeants politiques et des principaux acteurs politiques responsables des structures institutionnelles, y compris, sans s’y limiter, la santé, l’éducation, la justice et la politique. De nombreux participants ont déclaré que les organismes gouvernementaux doivent établir de véritables relations avec divers ordres de gouvernement au lieu de se limiter à des organisations de haut niveau (p. ex., Assemblée des Premières Nations, Inuit Tapiriit Kanatami, Ralliement national des Métis). La collaboration doit également inclure les collectivités autochtones locales et régionales et se produire au fil du temps afin d’établir des relations significatives entre les générations actuelles et futures.

Les participants se sont dits préoccupés par la question de savoir qui aura accès au contenu des appels. Ils se sont aussi demandé si et comment le partage de leurs expériences et de leurs points de vue allait vraiment changer la relation fragmentée qu’un grand nombre d’entre eux entretiennent avec divers ordres de gouvernement ainsi qu’avec les Canadiens ordinaires. Certaines organisations et collectivités autochtones ont indiqué qu’elles estiment que tous les ordres de gouvernement doivent établir des relations réciproques avec les peuples, les collectivités, les organisations et les nations autochtones, ce qui n’a pas été fait adéquatement par le passé. Cependant, certains participants ont fait remarquer que certaines relations, qui existent depuis peu, adoptent un esprit de réciprocité.

De plus, certains participants ont déclaré qu’il y a une méfiance au niveau communautaire à l’égard des représentants et des autorités du gouvernement pour ce qui est de l’application des lois ou des ordonnances de santé publique. Les participants ont signalé que le racisme systémique a également rendu les Autochtones réticents à accéder aux soins de santé ou à interagir avec la police, car ces entités sont souvent dirigées par des non-autochtones , qui ont précédemment et continuent de se comporter de manière à maltraiter et traumatiser les autochtones avant et pendant COVID-19. Les participants ont souligné qu’au cours de la première vague de la pandémie de COVID-19, plus de quatre Autochtones ont été tués dans des interventions policières (p. ex., vérifications du bien-être, contrôles routiers de routine, etc.) De nombreux participants ont déclaré que la COVID-19 a mis en lumière des cas de racisme systémique au Canada, ce qui explique la réticence des peuples autochtones à collaborer avec les autorités non autochtones.

Inégalités structurelles

De façon retentissante, les participants aux deux appels ont parlé des nombreuses inégalités structurelles qui ont nui et continuent de nuire au bien-être des collectivités autochtones, peu importe leur emplacement ou leur identité. Les niveaux d’emploi ont diminué dans les collectivités autochtones en raison de la COVID-19. Les participants ont indiqué que les répercussions de la pandémie de COVID-19 et les taux d’infection devraient être des problèmes permanents pour de nombreuses collectivités autochtones éloignées et isolées, même quand la pandémie sera considérée comme terminée pour de nombreuses régions urbaines et du sud du Canada. Les participants ont fait remarquer que de nombreux problèmes structurels, définis comme étant les institutions (p. ex. santé, éducation, justice, services de polices/correctionnels, finances, politiques, médias, services sociaux) et les droits (p. ex. Charte des droits et libertés, proclamation royale de 1763, Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et droits internationaux), qui font partie des sociétés canadiennes et mondiales, mais qui touchent simultanément les peuples, les familles, les collectivités, les nations et les organisations autochtones de façons différentes et avec une intensité différente. Quelques participants ont parlé du fait que les peuples autochtones du Canada sont considérés comme une population minoritaire et que, souvent, ils ne bénéficient pas des mêmes possibilités de contribution ou de collaboration ni d’occasions d’aider à mettre en œuvre des changements gouvernementaux qui réduiront ou élimineront la discrimination, le racisme ou les inégalités qui existent dans notre société.

Les questions soulevées par les participants et relevées dans les présentations supplémentaires (voir l’annexe A) sont très variées et ont fait l’objet de discussions tout au long du présent rapport. Une liste des problèmes particuliers soulevés est présentée ci-dessous. Afin d’éviter le dédoublement des discussions, certaines des problématiques sont abordées dans des sections distinctes du rapport et ne sont que brièvement abordées dans cette section. D’autres questions sont abordées en détail dans cette section, car elles ne sont pas abordées dans d’autres sections.

Inégalités structurelles soulevées par les participants :

  • Infrastructure et accès à Internet à large bande
  • Logements abordables et sécuritaires
  • Accès et disponibilité d’eau potable utilisable
  • Sécurité alimentaire et souveraineté
  • Intendance des terres et de l’environnement
  • Emploi, travail et participation au marché du travail
  • Services de santé, de soins de santé et de santé mentale
  • Matériel, fournitures et autres besoins
  • Transports
  • Financement et finances
  • Stéréotypes, discrimination, mythes et racisme
  • Relations (ou absence de relations) avec différents gouvernements
  • Manque de prise en considération dans les politiques et discrédit des visions du monde autochtones : valeurs, croyances, cérémonies, connaissances et liens de parenté

Internet

Comme la plupart des participants l’ont mentionné, la majorité de leurs programmes, services et communications, ainsi que les services d’emploi, d’éducation et de soins de santé, sont passés à des plateformes en ligne ou virtuelles en raison de la pandémie de la COVID-19.

De nombreuses collectivités éloignées et isolées des Premières Nations et des Inuits peuvent faire face à des obstacles pour accéder aux appels vidéo (p. ex., Zoom, MS Teams, etc.), car la bande passante est inadéquate pour répondre aux exigences élevées de la vidéo et de l’audio, surtout lorsque plusieurs utilisateurs utilisent le même réseau selon certains participants. Les enfants et les jeunes ne peuvent pas suivre des cours virtuels quand les ressources sont inaccessibles en raison de la langue (p. ex. pas dans une langue autochtone quand les cours en personne peuvent être donnés dans une langue autochtone) et parce que l’infrastructure internet n’est pas assez stable pour qu’on puisse s’appuyer sur un seul internet pour la collectivité.

Certains participants ont parlé des membres de la collectivité qui n’ont pas de téléphone cellulaire ou d’appareils capables de se connecter à Internet. Cela représente un défi pour l’accès aux ressources externes, à l’éducation, à l’emploi et aux services de santé. Quelques participants ont mentionné qu’aucun changement n’a été apporté à l’accès à Internet, tandis que la COVID-19 a mis en lumière le besoin criant de mettre à niveau la technologie Internet à large bande pour les collectivités des Premières Nations et inuites qui en dépendent fortement. Il est très important de veiller à ce que toutes les régions du Canada disposent d'un accès fiable à l'internet haut débit. Il est donc nécessaire d'augmenter les investissements pour améliorer l'infrastructure du réseau internet, afin de garantir un accès à l'internet à haut débit.

Logement

De nombreux participants ont indiqué que la COVID-19 a exacerbé les logements inadéquats, l’itinérance et l’accès à l’eau. Certains participants ont discuté des problèmes de surpeuplement, du sommeil à tour de rôle et du manque de logements disponibles. Plusieurs personnes sans domicile faisaient peut-être du « couchsurfing » avant la COVID-19, mais pour beaucoup, cette possibilité est maintenant restreinte, en raison du virus. La pandémie de la COVID-19 a entraîné une augmentation de l’itinérance et de l’incapacité de s’isoler selon l’endroit où vivent les membres de la collectivité. Ceux qui faisaient du « couch-surfing » avant la COVID-19 comptent maintenant sur les refuges en milieu urbain, tandis que certains Autochtones choisissent de vivre dans des villes de tentes plutôt que dans des refuges par crainte de contracter la COVID-19 dans l’établissement. De plus, les personnes forcées de quitter des collectivités nordiques ou éloignées à des fins médicales (p. ex., séjours à l’hôpital, accouchements, etc.) doivent demeurer dans un hôtel de quarantaine sans famille ni amis. Les aliments livrés en isolement ne sont pas ceux qu'ils mangeraient normalement et ces aliments ne sont pas nécessairement servis aux heures de repas habituelles.

Il y a aussi eu une augmentation du recours aux refuges pour sans-abri dans certaines collectivités inuites et éloignées. Certaines collectivités métisses rurales ont établi des centres d’isolement pour répondre aux besoins des refuges surpeuplés. Cependant, certains endroits dans le Nord n’ont pas suffisamment d’espace pour l’isolement, ce qui les oblige à utiliser des espaces existants, comme des écoles. Au début de l’année scolaire, ces places ne sont plus disponibles, et ce problème sera exacerbé pendant les mois plus froids. D’autres collectivités et foyers ont fermé leurs portes parce qu’ils craignaient la COVID-19, ce qui a eu une incidence sur les options qui s’offrent aux gens pour faire du « couch-surfing » ou trouver des repas selon certains participants urbains. Les mesures économiques ont entraîné une augmentation des coûts de rénovation, d’entretien et de construction, augmentant ainsi la probabilité que les maisons demeurent non sécuritaires en raison de la détérioration et des coûts d’atténuation. Pour ceux qui ne travaillent pas à domicile et / ou qui vivent dans un ménage surpeuplé, il peut être difficile de respecter les protocoles d’éloignement physique, comme l’ont fait remarquer quelques participants. Quelques participants ont discuté du surpeuplement et de la disponibilité inadéquate de logements qui peuvent aussi accroître le risque de COVID-19 pour une collectivité si une collectivité voisine est aux prises avec une éclosion parce que plusieurs membres d’un ménage sont incapables de maintenir un éloignement physique les uns avec les autres, au besoin, ce qui augmentera le risque et l’exposition à la COVID-19.

Absence de relations

Un certain nombre de participants ont parlé de la relation (ou de l’absence de relation) avec les gouvernements fédéral ou provincial/territorial et des moyens par lesquels les peuples autochtones continuent à être ignorés ou traités comme une simple minorité dans la société canadienne au lieu d’honorer les traités et accords conclus il y a des centaines d’années et qui sont toujours en vigueur . La COVID-19 continue d’illustrer que les gouvernements de tous les ordres doivent établir et maintenir ces relations pour s’attaquer aux problèmes et aux réalités de longue date des peuples, des familles et des collectivités autochtones. Depuis des décennies, les rapports remis au gouvernement fédéral ont démontré la nécessité pour le gouvernement d’établir et de maintenir des relations avec les groupes et les organisations autochtones pour corriger les problèmes soulevés dans cette section. Certains participants ont mentionné la Commission de vérité et réconciliation et d’autres rapports qui traitent de nombreux enjeux qui touchent encore les peuples autochtones. Les rapports antérieurs ont démontré la nécessité de renouveler les relations de réciprocité entre le gouvernement et les Autochtones, d’améliorer ces relations afin de remédier aux inégalités structurelles. Ces rapports incluent :

Eau

Le CGIPN a publié un document intitulé « RHS Statistics for Shaping a Response to COVID-19 in First Nations Communities » (2020) (en Anglais seulement) qui indique que 27,5 % des adultes des Premières nations ont signalé que leur principale source d’eau n’est pas potable toute l’année et qu’une hygiène et une désinfection appropriées sont devenues plus essentielles maintenant que la COVID-19 exige une fréquence élevée de lavage des mains, de lavage des vêtements et d’élimination des déchets. Les participants ont exprimé des préoccupations au sujet de la disponibilité de l’ eau potable, particulièrement à la lumière de la COVID-19 et du fait que de nombreuses collectivités sont encore sous le coup d’avis ou d’avertissements de faire bouillir l’eau et de ne pas la consommer. Le gouvernement fédéral ne leur donne guère de directives sur le moment où ce problème sera réglé.

Accès aux soins de santé

Dépistage

L’accès aux soins de santé est un élément fondamental du maintien et de l’atteinte d’une bonne santé pendant la pandémie de COVID-19. Certaines collectivités ont travaillé en partenariat avec leurs bureaux de santé publique locaux pour avoir accès à des trousses de dépistage. L’élaboration d’une approche communautaire pour le dépistage de la COVID-19 avec des sites situés dans la collectivité ou près des résidences des aînés était un enjeu clé pour les participants. Certaines collectivités ont effectué des tests de porte-à-porte afin de réduire les obstacles liés à la peur de quitter la maison ou d’infecter d’autres personnes. Certains participants des centres urbains ont parlé de cas où des personnes non autochtones ont eu accès à des tests dans des organisations autochtones, ce qui a augmenté les délais d'attente des résultats des tests, tout en réduisant le nombre d’Autochtones capables d’avoir accès aux tests. Certains Métis n’avaient tout simplement pas accès aux tests. Les collectivités ont aussi parlé de la nécessité d’avoir une main-d’œuvre spécialisée en santé publique plutôt que d’imposer ce fardeau aux travailleurs de la santé qui se concentrent déjà sur les soins actifs.

Disponibilité des médecins et des infirmières

Au plus fort de la pandémie, la disponibilité des postes de soins infirmiers et des médecins ont été grandement réduits. Par exemple, un programme d’infirmières accessibles par avion dans les collectivités éloignées a été interrompu pendant la COVID-19 et remplacé par des préposés aux services de soutien aux personnes et des soins virtuels fournis par des infirmières selon de nombreux participants de collectivités éloignées ou isolées. Il y a eu une transition rapide vers les soins virtuels, au lieu de la prestation de services de santé en personne, afin de limiter la propagation possible de la COVID-19 dans toutes les collectivités. À certains égards, cela a peut-être permis une plus grande souplesse dans la disponibilité des médecins et des infirmières, mais a aussi soulevé d’autres questions comme l’accès à un service Internet à large bande stable et à des appareils virtuels selon de nombreux participants des régions éloignées et isolées. Certains participants et certaines collectivités ont indiqué que la clé de leur gestion de la COVID-19 était une équipe de santé communautaire capable d’intégrer les connaissances culturelles et traditionnelles aux approches biomédicales. Une des Première-Nations a préconisé la construction d’un hôpital dans l’une des plus grandes communautés, ce qui est particulièrement important dans le contexte d’une deuxième vague de COVID-19. Cette nation a également signalé une baisse du financement pour vérifier le matériel médical, comme les appareils de mesure de la tension artérielle.

Accessibilité

Avant la pandémie de la COVID-19, de nombreux peuples autochtones ont été victimes de racisme et d’un manque de soins de santé adaptés à leur culture, comme l’ont exprimé les participants et les membres de l’équipe de recherche. Cela a amené les membres de la collectivité (qu’ils vivent en milieu urbain, rural, éloigné ou isolé) à être sceptiques quant à l’utilisation de la télémédecine, car cela pourrait mener à d’autres stéréotypes ou être mal interprété si les professionnels de la santé n’offraient pas des services adaptés à leur culture. De plus, certaines personnes n’ont peut-être pas d’espace privé pour faire un appel de télémédecine là où elles résident, alors il se peut qu’elles ne se sentent pas en sécurité de divulguer certains renseignements ou d’accéder aux soins de santé de cette façon. De nombreux travailleurs de la santé ont fait la transition vers les soins virtuels afin d’assurer leur sécurité et celle de leurs clients; toutefois, cela a soulevé des préoccupations au sujet de l’augmentation des coûts d’Internet et de l’incapacité des personnes de payer des frais plus élevés. Pour les Autochtones qui n’ont pas accès au téléphone ou à Internet, les travailleurs de la santé doivent leur rendre visite à la maison ou envoyer des taxis, afin de garantir l’accès aux soins de santé selon certains participants.

Racisme

Les peuples autochtones continuent de faire face à des stéréotypes raciaux, à la discrimination et à la violence lorsqu’ils accèdent aux services de santé. Les participants ont indiqué qu’en raison d’expériences passées de racisme systémique dans les soins de santé, certains membres des Premières Nations, Inuits et Métis se sentaient encore plus mal à l’aise d’avoir accès à des tests ou à des services de santé pendant la pandémie. Certaines organisations autochtones en milieu urbain ont utilisé des unités de dépistage mobiles qui ont aidé à atténuer cet obstacle, car l’administration du test se faisait d’une manière adaptée à la culture. Le racisme institutionnel et systémique dans les soins de santé et les professions paramédicales demeure l’un des plus grands problèmes pour de nombreux membres des Premières Nations, Inuits et Métis. Se référer à :

Certains participants ont parlé du racisme dans leur système de santé provincial et de leur réticence à interagir avec les professionnels de la santé.

Sécurité culturelle

De nombreux participants ont parlé des soins de santé et des interactions avec les professionnels de la santé. Certains participants des Premières Nations ont parlé d’être autorisés à adopter des pratiques traditionnelles, comme la purification par la fumée et les cérémonies du calumet. Les membres de la collectivité ont parlé du fait qu’on les a empêchés de participer aux pratiques funéraires traditionnelles dans les hôpitaux, ce qui a eu une incidence sur la capacité des familles et des collectivités à aller de l’avant dans leur processus de deuil. Cela, combiné au fait que les Autochtones sont souvent victimes de racisme lorsqu’ils ont accès aux soins de santé, peut avoir des répercussions importantes et durables sur la façon dont les personnes, les familles et les collectivités accèdent aux soins de santé et envisagent interagir avec les établissements de soins de santé.

Financement

Considérations relatives au financement

Plusieurs participants ont discuté de la façon dont le financement est structuré pour être fourni à la majorité (la société dominante), les peuples autochtones recevant la minorité des programmes, des services et du financement, puisqu’ils sont réputés être une population minoritaire. Les communautés et les organisations autochtones sont sous-financées depuis longtemps. Au cours de la première vague de la pandémie de COVID-19, le sous-financement est devenu beaucoup plus prononcé selon les participants. Certaines collectivités du Nord ont indiqué avoir reçu des ressources au printemps 2020, mais que la disponibilité du financement depuis juin a été moins bonne, ce qui a entraîné une interruption des services offerts par les collectivités du Nord en raison de ce manque de financement. Des participants ont déclaré que les Premières Nations ont indiqué qu’il y a toujours un manque de financement pour les services de soutien de la santé mentale des personnes, des traumatismes et des mécanismes d’adaptation sains.

En réaction aux lacunes dans le financement disponible, de nombreuses organisations et collectivités autochtones ont tenté de répondre au besoin en utilisant leurs propres sources de revenus. Certains participants ont dit qu’une conséquence à long terme de cette situation pourrait être une incidence sur leur prestation régulière de services, et, en fin de compte, les collectivités et les organisations ne devraient pas avoir à faire autant d’efforts pour combler ces lacunes en matière de financement.

Les participants ont parlé de la façon dont le financement a été affecté aux services fournis dans les réserves, même si la majorité des Autochtones (en particulier les Métis et les Premières Nations) vivent hors réserve ou à l’intérieur ou à proximité des zones urbaines. Les participants ont soulevé des préoccupations au sujet du financement restreint qui a empêché les collectivités dans les réserves de fournir leurs services à ceux qui vivent hors réserve. Un participant a mentionné que dans sa région urbaine, entre 85 % et 95 % de la population autochtone locale vit hors réserve et qu’en raison des limites de financement imposées, les organisations communautaires sur les réserves n’ont pas été en mesure de fournir les services requis aux membres de leur famille et à leurs parents qui n’habitaient pas sur la réserve.

Relation avec les gouvernements

Collaboration efficace

De nombreux membres de la collectivité ont indiqué que leur expérience de la COVID-19 jusqu’à maintenant leur a permis d’établir des relations plus solides avec les organismes gouvernementaux dans un contexte où les compétences fédérales, provinciales, territoriales, régionales et locales se chevauchent souvent. Par le passé, de nombreuses approches de santé publique ont été imposées d’en haut et n’ont permis aux collectivités que de réagir de façon réactive. Maintenant, certaines collectivités ont déterminé que leurs services locaux de santé publique et leurs structures gouvernementales ont choisi de travailler en collaboration avec les membres des collectivités autochtones.

En veillant à ce que les voies de communication demeurent ouvertes entre les structures gouvernementales et les collectivités autochtones, on a créé des plans de lutte contre la pandémie plus efficaces et plus durables, ce qui démontre l’importance de la collaboration, de l’établissement de relations et de la réciprocité. La nécessité d’une communication claire entre l’autorité gouvernementale et les collectivités a également été soulignée par les participants au sujet des collectivités inuites rurales. Certaines collectivités rurales des Premières Nations ont pu rencontrer chaque semaine le maire de leur localité et d’autres dirigeants. Dans les collectivités des Premières Nations du Nord, l’équipe d’intervention régionale relative à la COVID-19 a veillé à ce que les collectivités disposent du matériel éducatif nécessaire pour faire des choix sécuritaires et éclairés pendant la pandémie. Une des Première-Nations a déterminé que le transfert de la responsabilité du suivi des contacts à la Régie de la santé des Premières Nations de Sioux Lookout a été une grande réussite pour elle. La Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits (DGSPNI) de Services aux Autochtones Canada a commencé à fournir des rapports hebdomadaires sur la répartition des fournitures d’EPI allouées et distribuées à chaque collectivité.

Lacunes dans la collaboration

Les membres de la collectivité se sont dits préoccupés par le fait que, malgré la mobilisation sur de nombreux sujets, il y a encore des domaines où les collectivités autochtones ne sont pas représentées pendant les discussions et les décisions clés. Un exemple partagé par un participant au cours de la discussion du 10 août concernait les réunions portant sur les essais du vaccin contre la COVID-19. Il est impératif que les représentants autochtones participent à tous les niveaux du processus décisionnel pour s’assurer qu’on réponde aux besoins des peuples autochtones. Un participant a parlé d’une lacune existante dans les mesures d’urgence, car les accords de gouvernance créés par le gouvernement du Yukon avaient été élaborés avant les accords entre les collectivités et le gouvernement territorial. Les questions qui touchent les Autochtones, comme les obstacles à la technologie, l’insécurité alimentaire et les infrastructures inadéquates, peuvent ne pas être comprises ou prises en considération par les décideurs. Les participants d’une même salle de réunion étaient d’avis qu’il est contraire à l’éthique de prendre des décisions au nom des collectivités autochtones sans une représentation et une inclusion appropriées des Autochtones.

Terres

Le lien avec la terre est au cœur de nombreuses personnes et collectivités autochtones. Comme il a été mentionné précédemment, certaines collectivités autochtones et certains gouvernements territoriaux ont aidé les membres des collectivités à passer plus de temps sur le territoire au début de la pandémie de COVID-19. La présence sur les terres ancestrales a permis aux peuples autochtones de renouer avec les traditions et les façons de savoir qui ont peut-être été mises de côté pendant les périodes plus occupées, car beaucoup ne travaillaient pas ou travaillaient moins d’heures en raison de la pandémie. Les activités sur les terres comprennent la chasse et le travail sur les terres, ainsi que la recherche de nourriture et le partage avec les membres de la collectivité. Le fait d’être avec et sur le territoire a été considéré comme une expérience positive de la COVID-19 : « Nous devions être moins dépendants des ressources externes. Nous devons nous assurer d’avoir un approvisionnement en riz sauvage et en viande. Nous devons cultiver nos propres fruits et légumes et avoir nos propres marchés alimentaires. »

Certains participants ont parlé de la façon dont les sociétés minières et d’extraction ont utilisé la COVID-19 comme « laissez-passer » pour aller de l’avant avec des projets que les peuples et les collectivités autochtones avaient contestés (p. ex., gazoduc Coastal GasLink sur le territoire des Wet’suwet’en et le projet de complexe d’habitation sur la réserve indienne des Six Nations). Le gouvernement fédéral a annoncé des changements importants aux obligations environnementales pendant la pandémie de COVID-19, ce qui a mené à des projets d’exploitation minière, de fracturation hydraulique et de déforestation qui vont de l’avant avec des obligations environnementales beaucoup moins rigoureuses. L’assouplissement de la Loi sur la protection de l’environnement pour permettre les projets d’exploitation minière, de fracturation hydraulique et de déforestation a des répercussions importantes sur les peuples, les familles et les collectivités des Premières Nations, des Inuits et des Métis. Ce travail se fait souvent dans les collectivités autochtones ou à proximité, comme mentionné par certains participants.

Cérémonie

Une des forces des peuples et des communautés autochtones a toujours été dans leurs façons de connaître la terre et d’être avec elle, et cela s’est poursuivi de façon modifiée pendant la pandémie de COVID-19. Un participant d’une collectivité éloignée des Premières Nations a dit qu’au plus fort de la pandémie de COVID-19, sa communauté a allumé un feu sacré d’avril à juin afin de donner une force spirituelle à la communauté. Les communautés ont également constaté un taux élevé d’inscription aux programmes culturels, qui sont en grande partie offerts en ligne. Les centres culturels de certaines collectivités ont été en mesure de fournir des médicaments et de poursuivre leurs activités en invitant les aînés à tenir des cérémonies du lever du soleil, des prières du matin, à allumer des feux sacrés, à utiliser des remèdes traditionnels et à soulever des tuyaux. Ces pratiques spirituelles étaient accessibles en ligne sur des plateformes de diffusion en direct et d’appel vidéo comme Facebook. Les participants ont parlé des moyens par lesquels les Aînés, les dirigeants et les membres des collectivités prenaient des décisions sur la façon de tenir des cérémonies en toute sécurité. En fin de compte, la force par la prière a permis aux membres des collectivités de se sentir unis.

Quelques participants ont parlé de la façon dont certaines collectivités ont été touchées par les interdictions provinciales de faire des feux, ce qui est lié au besoin de respecter la souveraineté des Autochtones et constitue un non-respect des droits et libertés des Autochtones garantis par la Charte, car le fait de limiter le droit des personnes de faire des feux peut, en retour, être perçu comme une limitation de la capacité des peuples autochtones à tenir des cérémonies. Dans certains cas, les messages de santé publique exhortaient également les gens à cesser de participer à des cérémonies, comme les huttes de sudation, en raison de l’incertitude quant au mode de transmission du virus qui cause la COVID-19. Le ministre des Services aux Autochtones, Marc Miller, a indiqué que le Canada n’interdira pas aux peuples autochtones d’avoir accès à des cérémonies et d’y participer. Toutefois, certaines collectivités subissent l’intervention de la police lorsqu’elles tiennent des cérémonies (2020) dans les réserves, même si elles ont la permission des dirigeants autochtones locaux et respectent les protocoles de santé publique approuvés par la collectivité. Les participants aux téléconférences du 10 août et du 2 septembre ont dit que la prière à leur façon et la possibilité de se connecter à la terre et de tenir des cérémonies ont été très limitées et difficiles pendant la première vague de la pandémie.

Violence familiale

Certains participants ont parlé de la façon dont l’éloignement physique et les ordonnances de rester à la maison pour réduire la propagation de la COVID-19, peuvent accroître le risque de violence pour plusieurs personnes. La fermeture des écoles, les programmes sociaux et l’incapacité des personnes de quitter leur maison ont fait en sorte que des enfants, des adultes et des aînés vivent dans la promiscuité. Des participants ont expliqué que cela exacerbe les effets négatifs sur la santé mentale et peut causer des situations physiques et émotionnelles malsaines. En fait, le surpeuplement des logements fait partie des facteurs de risque liés à la violence familiale (Moffitt, 2013) et à la violence sexuelle contre les enfants (O Afifi, 2015). Pour atténuer les effets négatifs du confinement et de l’isolement sur la violence familiale, une participante a souligné que plusieurs collectivités ont ouvert des refuges pour les femmes et les enfants pendant la COVID-19 afin d’assurer leur sécurité. Cette approche s’applique également à l’ensemble de la collectivité où un plan de sécurité a été examiné afin que les personnes comprennent les circonstances entourant les personnes impliquées dans des situations de violence familiale. Cependant, certains endroits n’ont pas un nombre suffisant de refuges, de centres d’aide et de maisons sécuritaires. Par exemple, dans l’Inuit Nunangat, il n’y a que quinze installations de ce genre pour desservir cinquante et une collectivités inuites isolées et accessibles par avion.

Communication

Connexion virtuelle

Des situations de confinement ont amené les collectivités à utiliser des moyens créatifs pour mobiliser les membres de la collectivité, comme une collectivité des Premières Nations qui a désigné une camionnette pour se déplacer dans la collectivité et jouer de la musique afin d’encourager la danse et l’exercice. D’autres ont utilisé les médias sociaux pour transmettre des messages de sécurité comme « gardez une longueur d’orignal entre vous! » Plusieurs peuples autochtones, collectivités, aînés et organisations ont utilisé les médias sociaux ou les plateformes virtuelles (p. ex., Zoom, YouTube, TikTok, Instagram, Facebook) pour transmettre des connaissances culturelles ou pour passer des messages rapidement et efficacement.

Les Aînés et les gardiens du savoir de la collectivité se sont joints aux communautés virtuelles et en ligne pour veiller à ce que les façons de savoir et d’être soient transmises pendant la pandémie. Par exemple, les membres des collectivités établissent des liens spirituels en observant les prières du matin ou les appels au tambour virtuellement pour maintenir le moral. Les programmes de groupe partageaient les connaissances culturelles en demandant aux membres de la collectivité de partager leur propre histoire ou en ouvrant des messages de discussion pour discuter de la façon de protéger les Aînés et les enfants. Les cuisines virtuelles étaient une activité communautaire visant à promouvoir les liens familiaux et une saine alimentation.

Messages de santé publique

Selon quelques participants et dans le cadre de présentations, il est également important que les messages de santé publique soient reçus par les collectivités pour être distribués à leurs membres. Cela renforce la confiance entre les gens et les autorités gouvernementales. Il s’agit de mises à jour régulières de l’administration et des médias sociaux.

Bien que les messages de santé publique doivent être adaptés aux contextes et aux régions géographiques particuliers des collectivités, ils doivent également être cohérents sur le plan de l’information sur la santé et des directives données au public afin d’éviter la désinformation et la confusion dont il a été question dans une salle de repos. On discute des différents niveaux des messages sur la santé publique et du manque d’uniformité qui semble exister entre le gouvernement fédéral, les provinces, les territoires et les administrations régionales et municipales, ainsi que de la façon dont cette information est ensuite transmise aux Autochtones. Les participants comprenaient que l’information changeait, mais ils estimaient qu’il fallait une plus grande collaboration entre les différents professionnels de la santé publique pour veiller à ce que les messages soient cohérents à tous les niveaux. Certaines collectivités des Premières Nations du Nord ont réussi en mettant l’accent sur leurs relations avec d’autres collectivités qu’elles desservent avec la base de contact hebdomadaire. Certains participants ont parlé de la façon dont les messages ont changé en quelques heures, ce qui fait qu’il est difficile de communiquer un message clair et d’adapter les programmes pour soutenir les mesures actuelles de santé publique. De plus, l’ensemble des données des gouvernements contenaient des termes et des renseignements qui nécessitaient une grande quantité de ressources à interpréter. Il pourrait être utile d’inclure de l’information en anglais simplifié qui permettrait à une plus grande population de comprendre l’information scientifique et les précautions, comme demandé par quelques participants et dans quelques-unes des présentations.

Données

La collecte de données fondées sur la race commence dans de nombreuses administrations au Canada, tandis que certaines administrations continuent de ne pas recueillir cette information. Toutes les données recueillies, y compris pour répondre à la pandémie de la COVID-19, devraient respecter les principes de PCAP (propriété, contrôle, accès et possession) élaborés avec le Centre de gouvernance de l’information des Premières Nations (concernant les peuples des Premières Nations) et les principes de recherche de l’Inuit Tapiriit Kanatami (ITK) concernant les pratiques de recherche des Inuits. Les participants ont déclaré que, dans les petites collectivités, il peut y avoir des problèmes de confidentialité. Obed, le président d’ITK, a rencontré la Dr Tam et il a fait part des priorités et des préoccupations des Inuits au sujet de la collecte de données sur la santé publique propres aux Inuits au Canada (D. Van Dyk, communication personnelle 10/19/20). Le dépistage et le traçage des contacts fourniraient également des données, mais cela a été différent selon la collectivité ou la région. Par exemple, les membres de la collectivité ont parlé du manque d’uniformité dans la collecte de données par la santé publique. De plus, les dirigeants autochtones n’ont pas eu accès aux données sur les cas désagrégés par collectivité/Première Nation, selon certaines présentations et certains participants. Cela a eu une incidence sur la capacité des collectivités et des organisations de se préparer adéquatement à lutter contre la propagation de la COVID-19 dans leurs collectivités, ainsi que sur les difficultés liées à la désignation des quantités d’EPI.

La voie à suivre

Les participants ont fourni certaines orientations et certains défis auxquels ils ont été confrontés pendant la COVID-19. Cette section est fondée sur les discussions des participants et l’analyse de tous les documents fournis (discussions et présentations). Notre équipe de recherche a examiné et analysé ces informations afin de fournir cette section : La voie à suivre.

  1. Le gouvernement fédéral doit s’engager à mobiliser véritablement les peuples, les collectivités et les organisations autochtones dans les régions urbaines, rurales, éloignées et isolées du Canada. Dans le cadre des discussions et de la stratégie de mobilisation des Autochtones pour ce rapport, il est évident que le gouvernement fédéral devrait établir des relations réciproques et de longue durée pour la mobilisation des collectivités. Les participants ont souligné que les collectivités et les organisations des Premières Nations, des Inuits et des Métis peuvent avoir des relations existantes avec différents ministères ou organismes fédéraux, et qu’il serait avantageux de tirer parti de ces relations de façon authentique et réciproque.
  2. Grâce à la coordination et à la participation des peuples, des collectivités et des organisations des Premières Nations, des Inuits et des Métis à ce rapport, il est évident que les peuples autochtones sont souvent perçus et mobilisés comme un groupe homogène, alors qu’il y a en fait de nombreuses cultures, langues, valeurs et croyances différentes entre les groupes. L’engagement futur et l’établissement de relations devraient être fondés sur des distinctions, à traversla mobilisation et la consultation de nombreuses collectivités et organisations des Premières Nations, des Inuits et des Métis afin de vraiment refléter la voix des collectivités.
  3. Les définitions de collectivités rurales, éloignées, isolées et urbaines ne sont pas disponibles auprès d’un ministère ou d’un organisme du gouvernement fédéral. Ces définitions peuvent différer des définitions provinciales et territoriales. Afin de s’assurer que toutes les personnes concernées utilisent les mêmes définitions, il est important d’avoir des définitions claires et transparentes des collectivités autochtones rurales, éloignées, isolées et urbaines, il est recommandé que le gouvernement fédéral travaille en collaboration avec les peuples, les collectivités et les organisations autochtones afin d’élaborer des définitions pour des travaux futurs comme la planification en cas de pandémie, le financement et le perfectionnement des ressources.
  4. Comme recommandé dans le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones (CRPA) et dans d’autres rapports commandés ou fournis au gouvernement fédéral, les besoins en matière de financement, de ressources et de programmes doivent être holistiques et doivent constituer une approche de continuité des services qui appuie les façons d’être et de savoir des Autochtones. Le financement, les ressources et les programmes doivent répondre aux besoins des personnes, des familles et des collectivités sur les plans physique, mental, spirituel et émotionnel (voir le chapitre 3 du volume 3 du rapport de la CRPA [1996] qui contient de nombreuses recommandations).
  5. Les communications et les messages de santé publique ont changé à mesure que la COVID-19 a évolué. Les participants ont constaté que les changements apportés aux messages sont lents à atteindre toutes les collectivités autochtones et tiennent compte des répercussions culturelles, linguistiques et sociales. Il est recommandé que l’Agence de la santé publique du Canada garde les voies de communication ouvertes et veille à ce que les voix des Premières Nations, des Inuits et des Métis et leur connaissance des enjeux qui se présentent dans les collectivités et les organisations soient prises en considération et aident à éclairer les réponses et les communications du gouvernement.
  6. Les participants ont abordé la nécessité d’avoir des stratégies fiables, opportunes et fondées sur des données probantes pour le dépistage de la COVID-19, en particulier dans les collectivités éloignées et isolées. Les tests doivent refléter les réalités des collectivités et des organisations des Premières Nations, des Inuits et des Métis, car il y a des différences importantes dans l’accès aux tests à ce stade.
  7. Il est nécessaire d’avoir des statistiques propres aux Autochtones qui sont détenues et contrôlées par les collectivités ou les organisations autochtones. Dans le cadre d’une collaboration et de relations authentiques, il est important que le gouvernement fédéral s’engage et discute de méthodes qui sont conformes à la propriété et au contrôle autochtones de l’information et des statistiques. Les données recueillies en fonction de l’identité, du sexe et de l’incapacité des Autochtones afin d’améliorer les connaissances fondées sur des données probantes qui ont une incidence sur le financement, les ressources, les politiques et les besoins doivent refléter les groupes, les collectivités et les organisations autochtones qu’elles sont censées aider. Cela ne peut se produire que si les Premières Nations, les Inuits et les Métis participent aux discussions.
  8. Les participants étaient frustrés par le manque de représentation des Premières Nations, des Inuits et des Métis dans les espaces décisionnels en santé publique. À l’avenir, l’Agence de la santé publique du Canada devrait prévoir du temps et de l’espace pour une véritable participation des représentants autochtones dans leurs espaces et leurs tables de prise de décisions.
  9. Pour de nombreuses collectivités éloignées et isolées des Premières nations et des Inuits, les personnes qui ont besoin de services de diagnostic ou de soins de santé spécialisés doivent quitter la collectivité et être amenées à des services dans le sud du Canada. Comme l’ont recommandé la CRPA et le rapport Romanow, il est nécessaire de développer les ressources humaines en santé et les soins virtuels comme exigence des services de santé, surtout pendant une pandémie quand les gens sont transportés par avion hors de leur collectivité pour avoir accès aux services et risquent de contracter la COVID-19. Les participants ont recommandé que des hôpitaux ou des cliniques de santé offrant de nombreux services spécialisés soient construits dans le Nord afin d’améliorer l’accès aux soins de santé et d’en assurer le contrôle par les Autochtones.
  10. De nombreux participants ont fait remarquer que les programmes de santé publique autochtone sont sous-financés. Au cours de la pandémie de la COVID-19, de nombreux participants ont fait remarquer que leurs collectivités ou organisations devaient se transformer et prendre des décisions rapides menant à des changements dans les services. À l’avenir, le financement de la santé publique autochtone doit être augmenté.
  11. Les plans de lutte contre la pandémie pour les collectivités inuites et des Premières Nations ont fait ressortir la nécessité de tenir compte des problèmes préexistants en matière de violence familiale, de logement, d’eau et de protection de l’enfance et de les inclure dans les plans futurs. Les plans de lutte contre la pandémie mis à jour doivent également tenir compte des restrictions et des confinements dans les collectivités autochtones, qui n’ont pas nécessairement été intégrés aux plans de lutte contre les pandémies antérieures. De plus, comme les messages de santé publique recommandent de se laver fréquemment les mains, de s’isoler à la maison et d’avoir suffisamment de nourriture et de fournitures à la maison pour les confinements, les participants ont fait remarquer que ce n’était pas possible pour bon nombre de leurs collectivités ou de leurs peuples. À l’avenir, le gouvernement fédéral doit réexaminer les échéanciers pour l’amélioration de l’accès à l’eau, l’amélioration et l’augmentation des logements adéquats, ainsi que le financement pour le bien-être des enfants autochtones.
  12. Les collectivités et les organisations des Premières Nations, des Inuits et des Métis disposent d’un continuum de capacités pour présenter des demandes et offrir des programmes et des services. En raison de la COVID-19, de nombreuses collectivités autochtones ont dû réaffecter du personnel à des programmes et à des services essentiels pour assurer leur sécurité. Le financement relatif à la COVID-19 pour les collectivités des Premières Nations et des Inuits a été annoncé le 9 avril 2020 (longue fin de semaine de Pâques) et la date d’échéance de la proposition est le 13 avril 2020. Un modèle fondé sur des propositions dans des délais serrés crée un environnement concurrentiel pour accéder au financement et récompense ceux qui ont une plus grande capacité de gérer et de répondre rapidement à de telles demandes. Les participants ont recommandé que le financement en cas d’urgence ou de pandémie soit fondé sur les besoins, comme les autres programmes de subventions offerts aux villes et aux entreprises non autochtones.
  13. Les gouvernements doivent appliquer une optique intersectionnelle d’analyse comparative entre les sexes plus (ACS+) à la planification en cas de pandémie et aux situations d’urgence. Il est également nécessaire de comprendre comment le racisme systémique continue d’affecter les peuples autochtones. Pendant les confinements liés à la COVID-19, les participants ont souligné qu’une perspective du genre aiderait grandement à protéger les femmes autochtones qui pourraient être victimes de violence familiale.
  14. Des fonds ont été accordés aux employeurs et aux entreprises pour les aider à relancer l’économie partout au Canada. Les Premières Nations, les Inuits et les Métis auront besoin d’un plan à long terme pour faire face aux conséquences économiques des confinements, des fermetures et des changements liés aux entreprises. Les participants recommandent que du financement soit établi pour aider les collectivités, les organisations et les entreprises autochtones tout au long de la COVID-19 et après son rétablissement.
  15. La COVID-19 a pleinement exposé les inégalités structurelles vécues par les peuples autochtones lorsqu’ils interagissent avec des institutions et des organisations comme les soins de santé. Il y a eu des incidents hautement médiatisés de racisme contre les peuples autochtones quand ils interagissent avec des professionnels de la santé. Pour vraiment changer les inégalités structurelles, il est nécessaire que tous les fonctionnaires des gouvernements fédéral, provinciaux, territoriaux et municipaux suivent une formation obligatoire sur la sécurité culturelle et que l’évaluation du rendement soit intégrée à l’examen annuel du rendement des employés. En examinant la façon dont les gens intègrent la sécurité culturelle dans leur travail de tous les jours, ils aideront à établir des relations authentiques, à prendre conscience de leur pouvoir, de leurs privilèges et de leur position. Cette pourrait être considérée comme une action vers la vérité et la réconciliation.

Sécurité culturelle

Fondée sur la section précédente, plus précisément la recommandation #15, cette section donne un aperçu du continuum de la sécurité culturelle et de l’importance d’avoir conscience du pouvoir, du privilège et de la position d’une personne dans tous les aspects de sa vie. Nombre d’organismes et d’organisations gouvernementaux cherchent à établir des relations significatives avec les communautés autochtones, et cela ne peut se faire sans tenir compte des enseignements tirés du continuum de la sécurité culturelle et de les mettre en œuvre.

Baba (2013) a mené une analyse de l’environnement de la sécurité culturelle qui illustre le processus par lequel les gens passent de la sensibilisation culturelle à la sensibilité culturelle, au savoir-faire culturel et, enfin, à la sécurité culturelle. La sensibilisation à la culture, c’est être conscient qu’il y a des différences entre les groupes culturels (Baba, 2013). La sensibilité culturelle, c’est comprendre et respecter les différences culturelles (Baba, 2013). La compétence culturelle va au-delà de la compréhension et du respect de la différence pour reconnaître sa propre culture en acquérant des « habiletés et comportements qui aident » à travailler d’une manière interculturelle (Baba, 2013; p. 7). La sécurité culturelle a de nombreuses définitions, mais elle exige qu’une personne examine son pouvoir, son privilège et sa position tout en « tenant compte des contextes sociaux, politiques et historiques » du « racisme, de la discrimination et des préjugés » (Baba, 2013; p. 7). Un aspect clé de la sécurité culturelle est l’autodétermination de la sécurité culturelle par les bénéficiaires de soins. Bien que la sécurité culturelle puisse être inconfortable, il est nécessaire que tout le monde s’engage dans ce domaine d’actions culturellement sûres afin de réduire les inégalités physiques, émotionnelles, spirituelles, mentales, sociales, politiques et financières.

Figure 1
Figure 1. La version textuelle suit.
Figure 1 - Équivalent textuel

La figure 1 illustre comment un individu peut passer de la conscience culturelle à la sensibilité culturelle, à la compétence culturelle et, enfin, à la sécurité culturelle. La conscience culturelle consiste à être attentif aux différences ; la sensibilité culturelle vise à comprendre et à respecter les différences culturelles ; la compétence culturelle consiste à reconnaître sa propre culture et à acquérir des compétences pour travailler de manière interculturelle ; et la sécurité culturelle consiste à examiner les privilèges tout en tenant compte des contextes historiques, sociaux et politiques de racisme, de discrimination et de préjugés. Il existe des possibilités de formation à la sécurité culturelle en ligne et en présentiel que les personnes et organisations non autochtones peuvent suivre conformément aux appels à l'action de la Commission Vérité et Réconciliation (2015). Afin d'établir des relations avec les peuples, les organisations, les communautés et les dirigeants autochtones, il est recommandé que tous les fonctionnaires des gouvernements fédéral, provinciaux, territoriaux et municipaux suivent une formation sur la sécurité culturelle afin de prendre conscience de leur identité et d'être mieux en mesure de travailler en collaboration avec les peuples autochtones

Réferences

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Annexes

Annexe A : soumissions de la communauté

  • Arctic Indigenous Wellness Foundation – 1 page
  • The Union of B.C. Indian Chiefs Impacts of COVID-19 on Indigenous Peoples - 10 pages (listed as BC First Nation COVID19 Impacts)
  • Nishnawbe Aski Nation Briefing Note – 4 pages (listed as Briefing Note-PHAC Submission – COVID-19)
  • Arctic Council – 83 pages (listed as COVID-19-in-the-Arctic-Briefing-to-SAOs_For-Public-Release)
  • Cowichan Tribes Impacts of COVID-19: Input into the Chief Public Health Officer’s Annual Report– 14 pages (listed as Cowichan Tribes Submission)
  • North American Observatory Preliminary Draft North American COVID-19 Policy Response Monitor: Indigenous Communities across Northern Canada – 13 pages (listed as Draft_COVID19 in Northern Canada)
  • FNIGC RHS Statistics for Shaping a Response to COVID-19 in First Nations Communities – 20 pages (listed as FNIGC RHS COVID-19 Report1)
  • Inuit Tapiriit Kanatami The Potential Impacts of COVID-19 on Inuit Nunangat – 15 pages (Listed as Impacts of COVID19 on Inuit)
  • International Centre for Indigenous Education and Wellness: National Elders of Turtle Lodge Make Statement about Ceremony – 5 pages (Listed as Turtle Lodge Ceremony)
  • Yellowhead Institute (Gina Starblanket & Dallas Hunt): COVID-19, The Numbered Treaties & The Politics of Life – 21 pages (Listed as yi-special-report-covid19-and-treaties)
  • Sioux Lookout First Nations Health Authority – numerous attachments

Annexe B : sites web communautaires

  • Cree Board of Health and Social Services of James Bay. (n.d.). COVID-19 (Coronavirus). Retrieved from: https://eeyouistcheecovid19.org/
  • Nishnawbe Aski Nation. (n.d.). Updates: COVID-19. Retrieved from: http://www.nan.on.ca/covid19
  • Six Nations of the Grand River. (n.d.). COVID-19 Information Centre. Retrieved from: https://www.sixnationscovid19.ca/
  • Morning Star Lodge. (n.d.) Blog. http://www.indigenoushealthlab.com/blog

Annexe C: communication pour les sessions d'engagement communautaire

Agenda - Répercussions de la COVID-19 : contribution au rapport annuel de l’administratrice en chef de la santé publique

Lundi, 10 août, 2020 / 1h30 à 16h (heure avancée de l’Est))

Horaire
  • Mot de bienvenue et questions d’ordre administratif ( 13h30 à 13h35)
    Prise de parole: Christine Maika
  • Prière d’ouverture et enseignement culturel(13h35 à 13h45)
    Prise de parole: Aînée Claudette Commanda
  • Présentation de l’administratrice en chef de la santé publique (13h45 à 13h50)
    Prise de parole: Dre Carrie Bourassa
  • Préparer le terrain : le rapport 2020 de l’administratrice en chef de la santé publique (13h50 à 14h15)
    La Dre Tam orientera les participants sur la nature du rapport annuel et les objectifs de la réunion d’aujourd’hui, et elle donnera un aperçu du rapport annuel de 2020.
  • Pause (14:15 à 14:20)
    Veuillez ne pas fermer votre réunion Zoom.
  • Renforcer les déterminants structuraux de la santé après la COVID-19 (14h20 à 14h50)
    Dre Greenwood discutera des répercussions de la COVID-19 sur les peuples autochtones
    Prise de parole: Dre Greenwood
  • Discussion (14h50 à 15h45)
    Dre Bourassa animera une conversation sur les répercussions que les collectivités autochtones subissent pendant la pandémie de COVID-19 ainsi que leurs points de vue sur celle-ci.
    Prise de parole : Tous , Animation : Dre Carrie Bourassa
    Questions de discussion
    • Qu’est-ce qui vous rend fier lorsque vous pensez à la réponse de votre collectivité face à la pandémie de COVID-19 (ou de la collectivité que vous servez) ?
    • Qu’est-ce qui vous a aidé, vous et votre collectivité (ou la collectivité que vous servez) à rester forts pendant la réponse à la pandémie de COVID-19?
    • Quels changements (grands ou petits) apportés en réponse à la COVID-19 pourraient ou devraient être adoptés par d’autres collectivités?
  • Réflexions et conclusion (15h45 à 16h)
    Prise de parole: Dre Theresa Tam/Christine Maika, Aînée Claudette Commanda

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