Des meilleures bourses réclamées par les scientifiques afin de survivre à l’inflation  

Plusieurs centaines de scientifiques manifestent à Ottawa.

Plus d’une centaine de scientifiques en sarrau blanc se sont rassemblés jeudi après-midi sur la colline du Parlement à Ottawa, afin d’exiger au gouvernement de Justin Trudeau d’injecter plus d’argent dans les bourses d’excellence attribuées aux étudiants de cycles supérieurs ainsi qu’au postdoctorat.


Par cette manifestation, ils dénonçaient le statu quo du financement accordé par les organismes subventionnaires fédéraux. En effet, le montant de 21 000$ adopté en 2003, n’a pas été modifié depuis lors. Une situation en déphasage avec le coût de la vie, dénoncent-ils. 

«Il faut que ça change», lance Anh-Khoi Trinh, candidat au doctorat en physique théorique des hautes énergies à l’Université McGill. 

«Dans mon domaine de recherches, il n’y a pas beaucoup de sources de subventions ailleurs qu’au fédéral. Je n’ai pas d’autres options. Si le salaire n’augmente pas, je suis pris», s’indigne-t-il, en admettant d’ailleurs être un des rares chercheurs dans son entourage à toucher une bourse de 21 000$ du gouvernement. Le chercheur se compte  «chanceux». Bien que la somme ait été bonifiée grâce au soutien de son département, sa situation reste toutefois précaire, assure-t-il.  

Justement la professeure en biologie Jeannette Whitton est fatiguée d’assister impuissamment à cette précarité. Avec ses 25 ans de carrière au sein de l’Université de la Colombie-Britannique, elle voit de plus en plus des jeunes être découragés par la profession. Ce qui ne laisse présager rien de bon. 

«À Vancouver, un une chambre c’est 1500$ par mois et avec ça, il reste zéro. Ils [le gouvernement] ne comprennent pas qu’un étudiant de deuxième cycle c’est une formation à temps plein. Ce n’est pas simple de faire autre chose. Finalement on n'y arrive pas. […] c’est encore plus dur pour des personnes venant des familles modestes ou racisées», explique-t-elle.  

Pour la professeure, le gouvernement doit agir maintenant.  

«Quand on regarde les difficultés financières auxquelles ils font face aujourd’hui, on réalise qu’il faut absolument augmenter la bourse pour améliorer les sciences au Canada. Moi je ne serai pas là dans 15 ans. Il faut me remplacer et soutenir les étudiants qui essayent de devenir des scientifiques.» 

Fuite des cerveaux  

Pour M. Trinh, le Canada applique la politique de l’autruche en ce qui a trait à la science.  

«Une maîtrise ça peut te prendre deux ans et un doctorat peut varier entre 4 à 7 ans. Tu retardes ta vie pendant 10 ans juste pour faire ce que tu aimes et qui est important pour ton pays. […] Je connais beaucoup des gens qui après avoir fait une maîtrise vont faire un doctorat ailleurs.» 

Il évoque notamment le cas de certaines universités américaines qui octroient un salaire minimum de 48 000 dollars américains à leurs doctorants. 

«Au Canada on n'est clairement pas capable de maintenir nos chercheurs.» 

«J’ai visité un de mes étudiants qui est en Australie avec son compagnon. Ils m’ont dit: on aimerait ça revenir au Canada, mais vraiment être postdoctorant ce n’est pas possible. Les salaires qu’ils ont eu comme étudiant au doctorat c’est équivalent au postdoctorat ici», ajoute Mme Whitton. 

«Tout ce qu’on souhaite pour aujourd’hui est que le gouvernement augmente nos revenus», résume simplement Edris Madadian, président de l’Association canadienne de postdoctorants.  

Une lettre ouverte adressée au bureau du premier ministre Justin Trudeau et au ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie François-Philippe Champagne a déjà réuni près de 7500 signatures selon les organisateurs.