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Près de la moitié des Québécois ont observé ou subi du harcèlement sexuel au travail

Un homme pose ses mains sur l'épaule et l'avant-bras d'une femme qui travaille à l'ordinateur.

Au Canada, une femme sur huit a déclaré avoir été agressée sexuellement dans son milieu de travail au cours de sa vie professionnelle, le plus souvent sous la forme de contacts sexuels non désirés.

Photo : getty images/istockphoto

Radio-Canada

Selon un rapport accablant sur le harcèlement sexuel dans le milieu du travail au Québec, rendu public vendredi, « les comportements sexualisés inappropriés ou discriminatoires sont monnaie courante ». Le ministère du Travail a promis d’agir pour sévir contre ce phénomène qui touche particulièrement les femmes.

Le document volumineux de 350 pages, intitulé Mettre fin au harcèlement sexuel dans le cadre du travail : se donner les moyens pour agir, a été préparé par trois expertes en sciences juridiques, Rachel Cox (UQAM), Dalia Gesualdi-Fecteau (Université de Montréal) et Anne-Marie Laflamme (Université Laval).

En 2020, au Québec, presque une personne sur deux (49 %) a observé ou subi un comportement sexualisé inapproprié ou discriminatoire en milieu de travail au cours des 12 mois précédant le sondage, concluent les autrices après avoir analysé sur les données recueillies au Québec lors d’un sondage effectué en 2020 par Statistique Canada, ainsi que plus de 500 plaintes, réclamations et rapports d’intervention à la CNESST et à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ).

Quant aux personnes visées personnellement par un comportement sexualisé inapproprié, les femmes sont deux fois plus nombreuses (26 %) que les hommes (13 %) à indiquer avoir subi un comportement sexualisé inapproprié ou discriminatoire dans la dernière année.

Une citation de Extrait du rapport

Toujours selon le rapport, les hommes sont plus souvent exposés à du matériel sexuellement explicite, alors que les femmes sont beaucoup plus souvent exposées à des communications sexualisées inappropriées, à des attouchements, à des rapprochements trop intimes ou à des suggestions de relations sexuelles, ainsi qu’à des agressions à caractère sexuel.

Les autrices de l’étude déplorent notamment le manque d’accompagnement des victimes dans leur démarche de dénonciation et constatent qu’une proportion tout à fait minime de victimes finissent par porter plainte de manière formelle.

La prise en charge des enjeux de harcèlement sexuel et d’agressions à caractère sexuel par les milieux de travail québécois est déficitaire, et ce, autant en matière de formation et de prévention qu’en ce qui concerne les processus de traitement des plaintes, peut-on lire dans le rapport.

Au Québec, seulement une femme sur trois (34 %) et à peine plus d’hommes (40 %) déclarent avoir reçu des renseignements ou une formation de l’employeur sur le harcèlement sexuel, poursuit le document.

Les personnes victimes doivent disposer d’une expertise considérable pour naviguer entre les règles juridiques, les délais et les mécanismes de mise en œuvre. C’est plus particulièrement le cas pour les personnes non syndiquées.

Une citation de Extrait du rapport

Les autrices du rapport proposent ainsi plus de 80 recommandations pour contrer la violence à caractère sexuel, un phénomène toujours banalisé, selon elles.

Parmi leurs recommandations, elles proposent au ministère du Travail − qui a commandé le rapport − de lancer une réforme législative pour adapter les institutions et les instances du droit du travail aux particularités du harcèlement sexuel et des agressions à caractère sexuel et aux besoins des personnes qui en sont victimes. Plus concrètement, elles appellent à la création d’une division spécialisée en matière de violence à caractère sexuel au sein du Tribunal administratif du travail.

Par ailleurs, les expertes recommandent un meilleur accompagnement juridique des victimes; pour ce faire, elles invitent la CDPDJ à modifier son processus de traitement des plaintes et à apporter un soutien concret et diligent aux personnes qui se tournent vers elle pour déposer une plainte pour harcèlement sexuel ou pour agression à caractère sexuel dans le cadre du travail.

Définition du harcèlement sexuel, tiré de la formation de la Direction générale de l’admissibilité des réclamations (DGAR) :

Le harcèlement psychologique au travail peut être le fait d’un supérieur, d’un collègue, d’un subalterne, de la clientèle ou d’un fournisseur. Il peut se manifester par :

  • Des regards, des sifflements, des photos, des questions intimes, des remarques déplacées, des frôlements; (degré contrariant)
  • De petits cadeaux indésirés, des offres ambiguës au travail et hors travail, des caresses, des pincements, le fait de suivre la cible au travail et hors travail, l’acculement dans un coin, le soulèvement de vêtements; (degré contraignant)
  • Des lettres de menaces, de l’exhibitionnisme, du voyeurisme, des téléphones anonymes et/ou obscènes, le refus d’accepter la fin des relations amoureuses, l’arrachement des vêtements, une tentative de viol, de la violence.

Le rapport souligne également les coûts économiques engendrés par ces phénomènes et cite une étude effectuée en 2018 en Australie, qui chiffre ces pertes en lien avec le harcèlement sexuel et les agressions à caractère sexuel à 2,6 milliards de dollars. Ces coûts comprennent des absences de travail de courte durée, une productivité réduite lorsque la personne victime est au travail, un roulement de personnel accru, ainsi que les coûts d’opportunités des gestionnaires qui doivent répondre aux plaintes.

Chaque cas de harcèlement sexuel représente en moyenne la perte de quatre jours de travail, indiquent encore les chercheuses.

Réagissant à ces conclusions, le ministre du Travail, Jean Boulet, s’est dit stupéfait, même si, selon lui, le phénomène était déjà connu.

C’est certain que ça m’impose de faire une analyse diligente de ce rapport-là et de voir la meilleure manière de mettre en place les recommandations.

Une citation de Jean Boulet, ministre du Travail du Québec

Il affirme que son ministère va prendre des mesures concrètes au cours des prochains mois.

De son côté, Joanne Blais, présidente de la Table de concertation du mouvement des femmes de la Mauricie, a dit qu’elle n’a pas été surprise par le rapport et que ces comportements surviennent dans tous les milieux de travail.

Je suis convaincue qu’il reste beaucoup de travail à faire au niveau de l’éducation et de la sensibilisation dans tous les milieux, a-t-elle affirmé.

Avec les informations d’Amélie Desmarais

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