Les nouvelles au sujet de l’environnement qui nous parviennent pendant que sont réunis à Glasgow les dirigeants du monde pour tenter de contenir l’urgence climatique (COP26) démontrent à merveille qu’il ne s’agit pas d’analyser et de décrier un problème de long en large pour qu’il disparaisse comme par magie.

Si la plume est plus forte que l’épée, elle semble drôlement impuissante devant l’avidité et la bêtise humaines.

Quand j’entends notre ministre québécois de l’Environnement dire qu’aucune étude environnementale – fédérale ou provinciale – pourrait empêcher la construction du tunnel autoroutier entre Québec et Lévis1, quand j’apprends que les principales entreprises pétrolières au Canada prévoient augmenter significativement leur production d’ici 2030 et n’ont pas de plan pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre2, j’avoue avoir de la difficulté à trouver mieux en termes d’exemples concrets d’aveuglement.

En lisant ces nouvelles, je ne peux m’empêcher de penser à la climato-résignation de Patrick Lagacé3 et 4. Car elles demeurent tout à fait alignées avec les sondages qui placent l’environnement et l’état de la planète loin derrière d’autres priorités, comme l’économie et la COVID-19 chez nos concitoyens.

C’est facile de manifester. Mais sommes-nous prêts à cesser de vivre comme nous le faisons actuellement pour préserver l’avenir de nos enfants ? Notre réponse collective est évidente et limpide : c’est non.

Qu’on regarde n’importe quel groupe de la société, tout le monde refuse de céder le moindre pouce de ses privilèges. C’est même plutôt le contraire ! Comme pour l’économie, on souhaite qu’ils croissent sans cesse : nouveaux voyages, nouvelles bébelles. Prospérons, pendant qu’il est encore temps.

PHOTO LUKE SHARRETT, ARCHIVES THE NEW YORK TIMES

« Tout le monde refuse de céder le moindre pouce de ses privilèges », constate l’auteur.

J’avoue me sentir de moins en moins crédible en tant qu’adulte qui tente d’élever des enfants responsables. Parce que je sais que ce sont eux et leurs descendants qui vivront avec les conséquences de nos gestes (et occasions manquées d’agir).

Or, nos gouvernements sont les seuls acteurs à disposer des leviers pour espérer limiter l’ampleur des dégâts. Car des dégâts, il y en aura. La science est – elle aussi, malheureusement – évidente et limpide là-dessus. Nous sommes en train de débattre entre être bien cuits ou être carbonisés, ce qui est un peu ironique quand même.

Des gouvernements démocratiques peuvent-ils ignorer les sondages pour écouter une minorité de citoyens avisés, même s’ils ne sont pas à la tête d’un conglomérat puissant ?

Des recours

Ont-ils des recours pour protéger la majorité contre elle-même ? Est-ce que ça s’est déjà vu ? Tiens oui, j’ai cru voir ça récemment quand il fallait se mettre sur pause pour sauver des vies ici et maintenant. Et la majorité s’est ralliée rapidement.

Il est là, le nœud du problème : nos institutions, nos lois et nos esprits s’avèrent très mal équipés pour protéger notre avenir collectif comparativement à nos intérêts privés à court terme.

Pourtant, quand le climat sera suffisamment déréglé, il nous nuira bien davantage que la construction d’une autoroute, monsieur le ministre. Il détruira même des routes déjà construites. Il se fichera bien, lui aussi, des études environnementales pour aller de l’avant.

Parce qu’à leur tour, l’avidité et la bêtise humaines s’avèrent drôlement impuissantes devant les forces de la nature.

1 Lisez  « Troisième lien : volée de bois vert pour le ministre Charette » 2 Lisez « Les pétrolières canadiennes n’ont aucun plan pour le climat » 3 Lisez « L’environnement, ce n’est pas important » 4 Lisez « Rouge, couleur de demain » Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion