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S’unir pour protéger et promouvoir le tourisme autochtone authentique

Lors du Congrès international du tourisme autochtone, à Ottawa, il a notamment été question de l'appropriation culturelle vécue par différentes communautés autochtones dans le monde. Il a également été rappelé que, contrairement aux États-Unis, le Canada ne dispose pas de loi interdisant la vente d'objets faussement présentés comme autochtones.

Cinq personnes sur une scène dans une grande salle.

Les dirigeants de l'Association touristique autochtone du Canada, du New Zealand Māori Tourism et de l'American Indian Alaska Native Tourism Association ont annoncé la création de Destination Original Indigenous Tourism.

Photo : Association touristique autochtone du Canada / Simon Ratcliffe

En marge du Congrès international du tourisme autochtone, des organisations touristiques autochtones majeures du Canada, de la Nouvelle-Zélande et des États-Unis ont annoncé la création prochaine de Destination Original Indigenous Tourism (DO-IT), qui visera à unifier l'industrie touristique autochtone mondiale.

DO-IT mettra également de l'avant une homologation qui permettra aux visiteurs de distinguer les produits authentiques des différentes formes d'appropriation.

Il s’agit d’une étape monumentale vers l'amplification des voix autochtones sur la scène touristique mondiale, indique Sherry L. Rupert, PDG de l'American Indian Alaska Native Tourism Association (AIANTA), par voie de communiqué.

La création de Destination Original Indigenous Tourism créera des ponts entre les organisations des trois pays leaders en la matière dans l'espoir de consolider l'emprise des Autochtones sur leurs offres touristiques. DO-IT tentera aussi d'obtenir une place à la table de l'ONU Tourisme, afin d'assurer l'inclusion des voix autochtones dans les initiatives de marketing touristique.

Ultimement, tous les pays qui possèdent une organisation touristique autochtone pourront se joindre à DO-IT.

Le PDG de l'Association touristique autochtone du Canada (ATAC), Keith Henry, indique avoir vu pendant trop longtemps des entités internationales essayer de commercialiser le tourisme autochtone en notre nom, alors que beaucoup de voyageurs ne connaissent toujours pas notre industrie, son importance pour la préservation de nos cultures et son rôle dans la réconciliation.

Selon lui, la nouvelle organisation permettra d'unir les efforts au niveau mondial et de propulser le tourisme autochtone vers de nouveaux sommets, tout en garantissant sa viabilité à long terme et ses retombées sur les populations autochtones et non autochtones. Il n'est plus question de nous sans nous.

À cet effet, DO-IT visera à implanter une certification d'activité touristique autochtone authentique, en s'inspirant d'un concept que l'ATAC a développé dans les dernières années.

Original original

Lancé en 2022, ce programme d'accréditation, baptisé Orignal original, vise à répondre à plusieurs problèmes de diverses natures vécus par les entreprises touristiques autochtones.

C'est une marque d'excellence, explique le vice-président de l'ATAC, Sébastien Desnoyers-Picard, en entrevue avec Espaces autochtones. Ses critères sont élevés, et ça nous permet de soutenir les entreprises autochtones vers les plus hauts standards de l'industrie touristique.

Sébastien Desnoyers-Picard pose près d'une fenêtre.

Le vice-président de l'Association touristique autochtone du Canada, Sébastien Desnoyers-Picard, a d'abord œuvré en marketing pour l'organisation. Il a auparavant travaillé à Tourisme autochtone du Québec.

Photo : Radio-Canada / Jérôme Gill-Couture

Le consommateur ne sait plus trop où donner de la tête entre les termes ''Indiens'', ''Premières Nations'', ''Métis'', ''Inuit'', ''Autochtones''. Alors, le programme leur donnera quelque chose sur quoi se fier. Il n'y a pas plus original que les peuples originaux qui sont capables de fournir les expériences les plus originales au pays.

Une citation de Sébastien Desnoyers-Picard, vice-président de l'Association touristique autochtone du Canada.

Il souhaite rendre l'adhésion au programme le plus facile possible pour les entreprises touristiques autochtones. D'autant plus que la vitalité de ce genre de concept dépend de la visibilité de son image de marque.

Les défis principaux seront de s'assurer que tout le monde comprend bien le concept et comment l'appliquer. Il faudra par exemple que les organisations touristiques régionales soient en mesure de bien accompagner les gens dans le processus, explique-t-il.

À terme, si le projet de DO-IT fonctionne, toutes les entreprises touristiques autochtones un peu partout dans le monde pourront se prévaloir d'une accréditation similaire à celle du programme Original original et les consommateurs sauront vers qui se tourner pour vivre une expérience authentique.

Un problème global

Durant le Congrès international du tourisme autochtone, un groupe de discussion a été organisé, rassemblant des entrepreneurs autochtones du Canada, de la Finlande, de l'île de Pâques et d'Hawaï, et portant sur l'authenticité culturelle. Les intervenants se sont prononcés sur la question de l'appropriation culturelle, réalité qu'ils vivent à différents degrés dans leurs pays.

Selon eux, il reste beaucoup de travail à faire.

Présentement, il n'y a aucun contrôle qui est fait au Canada pour assurer que les consommateurs puissent distinguer les produits authentiques de ceux qui sont faits sur le dos des artisans autochtones, indique Jason Picard-Binet, président de Bastien Industries, qui fabrique des mocassins à Wendake depuis 1972.

Il rappelle qu'aux États-Unis, l'Indian Arts and Crafts Act de 1990 rend illégale toute vente d'objets faussement présentés comme autochtones et que les contrevenants sont passibles d'amendes allant jusqu'à 250 000 $ et de peines de cinq ans de prison.

Quand j'ai repris la direction de l'industrie, je suis tombé dans un monde d'appropriation culturelle, et ça m'a marqué à quel point rien n'est fait au Canada pour empêcher ça. Tout ce sur quoi on peut compter, c'est notre travail de sensibilisation, affirme M. Picard-Binet.

Jason Picard-Binet au micro.

Jason Picard-Binet, président et directeur général de l'entreprise de mocassins Bastien Industries.

Photo : Radio-Canada / Xavier Gagnon

Le problème est profond, selon lui, mais il croit que des changements pourraient être apportés par les consommateurs si on leur permet de distinguer facilement les offres authentiques des formes d'appropriation culturelle.

Je crois beaucoup au projet d'Original Original, même s'il faudra de gros investissements en marketing pour que les gens connaissent l'homologation. Ça pourrait ensuite leur permettre de faire les bons choix lorsqu'ils sont mis devant différents produits.

Une citation de Jason Picard-Binet, président de Bastien industries

Même si les artisans sont davantage protégés par la loi aux États-Unis, la réalité n'est pas plus rose pour les peuples autochtones d'Hawaï, qui doivent composer avec les stéréotypes des visiteurs se rendant sur leurs îles.

Les touristes arrivent encore en pensant que les jupes d'herbe et les soutiens-gorge en noix de coco sont typiques des Autochtones d'Hawaï, mais le fait est qu'historiquement, les femmes ne couvraient pas leurs poitrines et que nos jupes n'étaient pas faites avec ces matériaux, explique Kalei Uwēko‘olani, responsable des programmations culturelles au Grand Wailea Resort, situé sur l'île de Maui.

Elle juge qu'il est toujours difficile pour les touristes de distinguer le vrai du faux, et qu'au final, ce sont les communautés qui en paient le prix.

Tout ce que l'on peut faire, c'est de l'éducation. On s'assure de les familiariser avec nos enjeux avant de les divertir. Mais beaucoup viennent, achètent des objets faits en Chine qu'ils croient autochtones et repartent, souligne-t-elle.

Même son de cloche du côté de Sebastián Paoa, PDG de KAVA KAVA TOURS, à Rapa Nui – l'île de Pâques. Selon lui, il est impossible de prétendre fournir des expériences authentiques tant que les peuples concernés ne sont pas partie prenante de toutes les étapes des projets.

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