Un gène lié à une maladie rare pourrait être responsable de la fréquence plus élevée de maladies pulmonaires chez les enfants autochtones. La même maladie pourrait aussi être plus répandue chez les Canadiens français.

« On a souvent évoqué le tabagisme, le faible taux de vaccination et les conditions sanitaires pour expliquer ces problèmes pulmonaires chez les enfants autochtones », explique Adam Shapiro, pneumologue à l’Hôpital de Montréal pour enfants, qui est l’auteur principal de l’étude publiée fin février dans le Journal of Pediatrics. « Nous montrons qu’il y a peut-être une vulnérabilité génétique. »

Le taux de bronchiectasie, des dommages aux voies respiratoires, est inférieur à 5 cas pour 100 000 enfants au Canada. Mais chez les Inuits, par exemple, il dépasse 200 pour 100 000.

Le DShapiro soigne depuis une dizaine d’années des patients atteints de maladies respiratoires graves comme la bronchiectasie, dont beaucoup sont autochtones. Dans son étude, il démontre qu’un gène très rare, associé à une maladie pulmonaire appelée dyskinésie ciliaire primaire (DCP), est présent chez quatre enfants autochtones du Canada et des États-Unis. « Jusqu’à maintenant, on n’avait vu ce gène que chez deux familles bédouines du Moyen-Orient, dit-il. Le voir chez quatre patients autochtones, ça montre qu’il y a peut-être une surreprésentation de ce gène dans cette population. »

La bronchiectasie est une conséquence potentielle de la DCP, qui est présente à un taux variant entre une personne sur 7500 et une sur 30 000.

Dépistage

« Nous pensons que nous pourrons avoir des molécules qui visent les protéines défectueuses liées à ce gène problématique, dit le DShapiro. Il y a présentement des essais cliniques pour des protéines similaires, liées à d’autres maladies pulmonaires. »

Une conséquence clinique plus immédiate sera le dépistage de ce gène chez les enfants autochtones ayant des maladies pulmonaires.

Si on voit que ce gène est présent, on pourrait décider d’être plus agressifs avec la médication, ou avec l’imagerie médicale, pour éviter qu’il y ait des dommages aux voies respiratoires. Une fois que ces dommages sont créés, il y a d’autres problèmes plus tard dans la vie.

Dr Adam Shapiro, pneumologue à l’Hôpital de Montréal pour enfants

Pourrait-il y avoir un dépistage dès la naissance pour tous les bébés autochtones ? « Il est trop tôt pour le faire, mais si on confirme que ce gène est plus présent, ça pourrait être instauré. »

Nouvelle-France

Au fil de sa pratique, le DShapiro a aussi recensé 130 patients ayant d’autres gènes liés à la DCP chez les descendants des colons de la Nouvelle-France.

« La DCP est une maladie dont on s’occupe peu, notamment parce qu’elle est difficile à diagnostiquer, mais à mon avis, ce sera la prochaine fibrose kystique, dit le DShapiro. Comme on a fait des progrès dans le traitement de la fibrose kystique, on va faire des progrès dans le traitement de la DCP. Mais il faudra la dépister adéquatement, en premier lieu dans les populations plus touchées. C’est peut-être le cas des Canadiens français, nous voulons le vérifier. »

En savoir plus
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    Nombre de gènes liés à la dyskinésie ciliaire primaire
    Source : Journal of Pediatrics