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La dégringolade du français se poursuit au Québec et au Canada

Pendant ce temps, l’usage de l’anglais et des autres langues à la maison progresse



Les voyants sont au rouge après la publication des données du recensement 2021 de Statistique Canada, qui enregistre l’accélération du déclin du français au profit de l’anglais et d’autres langues non seulement au Canada, mais aussi au Québec. 

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La situation est particulièrement alarmante dans le reste du Canada, dont en Ontario et au Nouveau-Brunswick (voir ci-bas). 

«C’est assez dévastateur» pour ces deux provinces, commente la professeure au Collège militaire royal du Canada Stéphanie Chouinard. 

Recul au Québec 

Dans la Belle Province, le français chute aussi sur plusieurs fronts depuis le dernier recensement de 2016. On observe un recul du nombre de personnes dont le français est la langue maternelle (de 77,1 % à 74,8 %), la première langue officielle parlée (de 83,7 % à 82,2 %) et de la langue prédominante à la maison (79,0 % à 77,5 %).

Sans surprise, c’est sur l’île de Montréal (-2,4 %), à Laval (-3 %) et en Outaouais (-2,4 %) que les baisses les plus importantes au chapitre de la première langue officielle parlée ont été enregistrées.

Même s’il reste relativement élevé, le pourcentage de Québécois se disant capable de soutenir une conversation en français a légèrement chuté au cours des cinq dernières années, passant de 94,5 % à 93,7 %.

  • Écoutez la chronique de Nic Payne au micro de Marc-André Leclerc sur QUB radio : 

L’anglais progresse

À l’inverse, la proportion de personnes ayant l’anglais comme première langue officielle parlée au Québec est en hausse d’un point, atteignant désormais 13,0 %, ce qui représente «un retour près du seuil observé en 1981».

Pour la première fois depuis que des données comparables sont compilées, le nombre de personnes ayant l’anglais comme première langue officielle parlée a franchi le cap du million de locuteurs au Québec en 2021.

Statistique Canada explique cette augmentation par le fait que la population de langue anglaise est plus jeune, par l’augmentation du nombre de résidents non permanents ainsi que par un ralentissement de l’exode d’anglophones vers d’autres provinces.

À l’échelle du pays, « l’immigration a contribué » à la progression de l’anglais puisque c’est vers cette langue que se « ourne une majorité d’immigrants après leur arrivée au pays», explique Statistiques Canada. 

Le directeur l’Observatoire démographique et statistique de l’espace francophone à l’Université Laval, Richard Marcoux, admet que la situation du français est «fragile» au Québec, mais il n’est pas inquiet. Selon lui, la langue d’usage au travail, et la capacité à soutenir une conversation en français sont de meilleurs indicateurs de sa vitalité.

Il estime que la réforme de la Charte de la langue française du gouvernement Legault est un pas dans la bonne direction. Une réforme que le ministre Simon Jolin-Barrette n’a pas l’intention de renforcer pour l’instant. 

La ministre des Langues officielles fédérales, Ginette Petitpas Taylor, soutient que «les données du recensement sur les langues officielles sont préoccupantes». Rappelons que la réforme de la Loi sur les langues officielles du gouvernement Trudeau se fait toujours attendre. 

Un portrait du français inquiétant dans le roc

Bien que l’état du français ne soit pas réjouissant au Québec, les données du Recensement 2021 sont plus funestes encore dans le reste du Canada, notamment en Ontario et au Nouveau-Brunswick.

À l’échelle du pays, la proportion de personnes dont le français est la première langue officielle parlée a encore diminué entre 2016 et 2021, passant de 22,2 % à 21,4 %, comparativement à 27,2 % en 1971.

À l’opposé, et pour la première fois depuis 1971, l’anglais comme première langue officielle parlée a gagné près d’un point, atteignant désormais 75,5 %.

Selon l’analyste principal de Statistique Canada Bertrand Ouellet-Léveillé, moins de la moitié (49 %) des Franco-Ontariens utilisent surtout le français à la maison, tandis que 44 % d’entre eux y parlent surtout l’anglais. Les 6 % restants usent des deux langues à égalité.

C’est le Nouveau-Brunswick, seule province officiellement bilingue, qui accuse la plus importante chute de personnes utilisant principalement le français (-1,9 %).

«C’est inquiétant pour plusieurs raisons», dit la professeure au Collège militaire royal du Canada Stéphanie Chouinard, puisque le Nouveau-Brunswick, terre des Acadiens, passe sous la «barre psychologique» des 30 % de gens dont le français est la première langue officielle parlée.

Pour renverser la tendance, «le Canada doit complètement revoir son système d’immigration » afin d’accepter « plus d’immigrants en provenance de l’Afrique francophone», juge le professeur Richard Marcoux de l’Université Laval.

-Écoutez Philippe Lorange, bachelier en science politique et philosophie à l’Université de Montréal au micro d'Alexandre Dubé sur QUB radio :

Population qui a le français comme première langue officielle parlée au Canada hors Québec 

  • 1971 6,0 % 
  • 1981 4,9 % 
  • 1991 4,6 % 
  • 2001 4,2 %
  • 2011 3,7 % 
  • 2021 3,3 %

Bilinguisme en hausseau Québec, en baisse dans le reste du pays

Plus que jamais, le bilinguisme est surtout une affaire de Québécois francophones.

Au Québec, la proportion de personnes bilingues français-anglais est passée de 44,5 % en 2016 à 46,4 % en 2021.

Durant la même période, le bilinguisme chez les Québécois de langue maternelle anglaise a diminué, passant de 68,8 % à 67,1 %.

En hausse globale au Québec de 1,9 %, le taux de bilinguisme au Canada est resté plutôt stable entre 2016 et 2021, n’augmentant que de 0,1 % pour atteindre 18 %.

«Cette relative stabilité résulte en fait de deux tendances évoluant en sens contraire, le taux de bilinguisme français-anglais ayant été à la hausse au Québec, mais à la baisse à l’extérieur du Québec», explique l’agence fédérale. 

En effet, le taux de bilinguisme français-anglais a diminué dans les autres provinces, passant de 9,8 % à 9,5 %. 

«Il y a de sérieuses questions à se poser sur la perception et la valorisation du bilinguisme au pays», croit la professeure de science politique Stéphanie Chouinard. 

Pour la première fois de l’histoire, plus de la moitié des Québécois déclarent être en mesure de soutenir une conversation en anglais. 

«C’est la première fois que ce seuil est franchi depuis le Recensement de 1901, lorsque des renseignements ont été recueillis sur la connaissance des langues officielles pour une première fois», affirme Statistique Canada.

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