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Disparue dans l’indifférence : 3 organismes de protection de l’enfance mis en cause

Une photo en noir et blanc d'une balançoire sur un terrain de jeux.

Un rapport de l'ombudsman de l'Ontario souligne que trois organismes ont failli à leur tâche d'assurer la sécurité d'une jeune Autochtone disparue à plusieurs reprises en 2020.

Photo : Radio-Canada

Radio-Canada

Trois organismes de protection de l’enfance de l'Ontario ont échoué à protéger une jeune fille autochtone vulnérable qui a disparu à plusieurs reprises lorsqu’elle était prise en charge dans un foyer d’accueil du sud-ouest de la province.

Dans un rapport publié jeudi, l’ombudsman de l’Ontario, Paul Dubé, montre du doigt les manquements de ces organismes qui étaient censés protéger la jeune Misty, une adolescente de 13 ans originaire du Nord de l’Ontario, ayant des antécédents de consommation de drogue et présumée victime de trafic sexuel, lorsqu'elle a disparu de son foyer à sept reprises en 2020.

La jeune fille était prise en charge par un foyer d’accueil administré par Johnson Children’s Services (JCS), dans une ville du Sud-Ouest de l'Ontario, d’où elle a pris la fuite plusieurs fois pour un total de 47 jours.

Les agences qui avaient la responsabilité de prendre soin de Misty n'ont pas pris sa disparition au sérieux. [Elles ont] fait preuve d'insouciance, d'un manque d’attention.

Une citation de Paul Dubé, ombudsman de l'Ontario

Lors d’une de ses fuites, la jeune fille a disparu pendant 19 jours consécutifs. Pendant ces disparitions, il y a des preuves selon lesquelles elle a été agressée physiquement et sexuellement, a consommé des drogues dures et a subi une surdose, souligne le rapport.

Les menaces à sa sécurité ne sont pas une simple hypothèse, elle est revenue de ses absences intoxiquée, affamée, couverte de vomi.

Une citation de Paul Dubé, ombudsman de l'Ontario

Une autre fois, elle était ensanglantée, blessée, elle affirmait qu'elle avait fait des surdoses, elle portait des signes d'agressions physique et sexuelle et elle avait échoué au test de consommation de cannabis et de méthamphétamine, poursuit Paul Dubé.

C’est juste avec beaucoup de chance qu'elle est saine et sauve aujourd'hui.

Une citation de Paul Dubé, ombudsman de l'Ontario

L’ombudsman explique avoir lancé son enquête après qu’on lui eut fait part de préoccupations relatives aux mesures prises par JCS pour assurer la sécurité de Misty, ainsi que par deux autres organismes de protection de l'enfance : Anishinaabe Abinooji Family Services (AAFS), une société d’aide à l’enfance autochtone près de la communauté d’origine de Misty, et la Société d’aide à l’enfance (SAE) de la ville où elle a été portée disparue, dans le sud-ouest de la province.

La jeune Autochtone a été confiée aux soins de JCS par AAFS, car cet organisme ne trouvait pas les ressources pour répondre à ses besoins complexes à proximité de sa communauté d’origine dans le Nord de l’Ontario.

Malheureusement, et c’est une réalité qui date depuis fort longtemps, le Nord de l’Ontario manque de ressources suffisantes pour fournir les traitements et les soins nécessaires aux enfants autochtones qui ont des problèmes complexes comme ceux de Misty, explique Paul Dubé.

Les leçons tirées de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées ne sont pas appliquées de façon constante à travers notre province.

Une citation de Paul Dubé, ombudsman de l'Ontario

Les responsabilités des trois organismes

Selon l'enquête de l’ombudsman, JCS ne fournissait pas à Misty le soutien individuel pour lequel cet organisme était payé, c'est-à-dire un préposé affecté en tout temps à un enfant. Elle ajoute que le personnel du foyer a ignoré ses propres protocoles en cas de disparition d’enfant et qu’il a attendu plus de quatre heures avant de signaler à la police sa disparition.

De son côté, l’AAFS est responsable des services de piètre qualité fournis à la jeune fille pendant sa disparition, selon l'enquête de l'ombudsman. Durant une disparition de 19 jours consécutifs, l’AAFS n’a pas envisagé d’avoir recours à un mandat de la protection de l'enfance qui aurait accordé aux autorités compétentes le pouvoir d'amener contre son gré l’adolescente dans un lieu sûr. Par ailleurs, l’AAFS n’a pas examiné avec soin les conditions du permis de JCS et n’a pas contrôlé la qualité des soins que fournissait cet organisme.

Pour sa part, la Société d’aide à l’enfance du Sud-Ouest a fourni des services à Misty, malgré l’absence d’entente officielle avec l'AAFS. Toutefois, elle non plus n’a pas demandé de mandat de la protection de l’enfance, selon les conclusions de l'enquête. Le rapport ajoute que la SAE du Sud-Ouest et l’AAFS étaient tenus de signaler au Bureau de l'ombudsman le type de blessures qu’avait subies Misty, mais ils ne l'ont pas fait.

Notre rapport démontre que le système de protection à l'enfance a besoin d’être amélioré, bonifié dans certains endroits, pour assurer que des jeunes aussi vulnérables que Misty reçoivent des soins appropriés nécessaires.

Une citation de Paul Dubé, ombudsman de l'Ontario

Des recommandations

Au terme de son enquête, l’ombudsman a formulé 58 recommandations destinées aux trois organismes en vue d’améliorer les services fournis aux enfants. Paul Dubé exhorte notamment la JCSà veiller à ce que tous les parents de ses foyers d’accueil et les membres de son personnel reçoivent une formation sur la sécurité culturelle des Autochtones.

Les recommandations à l’intention d’AAFS mettent aussi l’accent sur l’amélioration de la formation du personnel et de la tenue des dossiers, ainsi que sur la conclusion d’ententes de services dûment signées avec d’autres organismes.

Les recommandations visant la SAE du Sud-Ouest portent plus précisément sur l’adoption de lignes directrices relativement aux mandats de la protection de l’enfance et sur le signalement d’incidents graves.

Les trois organismes ont accepté les recommandations de l’ombudsman et lui feront un rapport tous les six mois sur la progression de leur mise en œuvre.

La JSC, qui est la plus visée dans ce rapport, n'a pas souhaité répondre à notre demande d'entrevue.

Le NPD demande des comptes

De son côté, le Nouveau Parti démocratique (NPD) de l’Ontario estime que ce gouvernement ne s’est jamais suffisamment attaqué au problème des ressources appropriées aux enfants des Premières Nations du nord de la province.

Les députés Monique Taylor, porte-parole de l'opposition officielle en matière de services à l'enfance, communautaires et sociaux, et Sol Mamakwa, porte-parole de l'opposition officielle en matière de relations avec les Autochtones et les traités, jugent que les conditions qui rendent les enfants comme Misty vulnérables à la traite de personnes n'ont jamais été une priorité de ce gouvernement.

Ils déplorent notamment le recours de l'Ontario aux fournisseurs privés de services de protection de l'enfance. Le prestataire privé JCSn'a même pas fourni les niveaux de soins de base pour lesquels il [est] financé, déplorent les deux porte-parole.

Le NPD réclame des actions concrètes de la part du gouvernement. Nous devons savoir comment il compte mettre en œuvre les recommandations de l'ombudsman afin que des rapports comme ceux-ci cessent d'être la norme pour les enfants de notre province.

Avec les informations de Mirna Djukic

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