Hoola One, des plages aux terrains industriels

Jean-Félix Tremblay, l'un des trois cofondateurs de Hoola One, tient le tuyau d'un prototype de l'aspirateur à particules de plastique créé par l'entreprise.

S’éloigner des plages pour se rapprocher des terrains industriels… Si la proposition peut sembler rebutante pour le commun des mortels, elle est plutôt source de potentielle réussite pour Hoola One.


Soyons clairs : l’entreprise de Québec n’abandonne pas l’idée de nettoyer les plages du monde avec son modèle unique d’aspirateur à microparticules de plastique. Mais dans les derniers mois, au fil de ses recherches, la jeune pousse a réalisé qu’il y avait un marché plus prometteur auprès des producteurs de plastique et des entreprises qui fabriquent des objets faits de cette matière polluante.

Une façon, aussi, de s’attaquer au problème plus à la source.

L’entreprise s’en prend désormais entre autres aux billes de plastique, ces petites cartouches blanches utilisées pour fabriquer les objets d’usage quotidien, comme les bouteilles d’eau.

Hoola One s'attaque aux billes de plastique, la source de fabrication de plusieurs objets du quotidien, qui se retrouvent trop souvent dans l'environnement.

Hoola One va continuer de faire la chasse aux microparticules quasi invisibles, mais «on s’est rendu compte que le monde n’était pas prêt à payer pour ça. Ce sont plus les problèmes visibles qui intéressent les gens», explique l’un des trois associés dans l’entreprise, Jean-Félix Tremblay. D’où l’idée de désormais s’attaquer aux plus gros morceaux, comme les billes de plastique, grâce à une nouvelle technologie.

Que ce soit pour répondre à la pression sociale grandissante ou afin de se conformer aux lois changeantes, les entreprises de l’industrie du plastique n’auront peut-être plus le choix de nettoyer leurs terrains, voire les aires qui les entourent. Et c’est là que Hoola One peut être utile.

L’équipe a d’ailleurs récemment montré son savoir-faire au Texas, devant l’une de ces compagnies. Lors de son entrevue avec Le Soleil, Jean-Félix Tremblay a sorti des échantillons de la récolte de Hoola One. Quelques minutes d’aspiration, beaucoup de plastique…

Des démonstrations au Québec s’en viennent aussi, souligne-t-il.

Hoola One a abandonné l’idée qu’une seule machine pourrait régler tous les problèmes de la pollution dû au plastique. Elle mise maintenant sur une gamme de produits.

Vers la commercialisation

Pour l’instant, la jeune pousse est encore à l’étape de la recherche et du développement, mais les choses pourraient vite changer. L’entreprise espère commercialiser ses appareils en 2023 : au début de l’année pour l’aspirateur portatif de type sac à dos, à l’été pour les plus gros.

Ceux-ci ont toutes les allures d’une petite zamboni. La principale différence visuelle : ce gros tuyau qui sert à aspirer le plastique. Évidemment, le sable et la terre font aussi le voyage, mais la machine permet de séparer le bon grain de l’ivraie — dans ce cas-ci, le plastique — et de retourner à la nature ce qui doit s’y trouver.

Quelques minutes d'aspiration, beaucoup de plastique... Jean-Félix Tremblay montre une partie de la récolte faite lors d'une démonstration au Texas.

«On sait que ça répond aux besoins des clients, que ça fonctionne bien», affirme M. Tremblay. Reste donc aux entrepreneurs à concevoir une version «commercialisable» de ces engins, version qui répondra à tous les critères de sécurité.

Dans un monde idéal et propre, ces machines n’auraient pas besoin d’être créées, dit lui-même M. Tremblay : «En théorie, ce serait cool qu’on n’ait pas cette job-là.»

Hoola One existe d’abord pour faire une différence dans le monde, souligne-t-il. Les fondateurs n’hésitent pas à mettre de l’avant un message de prévention : il faut réduire la production de plastique à la source, donc sa consommation.

Et pour Hoola One, la récolte de la matière n’est pas une finalité. On doit ensuite la revaloriser.

L’entreprise québécoise n’a pas cette expertise, mais elle compte bien trouver des partenaires pour que ses efforts ne soient pas vains, pour que ce plastique soit réutilisé de la bonne façon, dans des objets durables. «Ce sera notre responsabilité de s’assurer que le produit qui est fait avec ces billes-là ne soit pas de petites fourchettes en plastique», illustre Jean-Félix Tremblay.

Les conseils de 2 Degrés

Depuis son arrivée à Québec, Hoola One est «parrainée» par l’incubateur d’entreprises 2 Degrés, qui se spécialise en environnement et en énergies propres. «[Hoola One] a une mission très ambitieuse par rapport à la planète, et met toutes les ressources et les efforts pour arriver à réaliser sa mission, à changer les choses pour le mieux», estime Alexandre Guindon, le directeur général de 2 Degrés.

«Ils ont réalisé des choses extraordinaires dans les dernières années et ont démontré la valeur de leur innovation et leur savoir-faire.»

Hoola One est né d’un projet universitaire, il y a cinq ans. Une bande d’étudiants de l’Université de Sherbrooke ont eu l’idée et l’ont développée. L’objectif, dès le départ, était de nettoyer l’une des plages les plus polluées du monde, celle de Kamilo, à Hawaii.

Le premier prototype conçu par Hoola One fonctionnait bien, et il pouvait aspirer des particules de plastique encore plus petites que le sable. Les tests effectués sur cette plage ont d’ailleurs été concluants.

D’un projet «scolaire», Hoola One est devenue une entreprise. Fondée par Jean-Félix Tremblay, Jean-David Lantagne et Samuel Duval, elle a déménagé — pour des raisons plus personnelles que professionnelles — de Sherbrooke à Québec il y a 18 mois. Depuis, M. Duval a quitté l’aventure; Anne-Sophie Lapointe s’y est greffée.

Les fondateurs se sont inspirés de l’héritage hawaiien pour trouver le nom de leur entreprise. Traduit librement, Hoola One signifie «redonner la vie au sable» en hawaiien, explique Jean-Félix Tremblay. Google Traduction y va un peu plus platement en proposant «économiser du sable».