La cheffe de la Première Nation Malécite du Madawaska, Patricia Bernard, affirme être sereine à propos des conséquences de la taxation du tabac et du cannabis par son conseil de bande. Le gouvernement provincial a pourtant menacé sa communauté de répercussions.

La cheffe de la Première Nation Malécite du Madawaska, Patricia Bernard, a peur d’une seule conséquence possible de la taxation du tabac et du cannabis par son conseil de bande: la montée du racisme.

«Nous venons juste de promulguer notre loi sur les licences pour le tabac. Nous devons encore créer la régulation qui l’accompagne, précise-t-elle. Nous ne savons donc pas exactement quel sera le taux de taxation. Il pourrait toutefois représenter environ la moitié de celui en vigueur ailleurs dans la province.»

Mme Bernard rappelle que les accords sur le partage des taxes, abolis par le gouvernement de Blaine Higgs, ont permis aux entreprises hors réserves de faire des ventes taxées de la même façon que celles des réserves autochtones.

«Si notre Première Nation est capable de faire des ventes à un coût moindre, ça va rendre les entreprises locales un peu inquiètes à propos de ce qu’elles pourraient considérer comme injuste», croit la cheffe.

Elle ajoute que son conseil de bande se prépare à taxer l’essence, l’alcool et la valeur ajoutée de tous les biens et services taxables en vertu de la Loi sur la taxe d’accise. Elle soutient que sa communauté dispose d’une autonomie gouvernementale lui permettant de lever les impôts qu’elle veut.

«Le racisme commence à pointer le bout de son nez dans ce genre de situation, commente Mme Bernard. Mais quand on y pense, les cigarettes et l’alcool sont moins chers au Québec et personne ne se plaint de ça. Ce qui doit être reconnu, c’est notre autonomie gouvernementale.»

Elle précise que l’abolition des ententes de partage des taxes par le gouvernement du Nouveau-Brunswick a privé sa communauté de 15 à 17 millions $ par an (dont seulement 500 000 $ provenaient de la taxation du tabac).

La directrice de la Chambre de commerce Région Edmundston, Cathy Pelletier, a préféré ne pas commenter le sujet. Elle a qualifié le dossier de chaud et d’ambigu. Elle a aussi souligné la collaboration de son organisme avec la Première Nation Malécite du Madawaska.

Couteaux tirés

Devant les menaces de répercussions du gouvernement du Nouveau-Brunswick, Mme Bernard reste de marbre. Le ministère des Affaires autochtones soutient que l’évitement du système provincial de taxe par les détaillants des réserves est illégal.

«Ne pas percevoir ni remettre la taxe en vertu de la Loi relative à l’impôt sur le tabac peut entraîner la suspension de la licence d’un vendeur au détail. Les grossistes, quant à eux, ne sont pas autorisés à vendre des produits du tabac à un détaillant qui n’est pas titulaire d’une licence», a noté l’agent de communications, David Kelly.

«Le gouvernement du Nouveau-Brunswick peut révoquer ses licences, mais ne peut pas révoquer les nôtres, rétorque Mme Bernard. Il peut interdire aux fournisseurs de la province de nous réapprovisionner, mais il y en a dans tout le pays.»

M. Higgs pense au contraire avoir un pouvoir de nuisance. Il a tout d’abord affirmé que du tabac de contrebande se vendait dans la Première Nation Malécite du Madawaska.

«[Cette communauté] veut taxer un produit illégal. Nous devrions pouvoir faire appliquer la législation à ce propos, a-t-il déclaré en conférence de presse. Le phénomène des personnes venant de l’extérieur de la province pour acheter de la contrebande devient un problème social.»

Le premier ministre a ensuite assuré que tous les vendeurs en gros de tabac non autochtones devaient respecter la Loi relative à l’impôt sur le tabac de la province.

Autonomie autochtone

«Il y a une atmosphère de guerre entre ce gouvernement et nous, déplore Mme Bernard. M. Higgs ne sait pas s’asseoir et négocier avec les Premières Nations. Les citoyens du Nouveau-Brunswick devraient chercher des élus qui peuvent travailler avec nous sur un pied d’égalité, de nation à nation.»

Elle indique que d’autres communautés wolastoqeys de la province souhaitent imiter la sienne au sujet des taxes. Elle précise que leurs conseils de bande en sont à la première étape d’un long processus, soit la promulgation de leurs propres lois sur l’utilisation des terres, l’environnement et les ressources naturelles.

La Loi sur la gestion des terres des Premières Nations et son Accord-cadre permet aux communautés autochtones de se soustraire à 40 articles de la Loi sur les Indiens. Elles peuvent ainsi obtenir des possibilités de développement grâce à un code foncier, selon le gouvernement fédéral.

«C’est vraiment dommage que nous en soyons arrivés là», lâche Mme Bernard.

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