On est allé à la recherche des cerfs de Virginie au parc Michel-Chartrand de Longueuil | 24 heures
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On est allé à la recherche des cerfs de Virginie au parc Michel-Chartrand de Longueuil

Image principale de l'article On est allé à la recherche des cerfs de Longueuil

J’habite Longueuil. J’ai donc beaucoup entendu parler des cerfs de Virginie du parc Michel-Chartrand, qui seront abattus l’automne prochain à la demande de la Ville. Alors qu’ils vivent pour la plupart leur dernier hiver, je me suis rendu dans le parc pour essayer d’en croiser, mais aussi pour constater l’impact de la présence de ces quelque 117 animaux sur l’environnement.

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Avant de m’y rendre, j’ai jasé avec Martin-Hugues St-Laurent, professeur en écologie animale à l’Université du Québec à Rimouski (UQAR), pour essayer d’en apprendre un peu plus sur les cerfs de Virginie. 

L’expert commence par m’expliquer que ces animaux, qui sont herbivores, mettent une pression «assez importante sur la végétation» du parc, notamment parce que leur alimentation est flexible. Lorsque la nourriture manque, les bêtes ont tendance à se rabattre sur des ressources dites opportunistes, comme des haies de cèdres, des arbustes ornementaux et des plates-bandes.

Je lui demande ensuite de m’aiguiller sur ce que je devrais surveiller dans le parc pour comprendre comment ces animaux affectent la santé du parc. 

«Si vous regardez la végétation feuillue, les ramilles des arbres sont souvent broutées, comme si on avait cisaillé le bout des branches, m’explique-t-il. En été, on se rend plus compte de l’impact de l’animal, lorsqu’on constate que le parc est moins riche en herbacés, que c’est moins vert.»

Partons à l’aventure

Aussitôt arrivé dans le parc, je me mets en marche. Comme me l’avait suggéré Martin-Hugues St-Laurent, j’observe les branches des arbres. Plusieurs sont mâchouillées.

PHOTOS Jean-Michel Clermont-Goulet | 24 heures 

Une fois dans la partie du sud du parc, je remarque des traces d’urines et des excréments sur la neige tombée la veille. Je ne suis pas un spécialiste, mais je peux vous confirmer que ce ne sont pas des écureuils qui ont laissé ces petits cadeaux...  

L’excitation monte: je sens que je me rapproche de mon objectif. Je ne suis pourtant pas au bout de mes peines. 

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Ce n’est qu’une heure et demie plus tard, alors que le soleil s’apprête à tirer sa révérence, que je fais face à face avec mes deux premiers cerfs. L’un se repose près d’un arbre, l’autre grignote des bouts de branches. 

La chance continue de me sourire: j’en croise trois autres un peu plus loin. Je suis surpris de constater à quel point ma présence ne semble pas les déranger. 

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Ils étaient 11

Je continue mon expédition. 

Un peu plus loin, je rencontre un groupe de six cerfs, qui sont beaucoup plus grands et gros que les cinq autres que j’ai croisés avant. Ils semblent avoir été attirés là par de la moulée laissée sur la neige. C’est pourtant bien indiqué qu’il est interdit de nourrir les animaux du parc. En fait, partout au Québec, c'est interdit depuis mars 2023 de nourrir les cerfs de Virginie en dehors des périodes de chasse, soit du 1er décembre au 31 août.

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Au total, j’aurai donc vu 11 cerfs. 

En se fiant aux images que je lui ai envoyées, Stéphane Lair, professeur titulaire de la faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal, indique que les animaux croisés au parc Michel-Chartrand semblaient «en bonne forme». 

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De belles bêtes, mais à quel prix?

Si les animaux sont en santé, pourquoi les abattre?

Il faut savoir que ce ne sont pas tous les animaux qui se portent bien. La population de cerfs de Virginie a en effet explosé au cours des dernières années dans le parc Michel-Chartrand, pour atteindre 117 cervidés au printemps dernier. Ça fait en sorte qu'ils sont aujourd'hui une centaine de plus que ce que le parc est capable de nourrir.  

Un journaliste du Devoir qui s’y est rendu au début du mois de janvier a d’ailleurs croisé des bêtes en mauvaise santé. Certains souffraient d’alopécie, c’est-à-dire que leur poil tombait. 

Joël Lemay / Agence QMI 

Même s’il peut comprendre que des citoyens soient choqués par l’abattage d’autant de cerfs, pour Martin-Hugues St-Laurent, la situation actuelle est tout simplement «intenable». Si la population de cervidés dans le parc continue de grandir, la survie de certaines espèces végétales et animales sera menacée. 

«Soit on enlève les animaux pour permettre à la végétation de reprendre, mais aussi pour que les cerfs soient en meilleures conditions physiques, ou on attend que le temps fasse son œuvre et que ça s’effondre dans une succession de mortalité», souligne-t-il.  

«Mourir de faim ou d’une série de maladies, ce n’est pas drôle. Si on veut les laisser mourir dans la dignité, il faut accepter parfois qu’il faille peut-être donner une mort plus douce avec des techniques de chasse respectueuses», souligne le professeur d’écologie. 

Rappelons qu’après une saga de deux ans, la Cour d’appel du Québec a rejeté, en octobre dernier, la demande de l’organisme Sauvetage Animal Rescue, qui souhaitait faire annuler la décision du ministère québécois de la Faune d’autoriser la Ville de Longueuil à abattre les cerfs.

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