Profilage racial : le gouvernement Legault prié de ne pas faire appel
Reportage de Louis-Philippe Arsenault.
Photo : Radio-Canada / Louis-Philippe Arsenault
Prenez note que cet article publié en 2022 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Un regroupement d'organismes demande au gouvernement de François Legault de ne pas interjeter appel de la décision de la Cour supérieure qui met fin aux interceptions routières sans motif valable, une procédure qui mène au profilage racial.
Le 25 octobre dernier, dans une décision rendue par le juge Michel Yergeau sur les interceptions routières sans motif réel au Québec, la Cour supérieure invalidait l’arrêt Ladouceur et, donc, l’article 636 du Code de la sécurité routière qui en découle.
Le juge Yergeau renversait une jurisprudence établie il y a plus de 30 ans.
Ce dernier accorde un délai de six mois pour l’entrée en vigueur de sa décision et le gouvernement québécois dispose de 30 jours pour faire appel du jugement.
Le regroupement, constitué de dix organismes communautaires et de défense des droits, considère que si Québec allait de l’avant avec un tel appel, ce serait très dommageable à l’inclusion et à la cohésion nationale
.
Alain Babineau de la Coalition rouge cosigne une lettre destinée au ministre François Bonnardel.
Photo : Radio-Canada / Sylvain Roy Roussel
Le directeur général de la Coalition Rouge, Alain Babineau, soutient que l’article 636 du Code de la sécurité routière est présentement insaisissable et très sournois
.
Il repose sur une pratique policière trop souvent détournée de ses faits par des préjugés individuels conscients ou non.
Un appel qui ira jusqu’à la Cour suprême, ça prend de cinq à huit ans. Entre-temps, il y a des Québécoises et Québécois racisés qui vont continuer à être profilés
, soutient Mbaï-hadji Mbaïrewaye, responsable du profilage racial au Collectif 1629.
Mbaï-hadji Mbaïrewaye est responsable du profilage racial au Collectif 1629.
Photo : Radio-Canada / Sylvain Roy Roussel
Est-ce qu’on veut aller là? On peut s’éviter une controverse en reprenant simplement ce qui existait et qui était bien. Pourquoi est-ce qu’on s’en priverait?
, ajoute-t-il.
Plutôt revenir en arrière
À une dizaine de jours de l’échéance du délai d’appel, les représentants d’organismes souhaitent rencontrer le ministre de la Sécurité publique pour parler de solutions.
On demande au gouvernement de retourner en arrière
, lance Alain Babineau en faisant référence à la réglementation avant qu’elle soit modifiée par l’arrêt Ladouceur.
Notre proposition vise le retour de la version de l’article 636 qui existait en 1990 et à l’époque qui obligeait un policier d’avoir un motif raisonnable de croire qu’une infraction au Code de la route a été commise pour exiger du conducteur qu’il immobilise son véhicule.
Article 636 avant 1990 :
Tout agent de la paix qui, dans l’exercice des fonctions qui lui sont conférées en vertu du présent code, a un motif raisonnable de croire qu’une infraction à ce code a été commise et que les circonstances l’exigent, peut 1) faire immobiliser un véhicule routier; 2) sans la permission du propriétaire, prendre possession d’un véhicule routier, le conduire et le remiser aux frais du propriétaire.
Article 636 après 1990 :
Un agent de la paix, identifiable à première vue comme tel peut, dans le cadre des fonctions qu’il exerce en vertu du présent code, exiger que le conducteur d’un véhicule routier immobilise son véhicule. Le conducteur doit se conformer sans délai à cette exigence.
Le ministre de la Sécurité publique, François Bonnardel, a refusé de commenter le dossier. Au Ministère, on se limite à dire que leurs équipes sont en train d’analyser le jugement
.
Mbaï-hadji Mbaïrewaye souhaitait lancer un message clair en conférence de presse.
Photo : Radio-Canada / Sylvain Roy Roussel
En attendant, Mbaï-hadji Mbaïrewaye croit qu’une solution trouvée en collaboration avec le ministre pourrait avoir des répercussions à travers le pays.
Je pense que si le Québec prend le lead, peut-être que les autres provinces nous suivront.