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Le conflit Israël-Hamas plonge les grandes universités américaines dans une crise politique

Le conflit Israël-Hamas plonge les grandes universités américaines dans une crise politique
Photo AFP


Le passage mouvementé des présidentes de trois grandes universités américaines devant une commission du Congrès souligne les vives tensions que le conflit Israël-Hamas a fait émerger. 

Je suis de passage à Harvard alors que l’endroit est au cœur d’une tempête politique provoquée par cette guerre qui enflamme les passions. Tout est calme sur le campus à l’approche des examens, mais l’administration est sur la corde raide. 

La rectrice Claudine Gay était à Washington mardi et, avec ses homologues de MIT et de l’Université de Pennsylvanie, elle a encaissé un barrage de critiques et d’attaques de législateurs républicains qui manquent rarement une occasion d’aviver les tensions partisanes. 

Une guerre aux enjeux moraux troubles

Au lendemain des attaques terroristes du Hamas sur des civils israéliens – y compris des actes d’une cruauté inouïe perpétrés contre des enfants, des femmes et des personnes âgées –, il était clair qu’une riposte d’Israël contre le Hamas était moralement justifiée.

Après deux mois de bombardements et plus de 15 000 morts palestiniens, dont une vaste majorité de civils innocents, il est aujourd’hui tout aussi justifié de dire que cette riposte a dépassé les bornes. On s’attendrait à mieux d’un État démocratique.

C’est ce flou moral qui a déchaîné les passions entre les défenseurs du droit d’Israël d’exister en paix et ceux qui réclament le même droit pour les Palestiniens, un débat qui enflamme les campus universitaires depuis belle lurette. 

Populisme et politique partisane

Ce débat s’entremêle avec d’autres divisions non moins vives. Par exemple, la présence de trois représentantes d’institutions élitistes a permis aux élus républicains de donner une désolante démonstration de populisme. 

Rien de plus facile en effet que de se mettre en valeur face à un électorat républicain sous-éduqué – qui valorise l’ignorance au point de vouer un culte à Donald Trump – en cassant du sucre sur le dos de trois femmes qui personnifient l’élitisme des grandes universités et, pour certains, leur «wokisme» (même si plusieurs de ces élus républicains sont eux-mêmes diplômés de ces institutions et issus de familles privilégiées).

Une graine de vérité

Il n’est pas faux que l’adhésion d’une certaine gauche à la cause palestinienne a dégénéré depuis le 7 octobre en un appui plus ou moins ouvert au Hamas et à son objectif d’annihiler Israël. Il est aussi vrai que cet appui prend parfois la forme de harcèlement – voire d’agressions – contre des juifs, sur les campus et ailleurs.

C’est donc une occasion en or pour les républicains de faire oublier leurs liens avec l’extrême droite antisémite pour tenter de séduire les électeurs (et les donateurs) juifs en accusant toute la gauche (donc les démocrates) d’antisémitisme. 

C’est de la pure récupération partisane, mais l’épisode souligne quand même la dérive d’une certaine gauche intellectuelle, entichée de la nouvelle mode de «l’intersectionnalité», pour qui la défense d’un groupe opprimé justifie les pires excès. 

Aux États-Unis comme ailleurs, les grandes universités font leur possible pour maintenir un semblant de respect pour la liberté d’expression et les sains débats d’idées, mais elles n’y parviennent pas toujours et c’est habituellement la droite, parfois l’extrême droite, qui en sort politiquement gagnante.

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