Les regroupements des nations wolastoqey et mi’kmaq se sont indignés des propos du premier ministre. Blaine Higgs a dit qu’il développerait l’exploitation du gaz de schiste avec ou sans leur accord. La ministre des Affaires autochtones, Arlene Dunn, l’a ensuite contredit.

Loin des yeux, loin du cœur. Difficile de dire si le premier ministre Blaine Higgs aime beaucoup les autochtones. Il semble en tout cas les avoir oubliés pendant son voyage en Europe.

Le progressiste-conservateur vantait les ressources en gaz naturel de sa province. C’est dans ce contexte qu’il a parlé de ses projets concernant le développement de l’exploitation de cette énergie fossile au média économique All New Brunswick, le 11 mai.

«Je veux que les Premières Nations fassent partie de ça, mais il y a un moment où je dois juste trouver une façon d’avancer si je ne peux pas avoir de discussions sérieuses pour y parvenir», a-t-il dit.

Ces propos diffèrent de ceux que M. Higgs a tenus dans son discours sur l’état de la province en février et dans son discours du Trône en octobre.

À chaque évocation du gaz de schiste, il a dit qu’il discuterait de ses projets avec les communautés autochtones. Il a même ajouté «de nation à nation» dans son discours le plus récent.

Contacté vendredi par l’Acadie Nouvelle, le premier ministre a indiqué dans un courriel que ses propos «ne visaient pas à suggérer que le gouvernement du Nouveau-Brunswick se soustrairait à l’obligation de consultation, comme l’a fait remarquer la ministre Dunn, lorsqu’il s’agit de projets d’exploitation des ressources».

Indignation

Des dirigeants autochtones se sont indignés quand ils ont lu l’article de All New Brunswick.

«Il s’agit d’une décision choquante et régressive, et M. Higgs n’a même pas eu le courage de l’exprimer de ce côté-ci de l’Atlantique», a réagi le chef de Bilijk (la communauté de Kingsclear), Gabriel Atwin.

«Il est clair que nous avons affaire à un roi fou», a attaqué le chef de Sitansisk (la communauté de St. Mary’s), Allan Polchies.

«On ne peut pas faire confiance à l’homme du pétrole pour qu’il tienne sa parole», a jugé la cheffe de la Première Nation Malécite du Madawaska, Patricia Bernard.

Le regroupement des six communautés wolastoqey du Nouveau-Brunswick a raconté que le gouvernement provincial a rencontré ses chefs à propos du gaz de schiste.

L’association a cependant déploré l’absence de justifications économiques détaillées en faveur de l’exploitation de la ressource. Elle a aussi déploré l’absence d’éléments calmant ses craintes pour l’environnement.

Le regroupement de neuf communautés mi’kmaq de la province a aussi fait part de sa perte de confiance dans le premier ministre.

«Le gouvernement n’a pas voulu s’engager à un vrai processus de consultation et d’évaluation d’impact, essayant à la place de forcer les chefs des Premières Nations à signer des accords soutenant le développement. Par conséquent, il n’y a pas de discussion active à propos du gaz naturel», a-t-il noté.

Le gaz de schiste est la solution, pour le premier ministre Blaine Higgs. – Archives

Frictions

Vendredi, la ministre des Affaires autochtones, Arlene Dunn, a tenté de rassurer les Premières Nations et l’opposition à l’Assemblée législative.

«Parfois, les gens disent des choses parce qu’ils sont dans le feu de l’action et qu’ils sont très enthousiastes, a-t-elle avancé en mêlée de presse, à propos de Blaine Higgs. Mais je peux vous assurer qu’il y a un processus de consultation avec les Premières Nations en place. Nous le suivrons.»

Elle a affirmé que le gouvernement devait impliquer les communautés autochtones dans un projet d’exploitation du gaz de schiste et les considérer comme des partenaires.

«Nous n’avons même pas de concessionnaire intéressé pour l’instant. S’il n’y en a pas, il n’y a pas de projet, a souligné Mme Dunn. Or, les investisseurs du secteur privé ne veulent pas s’empêtrer dans la tourmente. Ils veulent diminuer les risques et avoir un environnement politique stable.»

Le chef Allan Polchies s’est félicité des propos tenus par Mme Dunn.

«C’est une position courageuse de la part de la ministre Dunn, a-t-il déclaré. Nous attendons avec impatience la « consultation importante » promise par la ministre.»

Deux députés de l’opposition à l’Assemblée législative ont relevé les tensions à l’intérieur du gouvernement progressiste-conservateur.

«C’est clair qu’il y a une contradiction entre la perspective de Mme Dunn et celle du premier ministre, a commenté la cheffe du parti libéral, Susan Holt. Le premier ministre est bloqué dans de vieilles façons de faire des affaires.»

«La ministre Dunn est dans une drôle de position, a estimé l’élu vert, Kevin Arseneau. Je pense qu’elle est prise entre l’arbre et l’écorce. Il y a une friction entre sa vision et celle de M. Higgs.»

Le gaz de schiste en dates

  • En 2015, le gouvernement libéral de Brian Gallant a imposé un moratoire sur l’exploitation du gaz de schiste, à la suite d’un soulèvement populaire important. Il l’a fait par le biais d’un règlement.
  • En 2016, la Commission sur la fracturation hydraulique a conseillé le respect de plusieurs conditions pour annuler le moratoire. Les Premières Nations devraient être d’accord. Il devrait aussi y avoir un contrat social.
  • En 2019, le gouvernement de Blaine Higgs a modifié le règlement édicté par les libéraux pour pouvoir exempter du moratoire les concessionnaires qui veulent forer un puits de gaz dans la région de Sussex.

– Avec des informations du journaliste Alexandre Boudreau

logo-an

private

Vous utilisez un navigateur configuré en mode privé ou en mode incognito.

Pour continuer à lire des articles dans ce mode, connectez-vous à votre compte Acadie Nouvelle.

Vous n’êtes pas membre de l’Acadie Nouvelle?
Devenez membre maintenant

Retour à la page d’accueil de l’Acadie Nouvelle