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Projet Northvolt : « Ils vendent l’environnement », dénonce un élu de Kahnawà:ke

« Ils vendent l’environnement, ils vendent les zones humides ». L’affirmation de Ross Kakwirakeron Montour, tasénhaienhs (chef) à Kahnawà:ke, est aussi forte que l’opposition du conseil de bande de la communauté au projet Northvolt.

Une machine qui abat des arbres sur un terrain.

Les travaux ont déjà commencé à McMasterville pour construire l'usine Northvolt. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers

Ross Kakwirakeron Montour, qui s’occupe de tout ce qui touche aux consultations au Conseil mohawk de Kahnawà:ke (CMK), a interpellé le gouvernement du Québec aux côtés d'autres groupes s'opposant au projet d'usine de batteries pour véhicules électriques.

À tour de rôle, Équiterre, Nature Québec et le Comité d'action citoyenne Projet Northvolt ont de nouveau fait part de leur méfiance quant à cet imposant projet en Montérégie.

Il y a une tendance du gouvernement à soustraire des projets à une évaluation environnementale et à affaiblir le BAPE […]. Cela mine la confiance du public et ne respecte pas les droits des peuples autochtones, a souligné Alice-Anne Simard, directrice générale de Nature Québec, lors d'un point de presse à Montréal, lundi.

De quoi permettre à Ross Kakwirakeron Montour de prendre la balle au bond et de réexpliquer que sa communauté, Kahnawà:ke n’a pas été consultée sur le sujet.

Ross Montour regarde vers la fenêtre.

Ross Montour s'occupe de tout ce qui touche les consultations avec le Conseil de bande de Kahnawake.

Photo : Radio-Canada / Delphine Jung

La filière batterie

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Un bras robotisé sur une chaîne de production de batteries électrique.

La société Northvolt est venue nous voir et s'est adressée au conseil de manière plutôt informelle. Ils ont simplement dit : "nous sommes là", a-t-il rapporté.

C'est entre autres ce qui a motivé l'administration de la communauté à lancer une poursuite contre le géant suédois en janvier.

M. Montour a rappelé que le Canada s’est pourtant engagé à mettre en œuvre la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones qui met justement l’accent sur le consentement libre et éclairé des Autochtones.

L'élu de Kahnawà:ke a aussi souligné que le gouvernement de François Legault refuse toujours d’implanter ces principes au Québec et qu’il refuse de nous reconnaître notre droit à l’autodétermination. L'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité une motion en 2019 visant à reconnaître les principes et à s’engager à négocier la mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.

Des manifestants sont réunis à McMasterville, le 4 février 2024, dans le cadre d'une marche funèbre, avec notamment une personne avec une pancarte « BAPE - Changer les règles en cours de route pour éviter notre déroute? ».

Les opposants dénoncent le fait que le gouvernement ait donné des « passe-droits » à Northvolt pour aller de l'avant avec son usine de batteries. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Charlotte Dumoulin

Or, une telle motion n'est pas contraignante et le premier ministre avait déclaré l'année suivante que son gouvernement refuserait de mettre en œuvre intégralement la Déclaration en invoquant l'intégrité du territoire québécois et l'économie de la province.

Oui, les nations autochtones doivent être reconnues, elles étaient ici avant nous, on doit travailler avec elles, [...] mais on ne voudrait pas non plus qu’on se retrouve dans une situation où on donnerait un droit de veto sur tous les projets économiques au Québec.

Une citation de François Legault, premier ministre du Québec, en 2020

Une responsabilité qui dépasse les frontières de la communauté

Pour expliquer pourquoi les Kanien'kehá:ka (Mohawks) se sentent concernés par un projet qui devrait se faire à McMasterville et Saint-Basile-le-Grand, à environ 50 km de Kahnawà:ke, M. Montour a rappelé la responsabilité qui incombe à sa nation.

Nous faisons partie de cet environnement et nous devons prendre en compte l’impact de nos décisions. C’est ma responsabilité, ma responsabilité de gardien de l’environnement, et c’est mon plus grand droit.

Une citation de Ross Kakwirakeron Montour, chef au Conseil de bande de Kahnawake

M. Montour rappelle que les Kanien'kehá:ka étaient installés sur les rives du Saint-Laurent bien avant l’arrivée des premiers colonisateurs et évoque la doctrine de la découverte utilisée pour l’expansion coloniale.

Cette doctrine a fait perdurer l'invisibilité des peuples autochtones sur ce qu'ils ont baptisé l'île de la Tortue durant des centaines d'années, conduisant les Québécois à avoir de la difficulté à imaginer pourquoi les Autochtones s'impliquent autant dans la protection du territoire.

Selon lui, les décisions de développement doivent tenir compte d’un concept propre aux Kanien'kehá:ka : celui de la grande paix.

Prise de vue d'un tracteur et de deux modules sur les lieux des travaux de construction de l'usine Northvolt.

Voici une partie du futur terrain de NorthVolt qui regorge de zones humides. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers

Le peuple iroquois vit sous ce qu'on appelle la grande loi de la paix (kaianere’kó:wa). Mais la paix ne se résume pas à l'absence de guerre. C'est aussi une question de relations, indique-t-il.

Il s’agit d’une relation avec la nature qui ne peut pas vraiment être englobée dans une codification juridique. Dans leurs prises de décisions, les Kanien'kehá:kas considèrent ainsi qu’il est nécessaire de prendre en compte l’avenir des sept générations suivantes. Si tu ne remplis pas ce critère, tu dois te demander si le projet est OK, a-t-il souligné.

La position de M. Montour face au projet de Northvolt ne concerne pas uniquement le manque de consultation. Il se demande également dans quelle mesure on peut soutenir un projet qui se dit vert, mais qui autorise la destruction de zones humides.

Il évoque les nombreuses espèces réparties dans le territoire visé par le projet Northvolt : la tortue serpentine, la tortue molle à épines, plusieurs espèces d’oiseaux et de chauve-souris. Quand on parle d’énergie verte, on ne parle jamais des espèces qui sont autour, a-t-il précisé.

Une tortue serpentine sur des roches dans un lac.

Les tortues serpentines ont été observées dans la zone de la future usine selon les défenseurs de l'environnement. (Photo d'archives)

Photo : Facebook/Ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs

Au final, tout est lié à l’argent, croit M. Montour.

Nous sommes en train de consommer le futur des générations futures. Et vos enfants ne pourront pas manger cet argent. L’avenir de nos enfants devrait tous nous concerner.

Une citation de Ross Kakwirakeron Montour, chef au Conseil de bande de Kahnawake

Outre la poursuite, M. Montour a souligné que le CMK étudie d'autres stratégies pour contester le projet.

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